LoiLATMP
TitreVII DROIT AU RETOUR AU TRAVAIL ET PROTECTION DES DROITS DU TRAVAILLEUR: ART. 234 À 251, 32, 252 À 264 LATMP ET 227 ET 228 LSST
Section4. Ordonnance
4.2 Mitigation des dommages
Titre du document4.2 Mitigation des dommages
Mise à jour2011-11-01


L'obligation de minimiser ses dommages appartient à celui qui les réclame. Celui-ci, en faisant la preuve de ses dommages, doit être en mesure de prouver la perte qu'il prétend avoir subie en raison du renvoi injustifié. Si l'employeur prétend que l'employé aurait pu raisonnablement minimiser la perte alléguée, il lui incombe d'en faire la preuve: Red Deer College c. Michaels, [1976] 2 R.C.S. 324; Vallerand et U.A.P. inc., [1998] C.L.P. 870.

L'obligation de minimiser ses dommages appartient au travailleur et non à l'employeur. En l'espèce, l'employeur a longuement interrogé le travailleur sur ses recherches d'emploi mais la CALP ne s'est pas prononcée sur la diligence démontrée par le travailleur en ce sens. La CALP ne pouvait justifier le quantum des dommages fixés sans traiter de l'obligation du travailleur de minimiser ses dommages: G. et Z. Stern Properties c. CALP, [1989] C.A.L.P. 609 (C.S.).

L'obligation de minimiser les dommages appartient à celui qui les réclame. Mais il incombe à celui qui devra les payer de démontrer que celui qui les a subis aurait pu mitiger la perte alléguée. L'employeur n'a pas fait cette preuve lors de l'audition en appel. Rien n'indique qu'il en a été empêché. La CALP n'a pas à faire enquête elle-même là-dessus. L'employeur n'a pas tenté de faire la preuve et on ne peut faire en révision une preuve que l'on a omis de faire en appel: Forages Dominik (1981) inc. et Leclerc, [1990] C.A.L.P. 807 (décision sur requête en révision).

Quant à la question de la mitigation des dommages, le travailleur a témoigné qu'il avait effectivement recherché un autre emploi mais sans succès. Aucune preuve n'a donc été faite par l'employeur que le travailleur n'a pas fait le nécessaire pour se trouver un autre emploi et mitiger ses dommages: Les portes centenaires et Joly, 18407-64-9004, 90-10-10, R. Brassard, (J2-16-02), révision accueillie sur un autre point, 91-06-27, R. Brassard.

Le travailleur ne sait ni lire ni écrire, ne parle que l'anglais et sa capacité à trouver un emploi est limitée. La CALP a donc tenu compte de la mitigation des dommages: P.P.E. Extrusion inc. c. CALP, [1991] C.A.L.P. 157 (C.S.), appel rejeté, C.A. Montréal, 500-09-000308-916, 94-11-15, jj. Vallerand, Mailhot, Steinberg.

L'article 260 prévoit que les sommes reçues au titre d'un autre emploi doivent être déduites de l'indemnité payable par l'employeur. Le défaut du travailleur de présenter l'état de ses gains tirés d'un autre emploi empêche la CALP de fixer le montant de l'indemnité. En conséquence l'employeur n'est tenu de verser aucune somme: Shelbec enr. et Bérubé, [1991] C.A.L.P. 902.

Un employeur peut démontrer qu'un travailleur réclamant compensation à la suite d'un congédiement illégal a failli à son obligation de minimiser ses dommages résultant de ce congédiement. L'employeur a établi le peu de crédibilité du travailleur et la seule affirmation de ce dernier qu'il a fait des démarches pour se trouver un emploi est insuffisante. Il n'y a donc pas lieu d'ordonner à l'employeur de lui verser l'équivalent du salaire perdu: Société immobilière Trans-Québec et Ménard, 11169-60-8903, 92-08-03, G. Godin, (J4-14-09).

Le travailleur a été congédié illégalement le 12 novembre 1991, sa lésion professionnelle était consolidée le 16 décembre et il s'est trouvé un autre emploi le 19 mai 1992. L'employeur n'a soumis aucune preuve pour tenter de démontrer que le travailleur n'a pas fait diligence à se trouver au autre emploi. Or, le délai qui s'est écoulé entre la date de consolidation de la lésion et la réintégration dans un nouvel emploi apparaît raisonnable: Hardt Equipment Manufacturing inc. et Suissa, [1994] C.A.L.P. 807.

Le témoignage du travailleur selon lequel il a fait de nombreuses démarches de recherche d'emploi est non crédible. Le travailleur n'ayant fait aucun effort pour se trouver un emploi, l'employeur ne peut être tenu au paiement du salaire perdu: Chaput et Les Chevrons Lavallois inc., 60303-60-9406, 95-01-31, J. L'Heureux.

Le travailleur occupe un poste saisonnier d'opérateur d'épandeuse lorsqu'il subit, le 20 octobre 1991, une lésion professionnelle. Le 13 décembre, il est mis à pied. Le 20 mars 1992, la CSST déclare qu'il est apte à reprendre son emploi. Le 19 juin, le poste d'opérateur d'épandeuse est confié à un collègue de travail qui l'occupe jusqu'au début d'août. Le 19 août, l'employeur offre un poste d'opérateur d'épandeuse au travailleur qui refuse et ne reprend le travail pour l'employeur que le 21 septembre. Le poste d'opérateur d'épandeuse étant disponible à compter du 19 juin, le travailleur avait le droit, en vertu de l'article 248, d'être réengagé comme à chaque année depuis 1977. Ainsi, en ne réengageant pas le travailleur au plus tôt le 19 juin, l'employeur exerçait à son égard une mesure visée à l'article 32, compte tenu de l'application de l'article 255. La CALP ne peut appliquer l'obligation de mitiger ses dommages au travailleur qu'à compter du moment où l'employeur lui a véritablement indiqué qu'il était disposé à le réengager et que celui-ci a refusé sans raison valable. Jusque là, rien n'indique que le travailleur aurait pu mitiger les effets de la décision de l'employeur. L'employeur doit verser au travailleur la somme dont il a été privé entre le 19 juin et le début du mois d'août: Pavages Beau Bassin et Day, 55997-01-9401, 95-07-03, J.-M. Dubois.

Le travailleur a l'obligation de mitiger ses dommages et la CALP doit en tenir compte, sinon elle commet une erreur manifeste donnant ouverture à la révision pour cause: Beaudin et Automobile J.P.L. Fortier inc., 57793-62-9403, 96-03-12, A. Archambault (décision accueillant la requête en révision).

À la suite de son congédiement, la travailleuse a fait suffisamment d'efforts pour se trouver de l'emploi, même si on aurait pu penser qu'elle n'a pas assez diversifié ses démarches. Il n'appartient pas vraiment au Tribunal de porter un jugement sur la qualité de sa recherche d'emploi, dans la mesure où il n'y a pas eu mauvaise foi ou fausse représentation de sa part: Blanchard et Millette & fils, [1998] C.L.P. 631.

L'obligation du travailleur de minimiser ses dommages comporte deux volets: la recherche d'emploi et ne pas refuser des offres qui sont raisonnables dans les circonstances: Vallerand et U.A.P. inc., [1998] C.L.P. 870; Beaudin et Automobile J.P.L. Fortier inc., [1999] C.L.P. 1065 (décision sur requête en révision), requête en révision judiciaire rejetée, [2000] C.L.P. 700 (C.S.).

Dans le cadre de l'obligation de mitiger les dommages réclamés par un travailleur, une recherche d'emploi doit revêtir un caractère d’honnêteté et de persévérance, et cela, en suivant une certaine structure de recherche que l’on puisse qualifier de raisonnable: Vallerand et U.A.P. inc., [1998] C.L.P. 870.

L’employeur reproche à la travailleuse de ne pas avoir mitigé ses dommages. À cet égard, la travailleuse a fait les démarches appropriées pour se retrouver un emploi et aucune preuve n’indique qu’elle a refusé des offres d’emploi. D’ailleurs, l’employeur est mal venu de reprocher à la travailleuse d’avoir manqué à son obligation de minimiser son préjudice alors qu’il n’a guère manifesté de préoccupation quant à la sienne et à l’obligation que lui faisait la loi de donner suite à l'ordonnance de réintégration qu'avait rendue la CSST. Ainsi, la travailleuse a droit à une indemnité pour la période allant du 11 novembre 2003 au 26 avril 2004, parce qu’elle a été congédiée illégalement et que son employeur a fait défaut de respecter l'ordonnance rendue par la CSST et de la réintégrer: Restaurant du Collège ltée et Chiasson, 221961-64-0311, 06-10-05, J.-P. Arsenault, (06LP-131).

Compte tenu que le travailleur n'a exercé son emploi que six semaines avant d'être congédié en raison de sa lésion professionnelle et qu'il a manqué de persévérance dans sa recherche d'emploi pour minimiser ses dommages, la CLP lui accorde une indemnité compensatoire de 2400$ représentant 30 heures/semaine en moyenne x 10$/heure pour huit semaines: Restaurant Le Forum et Voghel, 304409-09-0611, 09-03-13, D. Sams, (08LP-283).

Si le tribunal ne peut accepter l'approche préconisée par l'employeur au motif qu'elle est de nature à mésestimer les heures supplémentaires que le travailleur aurait effectuées, on ne peut davantage agréer à celle soumise par le travailleur parce que celle-ci gonfle artificiellement cette même donnée. Bien qu'imparfaite, dans ce cas particulier, la méthode retenue par la CLP a l'avantage de compenser la sous-évalutation ainsi que la surestimation faite par l'employeur et le travailleur: Hydro-Québec et Cloutier, 234032-71-0703, 09-11-30, R. Langlois.

Dans le contexte de la réduction des dommages, si le législateur avait voulu que le salaire net gagné, après dépenses d'emploi, soit déduit du montant dû par l'employeur, il l'aurait énoncé explicitement. En l'absence d'une telle disposition, le terme «salaire gagné», édicté à l'article 260, doit recevoir son sens courant, soit le salaire brut avant déductions selon les feuillets T-4 ou relevés 1. Conformément à l'article 257, la somme de 106 957$ doit être soustraite des 129 087$ que l'employeur aurait dû verser à la travailleuse. Il reste un solde de 22 129,76$ brut, représentant le montant dû à la travailleuse après réduction des dommages, auquel s'ajoute l'intérêt à compter de la date du dépôt de la plainte: Daigneault et STM (Réseau des Autobus), [2010] C.L.P. 757.