LoiLATMP
TitreII LA NOTION DE LÉSION PROFESSIONNELLE: ART. 2, 25 À 31
Section2. Éléments constitutifs de la notion d'accident du travail: art. 2, al. 1
2.1 Événement imprévu et soudain
2.1.3 Reconnaissance par présomption de fait
Titre du document2.1.3 Reconnaissance par présomption de fait
Mise à jour2011-11-01


Généralités

Une blessure ou une maladie peut être l'indice qu'un événement imprévu et soudain s'est produit. Il faut nécessairement qu'il se soit produit quelque chose pour qu'un mouvement, en apparence normal, entraîne une entorse lombaire: Lefebvre c. C.A.S., [1991] R.J.Q. 1864 (C.A.) (obiter).

L'usage de la présomption est possible dans la mesure où il y a une preuve de faits suffisamment graves, précis et concordants pour permettre de conclure à l'événement imprévu et soudain: Amyot et Hôpital Louis-H. Lafontaine, 12880-63-8904, 91-10-10, J.-M. Duranceau, (J3-19-10): Beauregard et Triselect inc., 57874-62-9403, 95-10-05, P. Capriolo, (J7-09-08); Centre hospitalier de l'Université de Montréal et Blouin, 202326-63-0303, 03-10-01, R. Brassard, (03LP-147).

La détermination de la survenance d'un événement imprévu et soudain est une question de fait dont la preuve peut être administrée par tous les moyens légaux, y compris celui des présomptions: Chaput c. S.T.C.U.M., [1992] C.A.L.P. 1253 (C.A.), requête pour autorisation de pourvoi à la Cour suprême rejetée, 93-03-04 (23265); lésion reconnue: Bourret et Dominion Textile inc., [1992] C.A.L.P. 313, requête en révision judiciaire rejetée, [1992] C.A.L.P. 1179 (C.S.); Stone-Consolidated inc. c. CALP, [1994] C.A.L.P. 429 (C.S.); Beauchemin et Q.I.T. Fer & Titane inc., 22931-62-9011, 93-07-27, J. L'Heureux, (J5-18-16), révision rejetée, 94-08-23, B. Lemay; Hôpital Louis-H. Lafontaine et Teasdale, [1993] C.A.L.P. 894; Groupe de sécurité Garda inc. et Corbeil, 54947-60-9311, 95-01-31, S. Lemire, révision rejetée, 95-08-02, M. Duranceau, requête en révision judiciaire rejetée, [1995] C.A.L.P. 1930 (C.S.), appel rejeté, C.A. Montréal, 500-09-001777-952, 99-02-18, jj. Mailhot, Forget, Thibault.

En présence d'un geste ou d'un mouvement banal posé dans le cadre normal ou habituel du travail, on ne saurait reconnaître l'existence d'un événement imprévu et soudain par présomption de fait ou autrement: Bérubé et Les Fromages Crescent ltée, [1995] C.A.L.P. 1185; Fortin et Entreprises du Bon Conseil ltée, 30566-03-9107, 93-06-25, D. Beaulieu; Brosseau et Général Motors du Canada ltée, 18454-61-9004, 93-03-15, J.-Y. Desjardins.

Les présomptions de fait prévues à l'article 2849 du Code civil du Québec sont laissées à l'appréciation de l'adjudicateur qui ne doit prendre en considération que les faits graves, précis et concordants pour établir la probabilité du fait à prouver. Les présomptions sont précises lorsque les inductions qui résultent du fait connu tendent à établir directement et particulièrement le fait inconnu et contesté. Elles sont concordantes lorsque, ayant toutes une origine commune ou différente, elles tendent, par leur ensemble et leur accord, à établir le fait qu'il s'agit de prouver. Ainsi, les indices connus doivent rendre probable l'existence du fait inconnu, sans qu'il soit nécessaire toutefois d'exclure toute autre possibilité. Une telle preuve est nécessairement circonstancielle et doit être faite selon la prépondérance des probabilités. Les faits prouvés n'ont pas à justifier une conclusion d'une certitude absolue ni ne doivent exclure toute autre possibilité. Mais la conclusion retenue doit être probable: Hôpital Général de Québec c. CLP, [1998] C.L.P. 797 (C.S.); Gauthier et Institut canadien de Québec, 205833-31-0304, 04-08-16, J.-F. Clément.

Les faits sur lesquels s'appuie la CLP pour conclure à une lésion professionnelle par présomption de fait sont tirés du témoignage du médecin expert de l'employeur dont les propos ne valent que dans la mesure où il existe une condition personnelle préexistante, ce que le tribunal n'a pas retenu. L'affirmation que l'hyperextension du genou puisse causer une lésion n'est pas l'expression d'une probabilité que l'hyperextension du genou a causé une lésion. De même le fait que l'on puisse comprendre que la travailleuse ait fait un faux mouvement n'implique pas nécessairement la probabilité d'un tel faux mouvement. Que la preuve par présomption soit admissible ne dégage pas pour autant la partie chargée du fardeau de la preuve d'apporter une preuve qui soit prépondérante. Dossier retourné à la CLP: Imprimerie Solisco inc. c. CLP, C.S. Beauce, 350-05-000133-015, 02-02-26, j. Bernard, (01LP-163).

Selon l’interprétation donnée à l’article 2849 du Code civil du Québec par la Cour suprême du Canada dans la cause Québec (Curateur public) c. Syndicat national des employés de l’hôpital St-Ferdinand, ainsi que les critères cités dans l’affaire Gauthier et Institut canadien du Québec, les présomptions de fait sont laissées à l’appréciation de l’adjudicateur qui doit prendre en considération les faits graves, précis et concordants pour établir la probabilité du fait à prouver: Poulin et Boa-Franc inc., [2008] C.L.P. 1298.

Lésions reconnues

Généralités

À la suite d'un mouvement, soit celui de se tourner et de se pencher pour ramasser une lettre, le travailleur, un facteur, subit une entorse lombaire. Jamais auparavant, il ne s'est plaint d'un mal de dos. En l'absence de toute autre preuve, il y a présomption de fait que l'entorse résulte d'un faux mouvement tel que décrit par le travailleur: Borduas et Société canadienne des postes, 02614-62-8703, 88-09-06, M. Cuddihy.

Une blessure ou une maladie peut être l'indice qu'un événement imprévu et soudain s'est produit. Il faut nécessairement qu'il se soit produit quelque chose pour qu'un mouvement, en apparence normal, entraîne une entorse lombaire: Houde et La compagnie Price ltée, [1993] C.A.L.P. 540, requête en révision judiciaire rejetée, [1993] C.A.L.P. 643 (C.S.).

Douleur vive au coude droit après que la travailleuse, une infirmière, a soulevé une cruche de 25 livres. Une épicondylite est par la suite diagnostiquée. L'apparition d'une douleur ne constitue pas en soi un événement imprévu et soudain. Les faits mis en preuve, graves, précis et concordants permettent de présumer la survenance d'un autre fait inhabituel ou insolite, un geste malencontreux, excessif qui a été exécuté inconsciemment par la travailleuse et qui a entraîné sa lésion. Ce fait constitue l'événement imprévu et soudain: Duguay et Hôpital du Sacré-Coeur, [1994] C.A.L.P. 45, requête en révision judiciaire accueillie, [1994] C.A.L.P. 423 (C.S.), appel accueilli, C.A. Montréal, 500-09-000410-944, 99-04-22, jj. Denis, Gendreau, Otis.

Mouvement de rotation en position accroupie pour transférer des documents d'une valise à une autre. Les faits sont suffisamment graves, précis et concordants pour conclure que la travailleuse a effectué un faux mouvement à l'origine de la lésion (entorse lombaire et hernie): Lecavalier et Université de Sherbrooke, 42493-60-9207, 94-07-28, E. Harvey, (J6-19-21); lésion lombaire post-effort. Lésion reconnue: Montpetit et Samuel & fils ltée (Québec), 61197-62-9407, 95-12-14, F. Poupart.

Décollement de la rétine. Conclusion qu'il y a eu introduction d'un corps étranger dans l'oeil gauche. Présomption de fait: Marcoux et Industrie Machinex inc., 46840-04-9212, 95-03-29, R. Chartier, requête en révision judiciaire rejetée, C.S. Québec, 200-05-001884-951, 95-10-13, j. Thibault.

Entorse lombaire. Le travailleur, en se penchant vers l'avant et vers le côté pour ramasser ses bottes d'hiver qui étaient placées sous la table de travail à côté de lui, ressent une douleur lombaire. Le geste de se pencher comme le travailleur l'a fait ce jour-là est un événement imprévu et soudain. Quand un geste est accompagné pour la première fois d'une douleur soudaine et qu'un médecin pose un diagnostic d'entorse, on est en mesure d'inférer qu'il y a un élément d'imprévisibilité. Il s'agit de voir à l'application d'une présomption de fait. L'événement s'est produit à l'occasion du travail puisqu'il y a connexité avec le travail: Samuelsohn ltée et Fittante, [1996] C.A.L.P. 727.

Tendinite de la longue portion du biceps de l'épaule. Préposé à la cale. Considérés ensemble, les différents éléments de faits permettent de présumer que les symptômes ressentis par le travailleur ont été causés par le travail qu'il a fait ce matin-là. Un événement imprévu et soudain pouvant expliquer ces symptômes peut être présumé: St-Onge et Terminus maritimes fédéraux, [1996] C.A.L.P. 1224.

Le travailleur, un débroussailleur, est retrouvé mort en forêt quatre jours après sa disparition au cours d'un orage alors qu'il devait rejoindre l'autobus de la compagnie. Il y a suffisamment de faits graves et précis (photos, témoignages, relevés topographiques, admissions de l'employeur) qui permettent d'établir que le travailleur a été victime d'un accident du travail ayant entraîné sa mort sans qu'on puisse en établir ni la cause, ni l'heure exactes. Ni l'hypothèse du meurtre ni celle du suicide ne peuvent être retenues: Succession Claude Leblanc et Rexfor, 81715-60-9608, 97-12-18, G. Robichaud.

La CLP a retenu que le fait, pour deux travailleuses, d'avoir pendant le même quart de travail déplacé une quinzaine de patients en employant des méthodes de travail différentes avait pu constituer l'événement imprévu et soudain ayant causé l'entorse lombaire subie par la travailleuse. Cette conclusion n'est pas sans fondement en regard de la preuve administrée: Hôpital Général de Québec c. CLP, [1998] C.L.P. 797 (C.S.).

Hernie C6-C7. La travailleuse, une infirmière, éprouve une douleur à l'aisselle droite en enfilant son tablier de plomb. Elle est par ailleurs porteuse d'une dégénérescence discale multi-étagée importante. Cependant, elle n'a jamais eu de problèmes cervicaux avant l'incident rapporté. Elle n'a jamais consulté et elle a toujours fait son travail qui est relativement exigeant. La douleur est survenue à un moment précis et à un endroit précis qui a toujours été décrit comme étant le même et dans les mêmes circonstances. Ainsi, tous les faits sont suffisamment graves, précis et concordants pour conclure par présomption de fait qu'un faux mouvement assimilable à un événement imprévu et soudain est survenu: Boisvert et Institut de cardiologie de Montréal, 104172-62-9807, 00-02-07, H. Marchand.

La travailleuse, une brigadière scolaire, souffre de varicelle. Dans deux écoles qu'elle dessert, au moins un cas de varicelle a été déclaré. Cette maladie est principalement une maladie d'enfant et la contamination se fait généralement par le contact avec un enfant infecté. Le travail de brigadière implique parfois de prendre les enfants par la main pour leur faire traverser la rue. De plus, la travailleuse n'est pas en contact avec des enfants en dehors de son travail. Ces faits sont suffisamment graves, précis et concordants pour conclure que la travailleuse a été en contact avec un enfant infecté du virus de la varicelle dans le cadre de son travail de brigadière: Communauté urbaine de Montréal et Robin, 122219-71-9908, 00-03-17, Anne Vaillancourt.

Serveuse. Lésion au tendon d'Achille gauche qui s'est soudainement manifestée au début de l'après-midi du 23 octobre 2001, alors qu'elle marchait rapidement pour servir de nombreux clients. La travailleuse n'a pas identifié d'événement particulier au moment de l'apparition de ses douleurs, mais l'endroit était bondé de clients, elle devait procéder très rapidement pour les servir et elle a subitement ressenti une douleur, comme si elle avait reçu un coup ou fait un faux mouvement. Manifestement, la douleur est apparue alors qu'elle exécutait des mouvements qui sollicitaient les membres inférieurs et, en particulier, les tendons d'Achille. Ces faits non contredits sont suffisamment graves, précis et concordants pour permettre de présumer la survenance d'un fait inhabituel ou insolite, d'un geste malencontreux ou excessif qui a été exécuté inconsciemment par la travailleuse et qui a entraîné une lésion au tendon d'Achille gauche: Hottin et Chez Cora déjeuners, 185261-61-0206, 02-08-09, F. Poupart.

Les faits tels que rapportés par la travailleuse et la démonstration à l’audience sur la façon de faire le déplacement du patient permettent d’induire la probabilité de la survenance d’un événement imprévu et soudain ayant causé la lésion. Tout d'abord, ce travail comporte des risques de blessures puisqu’une méthode de travail a été instaurée pour effectuer le déplacement d’un patient sur un lit. Cependant, même si cette méthode permet de réduire les risques de blessures, elle ne permet pas d’éliminer tout risque puisqu’on ne peut garantir qu’elle soit toujours correctement exécutée. D’ailleurs, les faits montrent justement que la méthode n’a pas pu être exécutée correctement en raison du manque d’espace. Il s’agit d’un élément sérieux augmentant le risque de blessure et pouvant être assimilé à un événement imprévu et soudain. En combinant cet élément aux faits que la douleur est apparue en faisant le déplacement du patient, que la travailleuse a été par la suite incapable de continuer son travail régulier avant de consulter le médecin le jour même, qu’il n’y a aucune preuve d’une condition personnelle préexistante, on ne peut que déduire de façon probable qu’il est survenu un événement imprévu et soudain ayant causé la lésion. L’épicondylite ou la tendinite au bras gauche résulte donc d’un accident du travail: Centre hospitalier de l'Université de Montréal et Blouin, 202326-63-0303, 03-10-01, R. Brassard, (03LP-147).

Le témoignage crédible de la travailleuse a établi qu'elle a ressenti une douleur à l'omoplate au moment où elle a soulevé un rouleau de 25 à 30 lb au travail. Cette douleur a persisté tout au long de la fin de semaine suivante, et la travailleuse a tenté sans succès de reprendre son travail le dimanche soir à 23h. De ces faits, il y a lieu de déduire qu'un fait anormal et certainement rapide s'est produit au moment précis où la travailleuse manipulait le rouleau. C'est ce fait qui constitue l'événement imprévu et soudain à l'origine de la lésion diagnostiquée, soit une dorsalgie: Lazzaro et FCI Canada inc., 158958-71-0102, 03-10-03, L. Turcotte.

Épitrochléite du coude droit. Foreur. Des faits graves, précis et concordants permettent de conclure qu'il s'est produit quelque chose d'inhabituel lorsque le travailleur, en forant, a senti une douleur soudaine au coude droit. Il y a donc eu un événement imprévu et soudain. Sa version des faits est constante: il ne sait pas ce qui s'est produit exactement mais, en atteignant le métal, il a senti une vive douleur au coude, laquelle s'est aggravée. De plus, il n'éprouvait pas de problèmes lorsqu'il s'est présenté au travail et il a avisé son employeur immédiatement, même s'il a dû poursuivre son travail. Ce jour-là et le lendemain, il a continué à faire des efforts de préhension de la main droite en transportant son équipement, au point où il ne pouvait plus rien soulever. Lorsqu'il a consulté le lendemain, un diagnostic de tendinite du coude droit a été posé, lequel s'est précisé par la suite. Il est examiné par trois médecins de l'employeur et, selon l'un d'eux, le travailleur, qui présentait sans doute une pathologie personnelle mais asymptomatique, a vu le cours de celle-ci se modifier à l'occasion des efforts déployés. Or, il s'agit de la seule opinion sur la relation et elle est favorable au travailleur: Matériaux Économiques inc. et Thifault, 286593-71-0603, 07-05-23, Anne Vaillancourt, révision rejetée, 07-12-13, S. Sénéchal.

Tendinite de la coiffe des rotateurs de l'épaule gauche. Préposée aux vestiaires. Le 5 novembre 2005, après avoir dû manipuler des manteaux et des sacs pour les accrocher à des cintres ou les décrocher, la travailleuse a ressenti une douleur à l'épaule gauche et un diagnostic de tendinite a été posé quelques jours plus tard. La preuve révèle suffisamment de faits graves, précis et concordants permettant de conclure, par présomption de fait, qu'est survenu un événement imprévu et soudain ayant causé la tendinite de la coiffe des rotateurs. La travailleuse n'avait jamais eu de douleur aux épaules avant l'événement. La douleur est apparue en faisant son travail normal, qui était alors particulièrement exigeant, et l'inflammation a augmenté graduellement pendant toute la soirée jusqu'à devenir intolérable à la fin du quart de travail du lendemain. La radiographie ne démontre aucune calcification. La tendinite s'est résorbée en trois semaines et la travailleuse a repris son travail sans douleur à l'épaule depuis. Enfin, le fait de soulever un manteau accompagné d'un sac lourd pour l'accrocher ou le décrocher, le bras au-dessus des épaules, constitue un mécanisme de production d'une tendinite de la coiffe des rotateurs: Keenan et Casino de Montréal, 285232-62-0603, 07-11-15, H. Marchand.

Céphalées, spasmes à l'hémicorps gauche, douleurs neuropathiques et brachialgie gauche à la suite de l'exposition à de la vapeur d'accélérant et de colle. Apprentie technicienne en électronique. Au début de l'année 2007, en utilisant un accélérant et une colle qui sèche en quelques secondes, la travailleuse a développé une série de symptômes. Après son retrait de ce poste, quelques mois plus tard, elle a noté une diminution, puis une disparition des symptômes. Au mois d'octobre, lors d'un réaménagement des postes de travail, le poste où est utilisée la colle a été placé à proximité de celui de la travailleuse et elle a aussitôt éprouvé des vertiges, des étourdissements, des maux de tête, des spasmes au visage ainsi que des douleurs à la poitrine. Elle est retournée au travail en janvier 2008 et ne ressentait plus de symptômes. En avril 2008, une personne a utilisé de la colle auprès de la travailleuse et elle a subi une seconde crise. En l'espèce, la preuve démontre des faits précis, graves et concordants justifiant d'accorder à la travailleuse une présomption de fait qui établit avec une forte probabilité une relation entre l'exposition à ces produits chimiques et le développement de la symptomatologie qu'elle a décrite. De plus, il semble y avoir une correspondance marquée, quoique non absolue, entre la symptomatologie décrite aux fiches signalétiques et celle présentée par la travailleuse. En conséquence, chacune des expositions constitue un événement imprévu et soudain pour lequel la travailleuse a développé des symptômes qui l'ont rendue souffrante. Il y a là une relation temporelle que le tribunal ne peut ignorer: Aubin et Systèmes de Sécurité Paradox ltée, 366605-64-0812, 09-09-09, R. Daniel.

Chauffeur-opérateur. Sinusite, bronchite surinfectée et bronchospasmes. Le travailleur a été aspergé de matières fécales au visage et au cou en nettoyant une station de pompage. Comme les symptômes sont apparus rapidement, soit quelques heures après l'exposition, il y a une concomitance entre l'événement et l'apparition de la lésion. De plus, la présence de matières fécales au cou, l'équipement de protection qui n'était pas suffisant pour exclure la présence de ces matières et l'opinion des médecins qui ont tous conclu à une possibilité ou une probabilité de cause à effet, permet de conclure qu'il existe une présomption de fait établissant que le travailleur fut bien victime d'un accident du travail: Sani-Orléans inc. et Dufour, 372275-31-0903, 10-01-13, P. Simard.

Serveuse. Trouble de l'adaptation avec humeur anxiodépressive. Des faits graves, précis et concordants créent une présomption que les actes sexuels ont eu lieu à la demande de l'employeur; ils n'ont pas été consensuels. Il y a lieu de retenir la version de la travailleuse, soit qu'elle y a consenti sous l'effet de la menace subtile, peut-être, mais présente, faite par une personne en autorité. De tels actes constituent du harcèlement sexuel devant être considéré comme un événement imprévu et soudain et la relation entre celui-ci et le diagnostic de trouble de l'adaptation avec humeur anxiodépressive est établi: M... C... et Compagnie A, 2011 QCCLP 2615.

Virus et infections reconnus

La travailleuse, agente de bord dans un train, a contracté le virus de type Norwalk à l’occasion du travail. L'éclosion de ce virus dans un espace aussi réduit qu’un train constitue un événement imprévu et soudain. Puisque la preuve démontre que les employés en contact avec le virus ont dormi à l’hôtel et sur le même étage que celui où a dormi la travailleuse le lendemain, il est probable qu’elle a été en contact avec le virus. Il existe donc des faits graves, précis et concordants qui permettent de conclure que la travailleuse a contracté le virus en dormant à cet hôtel: Batista et Via Rail Canada inc., 194236-72-0211, 03-02-18, Anne Vaillancourt.

Le travailleur a démontré la survenance d'un accident du travail, soit un événement imprévu et soudain, en l'espèce une contamination par le campylobacter jejuni, survenu à l'occasion du travail en buvant de l'eau contaminée, ce qui a causé le développement du syndrome de Guillain-Barré. Les faits mis en preuve et non contredits, et qui représentent des indices graves, précis et concordants, permettent de considérer la thèse soumise par le travailleur comme étant non seulement possible, mais comme étant la thèse la plus probable: Scierie Pékan inc. et Brisebois, 184777-01C-0205, 03-10-09, G. Tardif, (03LP-182).

Le fait d'être en contact avec un virus peut constituer, selon les circonstances, un événement imprévu et soudain. L'éclosion du virus de la gastro-entérite dans un hôpital constitue une situation particulière et non habituelle. Une telle situation ne se produit pas chaque année. En conséquence, il est possible de faire l'analyse des réclamations sous l'angle de l'accident du travail. Bien que la preuve ne permette pas de déterminer avec certitude quand et où la travailleuse a été en contact avec le virus de la gastro-entérite, le standard de preuve est celui de la preuve prépondérante. À la période pertinente, selon les communiqués de l'employeur qui reprennent ceux de Santé Canada, le virus de la gastro-entérite, particulièrement le virus Norwalk, sévissait dans toute la communauté et dans le centre hospitalier, obligeant l'employeur à adopter des mesures de protection et d'isolement pour contrôler la propagation. Selon le rapport déposé par l'employeur, il y a bel et bien eu une éclosion de la gastro-entérite, particulièrement aux mois de novembre et décembre 2002. Selon ce même rapport, des cas ont également été signalés chez les membres du personnel à compter du 15 janvier 2003. De plus, la travailleuse allègue que deux compagnes de travail avec qui elle partage le même environnement de travail ont été affectées par la gastro-entérite aux mêmes dates. Elle affirme également ne pas avoir été en contact avec des personnes affectées par ce virus dans son environnement personnel. Il est donc très probable que ce soit au travail qu'elle a été en contact avec le virus. Par conséquent, il s'est produit un événement imprévu et soudain en janvier 2003: Casaubon et Hôpital du Sacré-Coeur de Montréal, 209496-72-0306, 03-11-24, Anne Vaillancourt; Lamontagne et Hôpital du Sacré-Coeur de Montréal, 218750-64-0310, 04-12-06, M. Cuddihy; Guillemette et Domaines Fleurimont inc., 2011 QCCLP 7059.

Des faits graves, précis et concordants permettent de conclure qu'il s'est produit un événement imprévu et soudain, soit que le travailleur, un chauffeur d'autobus, a été en contact avec un insecticide que l'employeur a utilisé pour la décontamination des autobus, entraînant chez lui un angio-oedème. Bien que la procédure mise en place par l'employeur soit supérieure aux normes habituelles et qu'il y ait peu de risque pour un travailleur de développer une réaction toxique au produit utilisé, cela n'exclut pas la possibilité, comme en l'espèce, qu'un travailleur présente une sensibilité particulière par rapport aux autres travailleurs: S.T.C.U.M. et Parker, 246026-62C-0410, 06-04-27, Anne Vaillancourt, (06LP-15).

Lésions non reconnues

La CALP crée de toute pièce un accident du travail alors que l'événement imprévu et soudain n'a pas été démontré. Elle ne pouvait raisonnablement conclure que la fatigue musculaire ait pu causer l'événement imprévu et soudain entraînant la fibrosite dorsale: Minnova inc. c. CALP, [1993] C.A.L.P. 966 (C.S.).

Hernie discale. Infirmière au département des soins intensifs coronariens. Assise face à des moniteurs, elle se retourne vers l'arrière en avançant son bassin et se penche pour insérer une feuille de papier dans le télécopieur. Elle ressent une décharge électrique intense à la région lombaire. Il s'agit d'un geste banal. Celui qui désire faire reconnaître l'existence d'un accident du travail doit prendre les moyens nécessaires pour démontrer, avec une certaine rigueur, la relation entre l'événement imprévu et soudain et la lésion. Il ne doit pas se contenter de s'appuyer sur une présomption de fait: Brassard et Hôpital général du Lakeshore, [1996] C.A.L.P. 350.

Entorse dorsale. Lorsqu'une blessure est diagnostiquée et qu'une douleur apparaît alors que le travailleur est à son travail, il faut présumer qu'il s'est produit un événement quelconque ayant entraîné cette blessure. Pour justifier l'application d'une telle présomption de fait, le tribunal doit être convaincu de la probabilité de la cause. En l'espèce, les faits prouvés ne sont pas suffisamment graves, précis et concordants pour permettre d'inférer par présomption de fait que la blessure diagnostiquée est survenue au travail: Cie Kenworth du Canada ltée et Bizier, [1996] C.A.L.P. 1440.

Il faut plus que la concomitance de l'événement et de la douleur pour conclure par présomption de fait. Le fait que la douleur soit apparue au travail alors que la travailleuse s'étirait pour nettoyer une pomme de douche ne signifie pas nécessairement qu'il est survenu un accident du travail. L'apparition de la symptomatologie à ce moment précis n'est alors que fortuite: Levasseur et Hôtel le Centre Sheraton, 62684-60-9409, 96-01-30, R. Brassard, (J7-12-06).

Pour faire la preuve d'un accident du travail, il faut prouver la survenance d'une événement imprévu et soudain, sinon directement, du moins par présomption de fait, car l’apparition d’une douleur, fût-elle concomitante à l’exécution d’un mouvement répétitif dans le cadre de l’accomplissement de tâches normales de travail, n’est pas en soi un événement imprévu et soudain. En l’espèce, la preuve directe et positive de la survenance, le 16 mai 2001, d’un événement imprévu et soudain n’a pas été faite. Par ailleurs, on ne peut inférer des faits mis en preuve qu’un événement imprévu et soudain s’est probablement produit. En effet, bon nombre des prémisses sur lesquelles s’appuie le médecin du travailleur pour expliquer les hernies discales ne s’avèrent pas conformes à la preuve. Affirmer que la combinaison de certains facteurs peut causer une lésion, que certaines activités sont susceptibles de provoquer un mal ou qu’un mouvement donné est suffisant pour produire une hernie n’équivaut pas à prouver que cela s’est probablement produit: Germain et Bourassa Automobiles International, [2003] C.L.P. 553.

Le travailleur n'a pas été victime d'un accident du travail. Bien que le craquement douloureux qu'il a ressenti se soit manifesté de façon imprévisible et soudaine, c’est l’événement qui doit pouvoir être qualifié d’imprévu et de soudain et non ses conséquences. De plus, on ne peut conclure à la survenance d’un événement imprévu et soudain par présomption de fait lorsque les déclarations du travailleur établissent clairement qu’il ne s’est justement rien produit de particulier le jour de l’événement accidentel allégué, ce qui est le cas du travailleur en l’espèce dans son témoignage: Les Industries April inc. et Palumbo, 214805-71-0308, 06-10-12, G. Morin, (06LP-139); En se penchant pour attacher le lacet d'une de ses bottines, le travailleur se penche et «barre». Entorse lombaire: Germain Larivière 1970 ltée et Desnoyers, 319991-64-0706, 08-06-13, D. Armand.