Loi
LATMP
Titre
IV LA RÉADAPTATION: ART. 145 À 187
Section
3. Éléments du plan de réadaptation: art. 148 à 187
3.4 Assignation temporaire: art. 179, 180
Titre du document
3.4 Assignation temporaire: art. 179, 180
Mise à jour
2011-11-01
NB :
Voir la section 6.5 du titre III sur la réduction ou la suspension du paiement de l'IRR prévue à l'article 142 (2) (e).
Généralités
Ce n'est pas parce qu'un travailleur est en assignation temporaire qu'il ne peut subir une nouvelle lésion professionnelle. Le travailleur en assignation temporaire à la suite d'un accident du travail pour une blessure au pied droit a subi une autre lésion professionnelle, soit une allergie à la poussière des métaux:
Pièces d'auto Kenny inc. et CSST,
[1998] C.L.P. 259.
L'assignation temporaire est avant tout une mesure facilitant la réadaptation d'un travailleur. Elle ne relève pas principalement du droit de gérance de l'employeur et n'est pas un moyen pour lui éviter l'imputation des coûts:
Pièces d'auto Kenny inc. et CSST,
[1998] C.L.P. 259;
C.U.S.E. et
Boislard
,
124038-05-9909, 00-04-11, F. Ranger.
En signant une entente visant un programme de départ volontaire, l'employeur renonçait de façon implicite à la possibilité d'offrir à la travailleuse une assignation temporaire si celle-ci décidait de se prévaloir de ce programme:
Centre hospitalier Gaspé et Reeves,
[1998] C.L.P. 1391;
Grondin et Hôpital La
Providence
,
123131-05-9909, 00-02-07, F. Ranger.
L'assignation temporaire répond à une double intention du législateur, soit favoriser la réadaptation du travailleur en le maintenant en emploi et permettre à l'employeur de limiter les coûts d'une lésion professionnelle en offrant aux travailleurs un travail qu'ils sont en mesure d'effectuer:
Komatsu International inc. et
Gagnon
,
[1999] C.L.P. 130;
Rivard et C.L.S.C. des
Trois-Vallées
,
[1999] C.L.P. 619.
Les trois conditions prévues à l'article 179 sont remplies puisque la travailleuse est raisonnablement en mesure d'accomplir le travail de répondre au téléphone, ce travail ne comporte pas de danger et il est favorable à la réadaptation. Quant au fait que la travailleuse ait déménagé dans une autre ville, il s'agit d'un choix personnel dont elle doit assumer les conséquences. Comme son lien d'emploi avec l'employeur n'est pas rompu, elle devait se rendre disponible pour travailler à l'établissement de l'employeur. Le déménagement de la travailleuse ne constitue pas une raison pour déclarer invalide l'assignation temporaire. Malgré tout, celle-ci est invalide en raison du fait que l'employeur s'est servi des dispositions de l'article 179 en faisant preuve de mauvaise foi et dans le seul but de nuire à la travailleuse. En effet, selon les articles 6 et 7 du
Code civil du Québec
(C.c.Q.), une personne physique ou morale doit exercer ses droits en respectant les exigences de la bonne foi et non dans le seul but de nuire à autrui. La CLP a non seulement le pouvoir mais aussi le devoir de vérifier si des dispositions aussi importantes que les articles 6 et 7 C.c.Q. sont respectées en l'instance:
Hubert et Atelier Lucky-Tech
inc.
,
[2003] C.L.P. 1550.
À la suite d'une lésion professionnelle, le travailleur est assigné à des travaux légers à temps partiel. Il ne s'agit pas d'une assignation temporaire puisque, dans ce cas, le travail est habituellement exercé à temps complet et l'employeur assume seul le salaire et les avantages liés à l'emploi. En l'espèce, il s'agit plutôt d'un nouvel emploi et les dispositions de l'article 52 recoivent application:
Lebrasseur et Construction Charles Quesnel
inc.
,
250387-08-0412, 05-06-15, P. Prégent, (05LP-165).
La travailleuse, atteinte de chondromalacie fémoro-patellaire, était disposée à effectuer le travail proposé par l'employeur mais elle ne pouvait utiliser le transport en commun pour se rendre au travail. Dans le document signé par son médecin, celui-ci a indiqué qu'elle avait besoin de transport pour son déplacement. Or, les critères émis par le législateur pour une assignation temporaire se retrouvent à l'article 179 et s'avèrent respectés dans le présent cas. Le transport de l'employé à son lieu de travail n'est pas une considération inhérente à la capacité de la travailleuse à effectuer un travail en assignation temporaire. Et rien dans la loi n'oblige un employeur à assumer les coûts de transport d'un travailleur de sa résidence à son lieu de travail, à moins que cet avantage ne soit préalablement accordé au travailleur, conformément à l'article 180. En l'espèce, aucune preuve de ce genre n'ayant été apportée, la travailleuse était capable d'effectuer le travail en assignation temporaire:
Laliberté & Associés inc. et
Roy
,
259357-72-0504, 05-09-08, M. Denis.
Le but de l’article 179 est préventif. Les conditions auxquelles le médecin qui a charge doit donner son accord visent principalement à éviter que le travailleur ne subisse de nouveaux problèmes de santé. Pour conclure à une situation de danger au sens de la loi, il faut se demander si la menace appréhendée s'actualisera de façon probable compte tenu des circonstances:
Beaudoin et Corbec Division Québec,
[2007] C.L.P. 948.
La travailleuse n’a pas omis ou refusé d’effectuer, de son propre chef, l’assignation temporaire. Elle a plutôt fait part à l’employeur d’une situation rendant ses services de préposée aux bénéficiaires à domicile inutiles et même stressants pour la cliente puisqu'il y avait incompatibilité entre la cliente et elle-même. Il ne s'agit donc pas d'indisponibilité ou d'insatisfaction personnelle. Comme cette situation découle des conséquences que l’employeur doit assumer considérant le type d’activités qu’il offre à sa clientèle, les dispositions de l'article 142 ne trouvent pas application:
Ressources santé L.M. et
Blain
,
296268-64-0607, 07-06-27, R. Daniel, (07LP-86)
, révision rejetée, 08-06-12, S. Di Pasquale.
À la suite d’une lésion professionnelle, le travailleur est assigné à un travail léger. L’entreprise où il était affecté devait fermer ses portes le 22 décembre 2006, mais les opérations se sont finalement terminées le 17 novembre. À titre de dédommagement, les travailleurs ont reçu l’équivalent du salaire qu’ils auraient normalement gagné durant la période du 18 novembre au 22 décembre 2006. Durant cette période, le travailleur n’a pas l’obligation de se présenter à l'établissement ou d’y accomplir une prestation de travail.
Ainsi, à compter de cette date, l’employeur ne pouvait être qualifié d’employeur et, n’étant plus en mesure de procurer une assignation au travailleur, l’article 180 ne trouve plus application:
Maax Cabinets inc. (Lava) et Kaleka,
324022-71-0707, 08-06-19, R. Langlois, (08LP-64)
.
Une assignation temporaire est valable même s'il n'y a pas de connexité avec le métier prélésionnel. Ainsi, le fait que le travailleur soit camionneur ne lui donne pas le droit de refuser d'exercer les tâches d'agent de sécurité:
Beaulieu et Services de pers. Renfortech
inc.
,
353233-62A-0807, 08-10-30, R. Langlois.
En interprétant la loi de façon large et libérale, particulièrement les articles 52 et 179, la notion d'assignation temporaire couvre toutes les situations de retour au travail chez l'employeur autres que le retour à «son emploi». En l'espèce, le retour progressif au travail doit être considéré comme une assignation temporaire et le travailleur a droit aux avantages liés à son emploi, soit celui de mécanicien à l'inspection, ce qui inclut le salaire afférent aux heures supplémentaires disponibles dans son emploi, même s'il ne les a pas travaillées, pour les périodes où il a effectivement travaillé en assignation temporaire:
Lemelin et R.T.C.
Garage
,
404197-31-1003, 10-12-21, G. Tardif.
Le droit accordé par l'article 179 est celui d'assigner temporairement un «travail»
Le droit que l'article 179 accorde à l'employeur est celui d'assigner temporairement un «travail» à celui qui a été victime d'une lésion professionnelle et non d'affecter un travailleur à n'importe quelle activité bien qu'elle soit avantageuse pour lui sur le plan personnel. Le travailleur n'était donc pas tenu d'accepter l'assignation proposée par l'employeur qui consistait à suivre une formation informatique alors qu'il n'utilise jamais l'informatique pour réaliser ses tâches de ferblantier. Les cours proposés ne sont donc d'aucun intérêt pour le travailleur sur le plan professionnel. Cette formation semble n'avoir pour but que de diminuer la cotisation de l'employeur à la CSST car les personnes qui y sont admissibles sont celles qui jouissent d'une assignation temporaire, les connaissances qu'elles acquièrent ne sont l'objet d'aucune évaluation et la formation se termine avec la consolidation des lésions professionnelles:
Pouliot et J. M. Asbestos
inc
.,
[2000] C.L.P. 1128;
Provigo Distribution (Division Maxi) et
CSST
,
151878-61-0012, 01-08-06, N. Lacroix, (01LP-67), révision rejetée, [2001] C.L.P. 717.
Permettre à l'employeur de retourner un travailleur chez lui et considérer une telle situation comme l'équivalent d'une assignation temporaire qui lui permet de ne pas être imputé des coûts constitue une interprétation qui n'est pas conforme aux dispositions des articles 179 et 180. Un travailleur qui est retourné chez lui ne bénéficie aucunement d’un travail chez l’employeur et il est évident qu’il ne sera pas incité à contester la décision de l’employeur de le retourner chez lui, lorsque ce dernier décide de lui verser l’ensemble des prestations. On ne peut, sous le couvert d’une fausse assignation temporaire, tenter de diminuer ses cotisations à la CSST:
Provigo Distribution (Division Maxi) et
CSST
,
151878-61-0012, 01-08-06, N. Lacroix, (01LP-67), révision rejetée, [2001] C.L.P. 717.
L'employeur n'a pas l'obligation d'assigner temporairement un travail à un travailleu
r
L’employeur n’a aucune obligation d’assigner temporairement un travail à un travailleur. Il bénéficie de cette opportunité mais la loi ne crée pas de contrainte à cet égard. L’employeur n’a également aucune obligation de maintenir une telle assignation. Elle peut être interrompue sans que le travailleur puisse s’y opposer puisque la loi ne lui offre aucun recours à ce sujet. D’autre part, l’article 180 ne s’applique que lorsque le travailleur accomplit le travail assigné par l’employeur. Quand l’assignation prend fin, le travailleur ne peut prétendre à aucun droit en vertu de cet article:
Fournier et Métro Richelieu
inc.
,
239434-71-0407, 05-05-20, C. Racine, (05LP-60).