LoiLATMP
TitreII LA NOTION DE LÉSION PROFESSIONNELLE: ART. 2, 25 À 31
Section5. Récidive, rechute ou aggravation: art. 2, al. 14
5.02 Une relation entre la lésion initiale et la rechute, récidive ou aggravation alléguée
5.02.1 Les guides ou paramètres établis par la jurisprudence
5.02.1.11 La similitude des diagnostics
Titre du document5.02.1.11.1 La récidive d'entorse
Mise à jour2011-11-01


Généralités

Dans sa décision initiale, la CLP a raison de dire qu'elle n'était pas liée par l'opinion du médecin traitant de la travailleuse, qui pose un diagnostic de récidive d'entorse lombaire, et qu'elle pouvait y préférer d'autres éléments de preuve. Elle a toutefois commis une erreur déterminante lorsqu'elle écarte ce diagnostic en affirmant qu’il est médicalement reconnu qu’une entorse ne récidive pas. Cette affirmation ne repose sur aucune preuve d’expert et ne peut résulter de sa connaissance d’office, d’autant plus qu’il n’est pas apparent qu’elle ait bénéficié pour rendre sa décision de l’opinion d’un assesseur médical. Plus encore, même le médecin de la CSST pose le même diagnostic de récidive d’entorse lombaire: Lagarde c. CLP, [2004] C.L.P. 1846 (C.S.).

Il n'y a pas lieu d'exiger la présence d'un nouvel événement pour conclure à la survenance d'une RRA, même dans le cadre d'une réclamation pour une récidive d'entorse lombaire: Bergeron et Hôpital Sacré-Coeur de Montréal, 206266-63-0304, 05-02-04, L. Boudreault (décision accueillant la requête en révision).

Il est reconnu qu’une entorse ne récidive pas et ceci fait partie de la connaissance d’office de la CLP. Il faut un nouvel événement pour entraîner une entorse: Leblanc et Serv. Envir. Protec Côte-Nord inc., 282372-63-0602, 07-02-08, N. Lacroix.

Lésions reconnues

Entorse cervicale. Douleur à l'épaule qui se perpétue. La similitude du site des lésions, le continuum symptomatique, la similitude des diagnostics, le suivi médical, la proximité des événements entre eux et la relation entre les deux pathologies permettent de conclure que le travailleur a subi une lésion professionnelle: Brouillard et Hydro-Québec, 27536-62-9103, 93-05-20, M. Zigby.

Une nouvelle entorse lombaire peut constituer la RRA d'une entorse précédente. De façon générale, une entorse peut guérir dans le temps, mais elle peut également laisser des séquelles permanentes et des limitations fonctionnelles. Il y a diverses catégories d'entorses, notamment l'entorse qui évolue plus ou moins rapidement vers l'état asymptomatique et sans signes cliniques. On retrouve également l'entorse qui demeure symptomatique avec présence de signes cliniques même après la consolidation. Le travailleur porteur de cette entorse sera beaucoup plus vulnérable qu'un travailleur devenu asymptomatique. Il pourra donc être sujet à des épisodes de RRA de sa lésion initiale sans qu'il y ait présence d'un nouvel événement traumatique. La méthode d'évaluation d'une RRA ne doit pas différer dans le cas d'une entorse que dans le cas de tout autre diagnostic. L'analyse de la preuve factuelle et médicale permet de conclure que les paramètres établis par la jurisprudence pour la reconnaissance d'une RRA dans un tel contexte sont présents: Girard et C.S. Manicouagan, 74678-09-9511, 97-03-10, C. Bérubé, (J9-02-17).

Entorses cervicales successives. La persistance des douleurs, la proximité des événements dans le temps, la continuité de la symptomatologie et le suivi médical constituent des éléments qui militent en faveur des RRA en décembre 1989 et janvier 1990. Le diagnostic d'entorse cervicale n'a jamais varié d'octobre 1989 à avril 1990: École Peter Hall inc. et Cvopa, 18949-60-9005, 95-06-06, M. Denis, révision rejetée, 96-03-29, M. Zigby.

Entorses lombaire et cervicale en octobre 1990. Compte tenu du peu de temps entre le retour au travail et la récidive et qu'il s'agit du même site de lésion, le diagnostic d'entorse lombaire avec mention de rechute posé par le médecin traitant ainsi que la prescription d'un arrêt de travail pour lombalgie constituent des éléments suffisants pour conclure que le travailleur a été victime d'une RRA en décembre 1990: Cossette et Communauté urbaine de Montréal, 41052-60-9207, 95-11-09, G. Robichaud.

Malgré que l’employeur soutienne, jurisprudence à l'appui, que l’on ne peut présenter une RRA d’une entorse lombaire consolidée sans atteinte permanente ni limitations fonctionnelles, les faits particuliers du présent dossier prouvent le contraire. En effet, la persistance des douleurs après le retour au travail, la présence d'ankyloses de la colonne lombaire au moment de la consolidation de la lésion professionnelle initiale, et l'aggravation des symptômes du travailleur avec le retour progressif au travail témoignent du fait que ce dernier n’avait pas, lors de la consolidation de sa lésion initiale, complètement récupéré de son entorse lombaire. Le rapport médical produit lors de l'arrêt de travail du 20 février 2003 reprend le diagnostic d'entorse lombaire. Ainsi, le travailleur a subi, à cette date, une RRA de son entorse lombaire initiale du 13 juin 2002: Métro Richelieu et Tercy, 196151-71-0212, 04-07-29, L. Couture.

Pour qu’il y ait relation entre la lésion initiale et la RRA, l’identité des diagnostics n’est pas nécessaire dans la mesure où il y a compatibilité entre ceux-ci, comme c’est le cas en l’espèce entre les diagnostics de contusion lombaire et d'entorse lombaire. De plus, on ne peut opposer une fin de non-recevoir à une réclamation de rechute en présence d’un diagnostic d’entorse pour le seul motif qu'il est de la nature d'une entorse de guérir complètement. En l’espèce, une preuve factuelle et médicale établit de manière convaincante une continuité entre la lésion initiale, sa symptomatologie, son évolution et sa reprise évolutive lors de la reprise du travail régulier avec détérioration graduelle sur un délai de deux mois, ce qui constitue un délai relativement court: Thibault et Société canadienne des postes, 246132-72-0410, 06-05-26, Anne Vaillancourt, (06LP-53).

Bien que l'entorse lombaire résultant de l'accident du travail ait été consolidée sans atteinte permanente ni limitations fonctionnelles, le 10 mai 2004, le travailleur accusait toujours une douleur à l'extension et à la flexion latérale gauche, en fin de mouvement. La recrudescence de la symptomatologie est survenue de façon graduelle dans les trois jours précédant la consultation du 31 mai 2004, jour où le travailleur a présenté un blocage au niveau lombaire. Des mouvements limités de la colonne lombaire ont été constatés le 16 juin 2004, soit une flexion latérale gauche limitée de 25% et l'extension de 50%, correspondant à une augmentation de la limitation des mouvements notés douloureux en fin d'amplitude, lors de la consolidation de la lésion initiale. Cette détérioration objectivée est survenue peu de temps après la consolidation de la lésion initiale, alors que le travailleur avait repris son travail régulier de manoeuvre spécialisé, impliquant des efforts pour manipuler des pièces d'acier. Le travailleur a connu non pas une continuité, mais une recrudescence de l'entorse lombaire initiale: Labonté et Acier Trimax inc., 253815-03B-0501, 06-06-19, G. Marquis.

Les symptômes, le diagnostic, soit une entorse lombaire, et le siège de la lésion sont identiques. Par ailleurs, il y a continuité évolutive. Un très court délai existe entre la consolidation de la lésion professionnelle initiale, le retour au travail et la recrudescence des malaises. Pendant cet intervalle, le travailleur a dû s'absenter à plusieurs reprises en raison de la lombalgie résiduelle persistante. Malgré l'absence de DAP ou de limitations fonctionnelles consécutifs à la lésion professionnelle initiale, il est probable que le travailleur ait connu une RRA: Mazda Chatel et Arseneault, 2011 QCCLP 1880.

Lésions non reconnues

Il est de la nature même d'une entorse de guérir, tout en laissant ou non des séquelles selon qu'elle ait été grave ou légère. En ce sens, c'est de façon impropre que l'on parle de récidive d'entorse ou d'entorse récidivante. Il serait sans doute plus juste de considérer que l'on peut garder certaines séquelles douloureuses d'une entorse lombaire ou qu'on peut subir, à l'occasion d'un nouveau traumatisme, une nouvelle entorse semblable à la première et localisée au même endroit, particulièrement si l'articulation affectée était déjà ou est devenue plus vulnérable lors de la lésion initiale: Néron et Les Chantiers de Chibougamau ltée, [1990] C.A.L.P. 721; Dandurand et Hôpital du Haut-Richelieu, 09609-62-8810, 91-02-04, C. Demers, (J3-01-04); Belleau-Chabot et Commission scolaire Chomedey de Laval, [1995] C.A.L.P. 1341; Trottier et Le Consortium BPLP, 150567-71-0011, 01-05-10, J.-C. Danis; Tremblay et Sylvestre Charbonneau Fafard, 190300-71-0209, 03-02-04, R. Langlois.

Une entorse lombaire consolidée sans séquelles permanentes peut difficilement conduire à la reconnaissance d'une lésion de la nature d'une RRA d'une lésion initiale, car il est de la nature d'une telle lésion de guérir complètement: Lagueux et A.R.T.B. inc., 100993-03B-9805, 98-07-07, D. Beaulieu, révision rejetée, 99-06-11, P. Brazeau.

Le travailleur n'a pas subi de RRA d'une entorse lombaire puisque notamment l'événement inititial, survenu de nombreuses années auparavant, est bénin et n'a pas entraîné de séquelles permanentes, et qu'il s'agit plutôt d'un nouvel événement personnel qui a causé une lésion analogue à la lésion initiale, mais sans aucun lien avec cette dernière: Brochu et Centre du camion Amos inc., 260773-08-0504, 06-01-13, J.-F. Clément, (05LP-240).