LoiLATMP
TitreII LA NOTION DE LÉSION PROFESSIONNELLE: ART. 2, 25 À 31
Section5. Récidive, rechute ou aggravation: art. 2, al. 14
5.02 Une relation entre la lésion initiale et la rechute, récidive ou aggravation alléguée
5.02.1 Les guides ou paramètres établis par la jurisprudence
5.02.1.11 La similitude des diagnostics
Titre du document5.02.1.11 La similitude des diagnostics
Mise à jour2011-11-01


NB : Voir la section 5.02.1.11.1 de ce titre sur la récidive d'entorse.

Généralités

Il n'est pas nécessaire qu'il y ait identité de site et de nature entre la lésion initiale et celle diagnostiquée à l'occasion de la RRA, l'essentiel étant que la première explique l'autre. Lésion reconnue: Brown et Commission de transport de la communauté régionale de l'Outaouais, 07894-07-8806, 90-11-16, G. Lavoie, (J2-21-35).

Il faut une preuve prépondérante que la RRA est reliée à l'événement d'origine et cette relation ne peut être présumée. Certains paramètres permettent de déterminer l'existence d'une telle relation, soit: 1- la gravité de la lésion initiale; 2- la continuité de la symptomatologie; 3- l'existence ou non d'un suivi médical; 4- le retour au travail, avec ou sans limitation fonctionnelle; 5- la présence ou l'absence d'une atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique; 6- la présence ou l'absence de conditions personnelles; 7- la compatibilité de la symptomatologie alléguée au moment de la RRA avec la nature de la lésion initiale; 8- le délai entre la RRA et la lésion initiale. Aucun de ces paramètres n'est à lui seul décisif mais, pris ensemble, ils peuvent permettre de décider du bien-fondé d'une réclamation. En l'espèce, les diagnostics sont différents et, bien que le site de la lésion soit le même, rien n'indique que le mouvement effectué par le travailleur lors de l'événement initial ait pu engendrer la lésion présentée lors de la récidive, rechute ou aggravation alléguée: Boisvert et Halco inc., [1995] C.A.L.P. 19.

L’absence d’identité des diagnostics concernés ne fait pas en soi obstacle à la reconnaissance d’une RRA. Il faut cependant une preuve prépondérante de l'existence d’un lien entre les deux conditions, à savoir que la première explique la seconde: Nadeau Lambert et Commission scolaire des Navigateurs, 167046-03B-0108, 03-04-25, G. Marquis.

Pour qu’il y ait relation entre la lésion initiale et la RRA, l’identité des diagnostics n’est pas nécessaire dans la mesure où il y a compatibilité entre ceux-ci, comme c’est le cas en l’espèce entre les diagnostics de contusion lombaire et d'entorse lombaire, avec de plus une continuité dans la symptomatologie ressentie: Thibault et Société canadienne des postes, 246132-72-0410, 06-05-26, Anne Vaillancourt, (06LP-53).

Bien que généralement on s’interroge sur la relation entre deux diagnostics pour déterminer s'il y a une RRA, certaines situations de faits amènent une preuve de relation par l'apparition d’une nouvelle lésion reliée à l’événement initial ou une lésion reliée aux conséquences de la lésion initiale. Une lésion peut évoluer, de nouveaux diagnostics peuvent s’ajouter et un même accident peut entraîner différentes lésions à différents sites. En l'espèce, la hernie discale L3-L4 avec radiculophatie L4 gauche est une RRA de la lésion professionnelle initiale, alors qu'une chute sur la glace a causé un étirement musculaire de la jambe gauche et une entorse à la cheville gauche: Otis et Maax Laval (Division Cuisine Expert), 269240-61-0508, 06-10-30, L. Nadeau, (06LP-181).

Lésions reconnues

Entorse musculaire du trapèze gauche en novembre 1985. Fibromyosite du rhomboïde de majeur de l'épaule gauche avant le retour au travail en avril 1986 et fibromyosite au niveau de l'épaule gauche en novembre 1986. Les douleurs musculaires au niveau de l'épaule et du trapèze provenant d'une fibromyosite sont les mêmes: Pedro et Construction Easy Pilon inc., [1990] C.A.L.P. 776.

Entorse lombaire en janvier 1987 avec lombo-sciatalgie gauche et hernie discale. Il y a atteinte permanente. En octobre 1990, le travailleur entreprend à nouveau des traitements de physiothérapie à la suite d'une augmentation sensible de la douleur lombaire et où il est diagnostiqué une discopathie lombaire. Il y a rechute puisque le site de la lésion est le même et qu'il y a continuité des douleurs exacerbées le 9 octobre 1990 et similitude des diagnostics: Nersesyan et Velan inc., 22142-62-9010, 92-07-21, S. Moreau, (J4-15-20).

Le travailleur subit une lésion initiale d'entorse cervicale en soulevant un bénéficiaire de 40 kg en octobre 1989. Les nombreux diagnostics émis par différents médecins entre octobre 1989 et avril 1990 n'ont jamais varié. Entorse cervicale représentant le même site de lésion. Persistance des douleurs, proximité des événements, suivi médical: École Peter Hall inc. et Cvopa, 18949-60-9005, 95-06-06, M. Denis, révision rejetée, 96-03-29, M. Zigby; entorses lombaires successives: Girard et C.S. Manicouagan, 74678-09-9511, 97-03-10, C. Bérubé, (J9-02-17).

Malgré le nouveau diagnostic de chondromalacie bilatérale, il s'agit du même site de lésion et de la même symptomatologie que la lésion initiale, une symtomatologie aux genoux à la suite d'une chute sur les genoux: Perreault et For-Net inc., 69818-62-9505, 96-09-03, J. L'Heureux, révision rejetée, 97-09-15, G. Robichaud.

Entorse au genou droit en juin 1999. En décembre 2000, la travailleuse dépose une réclamation pour une rechute en raison d'un diagnostic de subluxation de la rotule avec syndrome fémoro-patellaire. Le diagnostic retenu initialement était imprécis. Dès juillet 1999, le médecin demandait une résonance magnétique. Après sa consolidation, la lésion continuait de causer des douleurs. La CLP ne peut revenir sur le diagnostic de la lésion initiale puisque celui-ci n’a pas été contesté. Cependant, elle ne peut perpétuer une erreur indéfiniment. De plus, même si l’on ne peut revenir en arrière, on peut conclure que s’il y a eu entorse en juin 1999, celle-ci a rendu symptomatique la condition personnelle que présente la travailleuse. La continuité de la symptomatologie, les traitements que la travailleuse a dû recevoir et l'arhroscopie diagnostique faite en février 2000 permettent de conclure qu’il s’agit de la continuité de la lésion subie en juin 1999: Audy et Services d'aide Bruno Dandenault, 164786-05-0107, 01-11-27, L. Boudreault.

Malgré les différents diagnostics posés, la travailleuse présente l'évolution d'une même problématique à laquelle s'ajoute une certaine continuité avec réapparition relativement rapide des mêmes symptômes à la région carpo-métacarpienne du pouce droit. Les conditions personnelles d'arthrose et d'ostéoporose ne font pas obstacle à la reconnaissance de la RRA puisque ces conditions ont été rendues symptomatiques par le travail. La lésion alléguée d'arthrose du pouce droit rendue symptomatique par le travail est donc reliée à la lésion initiale, soit une tendinite du pouce droit: Nadeau Lambert et Commission scolaire des Navigateurs, 167046-03B-0108, 03-04-25, G. Marquis.

La lésion initiale de novembre 2004, une entorse de la cheville grade I et une tendinite du tendon achilléen auxquelles s'est ajouté un syndrome du muscle pyramidal, a continué après sa consolidation sans séquelles permanentes, en décembre 2004, de causer une condition au pied suffisamment douloureuse pour justifier un suivi médical et des traitements. Ce suivi médical démontre que des atteintes des tissus mous, constatées en 2005, alors que le BEM retenait des diagnostics de tendinopathies achilléennes et de tendinopathie du tibial postérieur, étaient en lien avec les sites anatomiques pour lesquels ces diagnostics ont été émis. Entre son retour au travail en avril 2005 et son nouvel arrêt de travail de mars 2006, la travailleuse travaillait en position debout 40 heures par semaine à se déplacer continuellement. Elle devait adopter la position debout sur le bout des pieds, laquelle met en tension les différentes structures du pied. La décompensation de l'affaissement de l'arche plantaire, causée par l'accident du travail, a modifié sa démarche et a créé de nouvelles tensions sur les tendons, expliquant l’apparition des conditions révélées par le BEM: Larouche et Services ménagers Roy, 303900-03B-0611, 07-12-11, M. Cusson.

En juin 1992, le travailleur a subi une lésion professionnelle, soit une hernie discale lombaire, une radiculopathie S1 droite, une lombosciatalgie, une entorse lombaire et une hernie discale L5-S1. En 1993, il a subi une discectomie L5-S1. Il prétend avoir subi une RRA en raison d'un traumatisme crânien survenu le 15 août 2005, à la suite d'une chute dans un escabeau causée par une vive douleur lombaire. À la suite de l'intervention chirurgicale rendue nécessaire par la lésion de juin 1992, le travailleur a conservé une atteinte permanente significative et des limitations fonctionnelles importantes. De 1993 à 2002, il a régulièrement consulté pour ses douleurs lombaires. Il s'est également plaint de douleurs lombaires persistantes lors de consultations médicales en 2003 et 2004. Ainsi, même si le diagnostic posé à la suite de l'événement du 15 août 2005 est différent de celui de la lésion initiale et que les sites anatomiques ne sont pas les mêmes, le travailleur a subi une RRA. En effet, la chute du travailleur a été occasionnée par les séquelles de sa lésion initiale. En levant les bras au-dessus des épaules pour saisir une branche sur le toit de son chalet, il a ressenti une vive douleur lombaire en barre qui a probablement entraîné le déséquilibre, d'où la chute au sol: Duguay et Entreprises Standbois inc., 316866-08-0705, 08-02-12, P. Prégent.

La lésion professionnelle de décembre 2003, une contusion au poignet, a été consolidée avec une atteinte permanente et des limitations fonctionnelles. En octobre 2005, la travailleuse a produit une réclamation pour une RRA de la lésion initiale à la suite d'une augmentation de la douleur. Elle était affectée, avant l'événement de 2003, d'une condition personnelle asymptomatique, soit un syndrome d'impaction cubitale, dont les symptômes sont apparus à la suite de l'accident du travail. La CSST n'a cependant jamais rendu une décision établissant que cette condition personnelle avait été aggravée. Cela n'empêche toutefois pas le présent tribunal de tenir compte de cette condition dans l'analyse de la survenance d'une RRA le 20 octobre 2005. Le diagnostic d'origine n'a pas été valablement contesté et ne peut être remis en question. Cependant, lorsqu'elle est saisie d'une réclamation pour une RRA, la CLP doit exercer pleinement sa compétence et apprécier l'ensemble de la preuve factuelle et médicale pour statuer sur la relation entre le diagnostic allégué pour la récidive et la lésion ou l'événement initial. En l'espèce, la condition de syndrome d'impaction cubitale était connue dès l'événement initial et il y a lieu d'en tenir compte. La travailleuse a subi, en octobre 2005, une aggravation de sa lésion d'origine et une détérioration de sa condition puisqu'elle a alors connu des pertes d'amplitudes articulaires au poignet: Lavallée et Centre hospitalier régional de Lanaudière, 287873-63-0604, 08-08-20, L. Morissette.

Dès mars 2006, le travailleur est atteint d’une maladie professionnelle, soit un syndrome du canal carpien bilatéral. Il continue d’effectuer son travail de chef cuisinier en attendant de subir une chirurgie, mais en novembre 2006, il doit cesser de travailler car la douleur est devenue intolérable. Le médecin maintient le diagnostic de syndrome du canal carpien. Le travailleur a donc connu en novembre 2006 la continuité de la même pathologie pour laquelle il était en attente de traitement et il a subi une RRA: Laliberté & Associés inc. et St-Louis, 298396-64-0609, 09-04-17, M. Montplaisir, (09LP-24).

Les diagnostics posés lors de la réclamation pour une RRA, soit une déchirure du ménisque externe et un syndrome fémoropatellaire, sont compatibles avec la lésion initiale. En effet, même si dans l'analyse d'une réclamation pour une RRA le tribunal est lié par le diagnostic de la lésion initiale retenue par le médecin qui a charge en l'absence d'une contestation médicale initiée en vertu des articles 203 et suivants, il arrive qu'il soit justifié, en équité, de ne pas perpétuer une erreur indéfiniment et d'admettre l'ajout d'un nouveau diagnostic, ultérieurement, en présence d'une démonstration claire de son existence préalable. Ainsi, en présence d'une preuve de l'existence d'une pathologie au site de lésion, antérieure à la RRA et non décelée en temps opportun, il y a lieu de reconnaître la relation entre ce diagnostic et la lésion initiale: Lavoie et Les transports Lacombe inc.,379034-63-0905, 09-11-09, I. Piché.

Lésions non reconnues

Malgré que le site des douleurs puisse être identique, la présence d'un diagnostic différent peut forcer la conclusion qu'aucune RRA n'existe. Diagnostic de kyste de Baker jumelé à une simple gonalgie: Larochelle et Atlantic Produits d'emballage ltée, 07639-05-8805, 91-03-13, A. Leydet, (J3-10-15), révision rejetée, 92-04-30, C. Demers.

La relation entre les diagnostics est essentielle: Minerais Lac ltée et Gagnon, [1992] C.A.L.P. 649.

Les diagnostics bien qu'identiques lors de la lésion initiale et de la rechute alléguée (anxiété situationnelle) n'ont cependant pas la même cause. Lors de la lésion initiale, il y eut agression alors que lors de la rechute alléguée, il est question de réaction aux conditions de travail. Il n'y a pas davantage d'accident du travail, les menaces ou le harcèlement ressentis par le travailleur ne relevant que de sa perception: Ruz et Protech Chimie ltée, 52454-60-9307, 94-08-31, S. Di Pasquale, (J6-19-11).

Il n'y a aucune relation entre une entorse lombaire en 1987 et une intervention chirurgicale pour une hernie discale à deux niveaux en avril 1990. Il est faux de prétendre que n'eût été de l'entorse lombaire, le travailleur n'aurait jamais subi de discoïdectomie. Le travailleur avait mal au dos depuis deux ou trois ans avant l'événement initial. Il n'y a pas similitude des diagnostics: Salaisons Brochu inc. (Les) et Grenier, 28997-03-9105, 95-07-18, M. Beaudoin.

Arthrose rendue symptomatique par la lésion initiale survenue le 17 décembre 1991. L'aggravation de l'arthrose survenue le 15 décembre 1992 constitue donc une RRA: Tamburri et Ville de Saint-Léonard, 43589-60-9208, 95-09-13, T. Giroux.

Le travailleur n'a pas subi de RRA et il n'a pas droit à l'IRR après la date de consolidation fixée par son médecin traitant relativement à ses lésions professionnelles. Après la découverte d'un myélome de type Bence-Jones, les traitements ont été exclusivement dispensés pour soigner ce cancer et ne sont d'aucune façon en relation avec les diagnostics de fractures vertébrales ou d'entorse dorsale retenus pour les lésions professionnelles: Guimond et Volcano Technologies inc., 177861-62-0202, 02-05-03, S. Mathieu, (02LP-43).

La travailleuse dépose une réclamation, en raison d'un diagnostic de «réactivation de lombalgie chronique secondaire à une augmentation de lordose lombaire qui crée un dérangement intervertébral mineur», lequel évolue vers celui de «syndrome facettaire post lordose structurale». Elle n'a pas établi de façon probante que les contraintes posturales, dans le cadre de son travail de policière, ont entraîné une RRA de la lésion professionnelle subie le 4 décembre 2000, diagnostiquée comme entorse dorsolombaire et «ligamentite» et consolidée sans atteinte permanente ni limitations fonctionnelles: Hervieux et Régie intermunicipale de police de Saint-Jérôme, 218468-64-0310, 06-11-02, M. Montplaisir, (06LP-180).

En mars 1987, la travailleuse a subi une discoïdectomie L5-S1 à la suite d'un accident personnel. En octobre 2000, elle a subi une lésion professionnelle dont le diagnostic est une lombosciatalgie droite. En 2009, il y a eu modification de l'état de santé de la travailleuse par rapport à celui qui existait lors de la consolidation de sa lésion professionnelle, en 2002. Toutefois, la preuve ne permet pas de relier cette modification à la lésion professionnelle de la travailleuse. Le diagnostic qui lie le tribunal (celui de lombosciatalgie droite) est le même que celui de la lésion initiale. Cependant, la preuve médicale prépondérante indique que la recrudescence des douleurs est plutôt la manifestation de la condition personnelle de la travailleuse. Selon le chirurgien-orthopédiste désigné par la CSST, il était inévitable que la travailleuse développe une douleur lombaire du fait de sa condition personnelle. Cette manifestation de sa condition personnelle, 18 ans après la discoïdectomie, respecte le pronostic émis par les deux experts. Même si son médecin estime que l'événement d'octobre 2000 n'a fait que précipiter la symptomatologie sur cette condition, on ne peut conclure que toute symptomatologie lombaire ultérieure soit reliée à la lésion professionnelle. Le médecin de la travailleuse a aussi mentionné qu'elle allait de toute façon développer une telle pathologie dans un intervalle de 10 à 20 ans à compter de la chirurgie: Bédard et Sogitex Cin Val-d'Or inc., 2011 QCCLP 6658.