LoiLATMP
TitreVI PROCÉDURE D'ÉVALUATION MÉDICALE: ART. 199 À 233 ET 448 ET SUIVANTS
Section1. Les éléments de l'article 212
1.4 L'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique: art. 84 et 212 (4) et Règlement sur le barème des dommages corporels
Titre du document1.4.3 L'atteinte permanente et les douleurs chroniques
Mise à jour2011-11-01


L'existence de douleurs peut être considérée comme une atteinte permanente

Des douleurs chroniques à la suite d'une fracture, lors de la marche ou de l'orthostation prolongée, sont des limitations fonctionnelles permanentes et doivent être considérées comme une atteinte permanente donnant ouverture à la réadaptation: Villeneuve et Donohue inc. (Produits forestiers Saucier ltée), [1992] C.A.L.P. 543.

«...En fait, l'existence d'une atteinte permanente peut être déduite de la reconnaissance par le médecin traitant de l'existence de limitations fonctionnelles permanentes, sur l'allégation de douleur par un individu qui serait clairement reliée aux séquelles de la lésion professionnelle»: Côté et C.S. Brooks Canada inc., [1993] C.A.L.P. 300.

La présence de douleurs devenues chroniques peut constituer une indication de restrictions fonctionnelles pour autant qu'elle puisse s'expliquer avec une plausibilité raisonnable. En l'espèce, la travailleuse, victime d'une contusion sévère au coccyx, souffre d'une atteinte au niveau de ses capacités: elle ne peut s'asseoir avec le dos droit plus de dix minutes, elle ne peut se coucher sur le dos et elle présente aussi des difficultés notables à la défécation. Le fait que les médecins au dossier n'aient pas encore trouvé d'explications au syndrome douloureux persistant et incapacitant ne peut avoir pour effet d'en nier l'existence. Par ailleurs, aucune autre cause possible n'a été soulevée. De plus, la travailleuse était asymptomatique avant l'accident et elle demeure symptomatique depuis. On doit donc conclure que la lésion professionnelle a entraîné une atteinte permanente: April et Optique Directe inc., 159709-61-0104, 02-03-28, L. Nadeau.

L'existence de douleurs chroniques peut être considérée dans certaines circonstances comme une atteinte permanente même si les examens objectifs sont tous normaux. C'est le cas en l'espèce. En effet, pour ce qui est des douleurs dorsolombaires, les plaintes de la travailleuse sont précises et constantes depuis l'accident qui n'était pas banal. Les traumatismes subis ont été sévères tant au niveau du rachis dorsolombaire que de l'articulation sacro-iliaque, nécessitant de longs mois de thérapies intensives, de médication anti-inflammatoire et d'opiacés. Dans un contexte où la travailleuse était totalement asymptomatique avant que ne survienne l'accident, il apparaît plus que probable que le syndrome de douleur chronique dont elle souffre est attribuable aux lésions qu'elle a subies lors de cet accident. En fonction des diagnostics d'entorse dorsolombaire et d'entorse sacro-iliaque, l'atteinte permanente est de 3,8%: Garzon et Nicholl Paskell-Mede inc., 256264-71-0503, 06-03-15, M. Zigby.

Comme a conclu la Cour suprême dans l’affaire Nouvelle-Écosse (Workers’ Compensation Board) c. Martin, on ne peut pas ne pas reconnaître «la souffrance et l’incapacité qui affligent les personnes souffrant de douleur chronique» en leur refusant «la possibilité [...] d’établir leur admissibilité à des avantages», car ce faisant on indiquerait «clairement que […] les personnes souffrant de douleur chronique n’ont pas la même valeur en tant que membres de la société canadienne», ce qui irait à l’encontre de la Charte. Ainsi, seule une analyse méticuleuse de la preuve permet, dans chaque cas, d’établir s’il y a autre chose derrière la douleur qu’une simple allégation et si cette autre chose peut être mise en relation avec la lésion professionnelle en cause: Canam et Proulx Chagnon, [2008] C.L.P. 1009.

L'existence de douleurs ne peut être considérée comme une atteinte permanente

Le travailleur prétend que sa lésion professionnelle initiale n'est pas consolidée, qu'il demeure incapable d'exercer son emploi en raison de crises de douleurs très fréquentes et que sa condition nécessite toujours des traitements. Des douleurs non confirmées par des signes cliniques objectivables et non reliées à une lésion médicalement identifiée ne sont pas indemnisables en vertu de la LATMP: Routhier et Ministère du Développement des ressources humaines, [1996] C.A.L.P. 123, révision rejetée, 64930-03-9412, 96-06-12, J.-M. Dubois; Longo et Ida Construction ltée, [1998] C.A.L.P. 73.

La symptomatologie douloureuse, pour être indemnisable, doit correspondre à des séquelles permanentes, c'est-à-dire à des signes cliniques mesurables: Yanniciello et C.L.S.C. Montréal-Nord, 93759-73-9801, 99-09-10, F. Juteau.

Une allégation de douleurs n'est pas suffisante pour justifier l'octroi d'une atteinte permanente et de séquelles fonctionnelles, lesquelles doivent s'établir à partir d'une preuve objective d'autant plus lorsque l'on retrouve de nombreuses discordances entre l'examen objectif et les éléments subjectifs: Lamoureux et Groupe Cegerco inc., 279414-02-0601, 07-01-19, N. Lacroix (décision accueillant la requête en révision).

La simple existence de douleurs sans signe objectif ou séquelle fonctionnelle ne peut être considérée comme permettant de reconnaître une atteinte permanente et des limitations fonctionnelles: Provigo (Division Montréal Détail) et Pelletier, [2007] C.L.P. 767.

Pour se voir accorder une atteinte permanente, la travailleuse doit démontrer, par une preuve médicale prépondérante, qu’elle présente de façon permanente des signes cliniques objectifs tels que des spasmes musculaires, des diminutions d’amplitudes articulaires ou encore des anomalies neurologiques. De simples allégations de douleurs sont considérées comme des signes subjectifs et sont insuffisantes: Gareau et Coopérative de solidarité d'aide domestique Marteau et Plumeau,[2009] C.L.P. 434.