LoiLATMP
TitreIII LA RÉPARATION: ART. 44 À 144, 187, 363, 364, 366 ET 430 À 437, 555, al. 2, 556
Section1. L'IRR: art. 44 à 82, 555, al. 2, 556
1.3 Calcul de l'IRR: art. 63 à 76, 555, al. 2, 556
1.3.08 Travailleur occupant plus d'un emploi: art. 71, 67 ou 75
Titre du document1.3.08 Travailleur occupant plus d'un emploi: art. 71, 67 ou 75
Mise à jour2011-11-01


Application de l'article 71

L'article 71 ne vise pas que des emplois à temps partiel: Halley et Garderie la Sagamie inc., [1987] C.A.L.P. 21; Parent et Ambulances Trudeau, 31035-63-9107, 94-02-04, A. Suicco (J6-07-11).

Le caractère rémunérateur de l'emploi doit être apprécié en fonction de la régularité du travail, du nombre d'heures pour lequel le travail est requis ainsi que de la rémunération globale. La désignation de l'emploi le plus rémunérateur ne peut reposer seulement sur le taux horaire: CSST et Jackson, [1992] C.A.L.P. 1119.

Lorsqu'un travailleur occupe au moins un emploi à temps plein, l'article 71 doit être appliqué: Hôpital Grace Dart et Ross, [1997] C.A.L.P. 825.

La règle particulière énoncée à l'article 71 doit avoir préséance sur la règle générale que l'on retrouve à l'article 67. Il s'agit là d'un principe d'interprétation bien reconnu qu'il n'y a pas lieu de mettre de côté: Institut Philippe Pinel de Montréal et Phaneuf, 83344-63-9610, 97-09-18, Y. Tardif; Robin et Hôpital Marie-Enfant, 87973-64-9704, 99-03-12, N. Lacroix, révision rejetée, 99-10-13, J.-L. Rivard; R. Lacasse et Fils et Dupuis, 145685-05-0008, 01-02-15, L. Boudreault, (00LP-153).

Les termes «comme s'il exerçait cet emploi à temps plein» ne visent pas seulement les emplois exercés à temps partiel, mais ils visent à permettre au travailleur dont l'emploi le plus rémunérateur est exercé à temps partiel de faire établir le calcul de son revenu brut sur la base de la rémunération qu'il en retire comme s'il l'exerçait à temps plein: Guimond et Institut Philippe Pinel de Montréal, 77733-63-9603, 97-11-20, L. Turcotte.

La règle prévue à l'article 71 s'applique, qu'il s'agisse de deux emplois à temps partiel ou d'un emploi à temps plein et d'un emploi à temps partiel ou sur appel: Lehoux et Frank W. Horner inc., [1998] C.L.P. 1342, révision rejetée, 103362-73-9807, 99-11-01, P. Perron, requête en révision judiciaire rejetée, C.S. Montréal, 500-05-054946-999, 00-04-07, j. De Grandpré, appel rejeté, [2002] C.L.P. 975 (C.A.), requête pour autorisation de pourvoi à la Cour suprême rejetée, 03-09-11, (29668); Pinard et Distribution alimentaire R.T. ltée, 100455-01-9804, 99-05-06, M. Beaudoin; Leblanc et Résidence La belle époque, 120254-31-9907, 00-01-28, J.-L. Rivard; Larocque et Municipalité de McMasterville, 116162-62B-9905, 00-04-14, N. Blanchard.

Lorsque l'article 71 s'applique, il ne peut y avoir cumul des revenus. De plus, la détermination de l'emploi le plus rémunérateur ne se fait pas en annualisant les deux revenus d'emploi. L'annualisation ne se fait qu'après avoir déterminé quel est l'emploi le plus rémunérateur: Robillard et Centre hospitalier de Granby, 112192-62B-9903, 99-11-23, Alain Vaillancourt.

L'article 67 s'applique au cas du travailleur lié par un contrat de travail. Par opposition, l'article 71 prévoit la situation d'un travailleur qui occupe plus d'un emploi, que ce soit à temps plein ou à temps partiel. Puisque ces deux articles ne peuvent se contredire, il faut conclure que l'article 67 s'applique au cas du travailleur qui n'occupe qu'un seul emploi régi par un contrat de travail. Il n'y a pas lieu de choisir entre les deux articles. De plus, l'application de l'article 71 nécessite d'abord d'identifier l'emploi le plus rémunérateur et ensuite d'extrapoler le revenu brut de cet emploi, comme s'il était exercé à temps plein. Cette extrapolation se fait en tenant compte de la semaine de travail prévue à la convention collective: Laplante et Centre hospitalier Robert Giffard, [2001] C.L.P. 40, révision accueillie en partie, 142060-32-0006, 02-05-29, M. Carignan, (02LP-48).

L'article 71 s'applique lorsque la travailleuse occupe deux emplois différents (préposée aux bénéficiaires à temps partiel et commis-intermédiaire à temps plein), mais dont le taux horaire est identique. L'emploi de commis-intermédiaire s'avère le plus rémunérateur puisqu'il est à temps plein, et c'est sur la base du revenu de cet emploi que l'IRR doit être calculée. Il n'y a pas lieu d'appliquer l'article 75: Jobidon et Centre hospitalier Robert Giffard, 163476-32-0106, 02-08-21, C. Lessard.

La travailleuse occupe deux emplois au moment de son retrait préventif: elle travaille comme débroussailleuse, un emploi saisonnier qui débute à la fin de mai ou au début de juin pour se terminer à la fin d'octobre ou au début de novembre. Elle effectue entre 50 et 60 heures par semaine. L'autre emploi est un emploi à temps partiel mais à longueur d'année, environ une journée par semaine. Le calcul de son IRR a été fait sur la base du revenu brut de son emploi le plus rémunérateur conformément à l'article 71. À compter de la date où la travailleuse a été mise à pied de son emploi le plus rémunérateur, le calcul de l'IRR devait cependant s'effectuer sur la base du salaire minimum puisque le deuxième emploi ne s'exerçait avant le retrait préventif qu'à raison d'une journée par semaine: Hétu et Aménagement forestier LF, [2003] C.L.P. 1277.

La base de salaire devant servir au calcul de l'IRR pour la travailleuse qui exerce un emploi à temps plein sur appel au moment de la lésion professionnelle, mais ayant exercé trois emplois de même nature sur appel durant les douze mois précédant celle-ci, doit être établie en fonction de l'emploi le plus rémunérateur, conformément à l'article 71, soit l'emploi à temps plein. La notion d'emploi rémunérateur doit s'apprécier selon certains facteurs tels la régularité du travail, le nombre d'heures travaillées et la rémunération globale: Pavillon Auclair et Oscar, 196153-72-0212, 03-06-13, Anne Vaillancourt, (03LP-93).

C'est l'article 71 qui doit s'appliquer, puisque la travailleuse exerce deux emplois à temps partiel sur appel. On doit prendre le revenu le plus rémunérateur et établir celui-ci comme si la travailleuse exerçait cet emploi à plein temps. Il ne faut pas oublier que la travailleuse avait la possibilité d'augmenter ses gains en travaillant ailleurs et que c'est à cause de sa lésion professionnelle qu'elle n'a pu poursuivre son travail chez l'autre employeur et augmenter ses revenus. Il peut apparaître en l'espèce désavantageux de retenir un revenu qui semble s'écarter de la réalité vécue par la travailleuse quant au revenu déterminé. Toutefois, on se retrouve dans une situation où l'article 71 s'applique et, comme le prévoit la loi, on doit déterminer le revenu brut de la travailleuse, comme si cet emploi était exercé à plein temps: Enfin, l'article 67 ne peut recevoir application puisque l'article 71 couvre la situation: C.H.V.O. Pavillon de Hull et Massé, 235209-07-0405, 06-07-31, N. Lacroix, révision rejetée, 07-02-15, A. Suicco.

Bien que la travailleuse exerce un autre emploi, le calcul de son IRR doit être fait sur la base du revenu brut annuel assurable de 15 851$ qui équivaut au salaire minimum en vigueur au moment de la manifestation de sa lésion professionnelle chez l'employeur puisque son revenu annuel brut chez ce dernier n'est que de 5148$. Les dispositions de l'article 71 ne peuvent s’appliquer car les revenus que la travailleuse tire de ses activités de cours de peinture sont assimilables à des revenus d'entreprise puisqu'elle agit alors à titre de travailleuse autonome et qu'elle n'est pas inscrite à la CSST: Restaurant MLM et Charette, 300609-64-0609, 07-09-18, M. Montplaisir, (07LP-131).

La CSST a appliqué l'article 71 étant donné que la travailleuse occupe deux emplois. Il ressort clairement du second alinéa de cet article que si un travailleur occupe deux emplois, mais devient incapable d'exercer un seul de ces emplois, son IRR doit être déterminée sur la base du revenu brut qu'il tire de cet emploi et que, dans ce cas, l'article 65 relatif au revenu minimum d'emploi ne s'applique pas. La travailleuse occupait deux emplois au moment de déposer un certificat de retrait préventif et elle n'est devenue incapable d'exercer qu'un seul de ces emplois. Elle veut que le tribunal détermine qu'elle n'occupait pas deux emplois étant donné le minime revenu que lui procurait son autre emploi à la commission scolaire. Cependant, l'article 71 est clair et la loi ne crée pas d'exception pour les cas où le revenu gagné dans le cadre du deuxième emploi est minime. La travailleuse était bien informée du fait qu'elle pouvait déposer un certificat de retrait préventif pour son deuxième emploi, mais elle a choisi de ne pas le faire. Par ailleurs, le salaire annuel brut de la travailleuse au restaurant est de 9 022$. Rien ne permet de conclure que ce revenu n'a pas de corrélation avec la réalité de la travailleuse qui est étudiante et travaille comme serveuse les fins de semaine et de façon occasionnelle et sur appel à la commission scolaire comme surveillante d'élèves. Par conséquent, l'IRR de la travailleuse doit être établie sur la base du revenu brut annuel de 9 022$, l'article 65 ne s'appliquant pas en ce qui concerne le revenu minimum d'emploi: Mailhot et Commission scolaire des Bois-Francs,384597-04B-0907, 10-02-26, Monique Lamarre.

Comme la travailleuse occupe deux emplois, le premier juge administratif a commis une erreur de droit manifeste et déterminante sur l'issue du litige en omettant d'appliquer l'article 71. En appliquant l'article 68, qui vise le travailleur saisonnier ou sur appel, le premier juge a fait une erreur puisque, même si les emplois que la travailleuse occupait sont «sur appel», cet article ne vise pas le travailleur qui occupe plus d'un emploi: Centre Miriam et Lemire,2011 QCCLP 5244 (décision accueillant la requête en révision) (décision retenue pour publication au C.L.P.).

Application de l'article 67

L'article 71 s'applique à des emplois dont la rémunération horaire est différente, et l'article 67 doit recevoir application lorsque les emplois sont de même nature, avec la même rémunération horaire. L'article 71 ne trouve pas application en fonction du nombre d'heures travaillées: Centre hospitalier Ste-Jeanne-d'Arc et Goulet, [1997] C.A.L.P. 159; Bouchard et C.H.S.L.D. N.-D. Lourdes & St-Charles, [1998] C.L.P. 551(décision accueillant la requête en révision).

Le premier alinéa de l'article 71 s'applique à un travailleur qui occupe deux emplois à temps partiel. L'application de cet article dans un cas où un travailleur occupe un emploi à temps plein et un deuxième emploi à temps plein ou à temps partiel est inéquitable et va à l'encontre des dispositions et objectifs de la loi. Dans ce cas, l'application de l'article 67 serait plus favorable et plus équitable pour la travailleuse et son revenu devrait être calculé à la façon prévue à cet article: Guirgis et Brett's Discount ltée, [2000] C.L.P. 851, révision rejetée, 100529-71-9804, 04-03-01, N. Lacroix, requête en révision judiciaire rejetée, C.S. Montréal, 500-17-020408-046, 05-10-19, j. Roy, appel rejeté, C.A. Montréal, 500-09-016163-057, 06-02-20, jj. Gendreau, Rousseau-Houle, Chamberland.

Dans le cas d'une travailleuse qui occupe un emploi à temps plein de préposée au service de garde chez un employeur ainsi qu'un emploi à temps partiel d'éducatrice chez un autre employeur, l'application de l'article 71 causerait une injustice en la privant d'une évaluation de son revenu qui soit conforme à la réalité. En effet, il faut interpréter la loi de façon à réparer les conséquences d'un arrêt de travail effectué en application de la loi. Il faut plutôt revenir à la règle générale prévue à l'article 67: Boyer et Commission scolaire des Affluents, 140679-63-0006, 01-02-01, D. Besse.

Dans le cas d'une travailleuse qui occupe deux fonctions différentes chez le même employeur, l'article 71 ne peut recevoir application. En effet, elle n'a qu'un seul emploi, un seul contrat de travail et un seul employeur. L'article 67 doit donc être appliqué: Hôpital Sainte-Justine et Fournier, 131276-62-0002, 01-06-15, R. Beaudoin.

Il y a lieu d'appliquer l'article 67 aux fins du calcul de l'IRR du travailleur et d'additionner les revenus provenant de ses deux contrats de travail à plein temps pour le même type d'emploi de journalier mais pour des employeurs différents, soit un revenu brut de 48 800$. Il serait inéquitable de ne retenir que le revenu brut d'un de ses emplois car on ne peut prétendre réparer les conséquences d'une lésion professionnelle en disant au travailleur que son IRR tiendra compte uniquement d'une portion de son revenu brut annuel, au motif qu'il n'effectue pas toutes ses heures chez le même employeur. L'article 71 n'est pas applicable puisqu'il réfère à des travailleurs exerçant à temps partiel des fonctions différentes pour des employeurs différents. L'article 75 ne peut s'appliquer non plus car le fait d'exercer à temps plein deux emplois différents ne signifie pas qu'il s'agit d'un travail dont la nature est particulière: Parent et Sous-traitant indépendant inc., [2003] C.L.P. 1198.

La travailleuse exerce deux emplois à temps partiel pour deux employeurs différents. De ce fait, sa situation est couverte par la dernière phrase du premier paragraphe de l'article 67 qui traite du revenu tiré du même genre d'emploi pour des employeurs différents. Lorsque la situation d'un travailleur est conforme à cet article, il n'y a pas lieu de recourir aux dispositions de la loi, notamment l'article 71, qui se veulent supplétives. Le revenu brut de la travailleuse doit être calculé en cumulant les revenus des deux emplois occupés: Guévin et Commission scolaire des Chênes,248489-04B-0411, 05-12-29, L. Collin.

Le travailleur, qui effectuait plus de 49 heures de travail par semaine, n'occupait pas 2 emplois à temps partiel assimilables à du temps plein, mais bien un emploi à temps plein et un emploi à temps partiel, et ce, depuis au moins 9 ans au moment de sa lésion professionnelle. Il est possible de déterminer son revenu brut en évaluant le revenu qu'il tire de son contrat de travail selon l'article 67, ou encore le revenu brut provenant de plus d'un emploi selon l'article 71. Cependant, on peut s'écarter de ces dispositions si cela est plus équitable en raison de la nature particulière du travail du travailleur, dans la mesure où le résultat obtenu est supérieur à celui qu'on obtiendrait en appliquant les dispositions de la loi. L'objectif est de compenser la perte du travailleur selon sa situation réelle. En l'espèce, appliquer l'article 71 ne reflète pas fidèlement la perte encourue et conduit à une injustice puisque cette disposition vise le cas d'un travailleur qui n'est pas à temps plein ou qui occupe deux postes à temps partiel. Le fait d'appliquer les dispositions de l'article 71 dans le cas du travailleur n'est pas équitable ou réconciliable avec l'objectif de réparation de la loi. Il y a lieu plutôt de compenser le travailleur selon ses deux revenus d'emploi en vertu des dispositions de l'article 67: Simon et CSSS Dorval-Lachine-Lasalle, 389384-71-0909, 10-04-08, F. Charbonneau.

Application de l'article 75

La travailleuse occupe deux emplois similaires, l'un à temps plein et l'autre à temps partiel. Elle occupe des emplois également rémunérateurs et l'article 71 ne peut donc être appliqué. La travailleuse qui fournit une prestation de travail de plus de 50 heures par semaine se trouve dans une situation particulière qui permet l'application de l'article 75: Bernier et Centre hospitalier Jeffery Hale, [1997] C.A.L.P. 1435; Provost et C.L.S.C. Hochelaga-Maisonneuve, 123570-71-9909, 00-03-21, J.-C. Danis.

L'article 71 ne s'applique pas dans le cas d'un travailleur qui n'occupe pas plus d'un emploi à temps partiel mais deux emplois à temps plein. Dans ce cas, ce sont les dispositions de l'article 75 qui doivent recevoir application: Charest et Dépanneur National enr., 78711-60-9604, 97-06-09, M. Billard.

Comme le travailleur occupe de façon habituelle deux types d'emploi et compte tenu de la nature particulière du travail saisonnier d'aide-pêcheur, l'article 75 reçoit application. Le revenu brut est établi à partir d'une pondération des revenus du travailleur comme journalier et comme aide-pêcheur au cours des années antérieures: Grenier et Pêcheries Gérald Allain, 109395-01B-9901, 99-05-07, C. Bérubé.

Une fois le revenu brut de l'emploi le plus rémunérateur fixé, il y a lieu de se demander si, en regard de l'ensemble des dispositions de la loi, le revenu brut de la travailleuse peut être déterminé d'une autre manière qui serait plus équitable selon le cas: Hébert et Dépanneur FG, 131715-04-0002, 00-09-20, J.-C. Danis.

Il y a lieu d'appliquer l'article 75 dans le cas d'une travailleuse qui occupe des emplois chez deux employeurs différents puisque l'application de l'article 71 ne refléterait pas la réalité de son revenu ni son statut d'emploi, lesquels correspondent à la notion de nature particulière. De plus, l'application de l'article 75 est conforme à l'intention du législateur: Desgranges et Centre de réadaptation Gabrielle Major, [2001] C.L.P. 56; Duguay et Services Kelly Québec inc., 152638-62-0012, 02-02-21, É. Ouellet.

La situation d'un travailleur occupant plus d'un emploi est particulière dans la mesure où les emplois occupés totalisent plus d'une semaine normale de travail. L'article 75 doit recevoir application puisqu'il permet un calcul du revenu différent de ce qui est prévu aux articles 67 et 71, si cela est plus équitable en raison de la nature particulière du travail: Si Hao Ngo et Pavillon Notre-Dame, 134449-72-0003, 01-03-08, M. Bélanger; Lenden et Centre jeunesse de Laval, [2001] C.L.P. 8; Fradet et Commission scolaire des Découvreurs, 150229-31-0011, 02-02-05, H. Thériault; Coulombe et Héma-Québec, 166812-31-0108, 02-02-20, R. Ouellet.

Le travailleur exerce un emploi de comptable à temps plein qui lui procure un revenu annuel de 32 200$, ainsi qu'un emploi de serveur à temps partiel dans un autre établissement au salaire de 10 500$ par année. Le travailleur ayant pu continuer à exercer son travail de comptable, le problème du calcul du revenu ne s'est posé que lors du calcul du revenu de l'emploi convenable. Il faut appliquer l'article 75 et calculer l'IRR réduite à partir du cumul des revenus des deux emplois réguliers puisqu'il s'agit de la solution la plus équitable qui permet de satisfaire à l'objet de la loi et de réparer les conséquences de la lésion professionnelle: Couturier et Distribution Aspirama inc., 162704-62-0106, 02-01-23, H. Marchand.

Il y a lieu d'appliquer l'article 75 à la situation d'une travailleuse qui occupe deux emplois de préposée aux bénéficiaires, dans deux centres hospitaliers différents. La travailleuse n'occupe pas deux emplois comme le prévoit l'article 71, mais bien un seul emploi de préposée aux bénéficiaires pour deux employeurs différents. Elle a droit à une IRR réduite pour combler la différence entre le montant de son IRR calculée sur la base du total de ses revenus au moment de la lésion, revalorisé, et le salaire de l'emploi occupé lors de la révision de son IRR réduite: Laflamme et Les CHSLD de Mon Quartier, 168474-71-0109, 02-05-07, M. Cuddihy.

Le calcul de l'IRR du travailleur doit tenir compte du revenu brut annuel de ses deux emplois, soit celui de mécanicien à raison de 30 heures par semaine et celui de chauffeur d'autobus scolaire à raison de 27 heures par semaine pour un revenu de 46 200$. Afin de respecter l'objet de la LATMP, édicté à son article 1, il y a lieu d'appliquer l'article 75 en raison de la nature particulière de ce deuxième emploi que le travailleur ne peut effectuer plus de 27 heures par semaine et qu'il ne peut exercer au cours de l'été. L'article 71 ne peut trouver application parce qu'il réfère à des travailleurs exerçant à temps partiel des fonctions différentes pour des employeurs différents: Filteau et Garage J.A. Filteau et fils inc., [2003] C.L.P. 1153

Lorsque des situations où l'application des articles 67 ou 71 mène à l'iniquité pour le travailleur, l'article 75 doit primer puisqu'il respecte et s'intègre à l'objet de la loi et à ce qui est exprimé à l'article 351. Le revenu brut annuel qui doit servir au calcul de l'IRR du travailleur se compose donc de son salaire de mécanicien et de celui de pompier, tout en tenant compte du maximum annuel assurable de 52 500$: Laflèche et Multi-pression LC inc., 190019-62-0208, 03-03-25, É. Ouellet, (02LP-196).

La travailleuse occupait deux emplois, l'un à plein temps, l'autre à temps partiel. Survient une grossesse lui permettant d'obtenir un retrait préventif, chez chacun de ses employeurs. Le premier alinéa de l'article 71 semble s'appliquer uniquement à des emplois à temps partiel. Lorsqu'il s'agit de deux emplois à temps plein ou d'un emploi à temps partiel et d'un emploi à temps plein, on se retrouve dans une situation bien différente où cet article sanctionnerait une perte d'indemnisation en réduisant de façon artificielle les revenus bruts à considérer pour établir l'IRR. Cependant, il n'est pas opportun d'appliquer les dispositions de l'alinéa 1 de l'article 71 à de telles situations eu égard aux principes d'interprétation et aux objectifs recherchés par le législateur. Il convient dès lors de tenir compte des principes dégagés par l'article 75 afin de permettre à la travailleuse de recevoir une indemnité qui est plus équitable en raison de la nature particulière des emplois qu'elle occupe. En conséquence, l'IRR payable à la travailleuse doit se fonder sur le total des revenus bruts qu'elle percevait chez ses employeurs: Rusk et Bar St-Josef, 189692-31-0208, 03-04-02, P. Simard.

La travailleuse occupe deux emplois, dont un emploi de fin de semaine, et elle travaille plus de 60 heures par semaine, en plus de faire des heures supplémentaires. Le calcul de son IRR ne peut se faire selon l'article 71 puisqu'il ne refléterait pas la réalité du revenu de la travailleuse dont la situation est particulière. Il y a lieu d'appliquer les articles 75 et 351: Santos et Mainetti Canada inc., 212707-71-0307, 04-03-16, J.-C. Danis.

Le travailleur occupe un emploi de mécanicien industriel à temps plein chez l'employeur à raison de 47 heures par semaine, et un emploi permanent à temps partiel d'aide camionneur chez un second employeur à raison d'une journée par semaine. Il subit une lésion professionnelle le rendant incapable d'occuper ses deux emplois. En l'espèce, pour déterminer le revenu brut annuel servant à calculer l'IRR, il est plus équitable de prendre en considération la situation réelle du travailleur et de tenir compte du revenu annuel brut que le travailleur tirait de son emploi chez le tiers employeur et de l'ajouter à celui qu'il recevait de l'employeur chez qui il a subi sa lésion professionnelle: Champagne et Services d'équipement Tour de force inc., 205850-63-0304, 04-03-29, D. Besse.

La travailleuse est ambulancière à temps plein pour un premier employeur et elle occupe également deux autres postes à temps partiel, l'un comme ambulancière pour un deuxième employeur et l'autre comme infirmière pour un troisième employeur. Elle est admissible au retrait préventif de la travailleuse enceinte. Aux fins de calculer l'IRR à laquelle la travailleuse a droit, il y a lieu d'appliquer l'article 75 et d'additionner les revenus provenant des trois emplois occupés par la travailleuse, compte tenu de sa situation particulière qui lui fait cumuler trois emplois afin de gagner un revenu décent: Rousseau et Foyer de Lyster, 200520-04B-0302, 04-03-30, L. Collin.

Le travailleur occupe un emploi de facteur à temps plein et un emploi de pompier à temps partiel. Il a subi une lésion professionnelle le rendant incapable d'exercer ces deux emplois. On ne peut appliquer l'article 67 pour calculer l'IRR à laquelle il a droit puisqu'il ne s'agit pas de deux emplois du même genre. L'article 71 ne peut s'appliquer puisqu'il faut comprendre que l'emploi le plus rémunérateur visé à cet article est un emploi à temps partiel. La CSST a retenu l'emploi de facteur à titre d'emploi le plus rémunérateur puisque le travailleur l'occupe à temps plein. Le travailleur est donc désavantagé par rapport à un travailleur qui n'effectue que du travail à temps partiel puisqu'il ne reçoit pas une indemnité calculée sur ses revenus réels qui ont dépassé celui de l'emploi à temps plein. Même en retenant l'emploi de pompier à titre d'emploi le plus rémunérateur au sens de l'article 71, le travailleur se retrouve également dans une situation injuste puisqu'il a tiré des revenus plus élevés pendant la période de douze mois précédant le début de son incapacité. L'application de la règle générale prévue à l'article 67 de même que les règles particulières prévues aux articles 68 à 71 inclusivement permettent à un travailleur de démontrer qu'il a tiré un revenu plus élevé durant cette période et, lorsque cette preuve est établie, la CSST doit alors fonder le calcul de l'indemnité sur ce revenu réel. En l'espèce, le travailleur a effectué plus d'heures de travail durant l'année précédant le début de son incapacité que les quarante heures par semaine retenues par la CSST, en application de la fiction crée par le législateur à l'article 71. Pour éliminer cette injustice, il y a lieu d'appliquer l'article 75 qui a pour but d'éviter au travailleur de se retrouver dans une situation inéquitable compte tenu de sa situation particulière, sous réserve des dispositions de l'article 65 concernant le revenu maximum annuel assurable: Plouffe et Ville de Mascouche, 201260-63-0303, 04-04-22, F. Dion-Drapeau.

Le fait d’occuper un emploi à temps plein et un autre à temps partiel constitue une situation particulière qui permet d’utiliser les dispositions de l’article 75. Ainsi, la solution appropriée au cas du travailleur qui, depuis cinq ans, occupe un emploi à temps plein à raison de 39 heures et demie par semaine et un deuxième emploi à temps partiel à raison de 15 heures par semaine est de calculer son revenu en tenant compte du salaire des deux emplois, ce qui permet de compenser adéquatement sa perte de capacité de gain: Beaulieu et Audet Soudure (1989) inc., [2005] C.L.P. 410.

Le travailleur, un livreur, occupait un second emploi à temps plein comme répartiteur au département des pièces chez un autre employeur. Sa lésion professionnelle l'a empêché d'occuper les deux emplois. L'application stricte des dispositions de l'article 71 est inéquitable pour le travailleur en raison de la nature particulière du travail qu'il exécute au moment de sa lésion professionnelle. En effet, à ce moment, le travailleur fournissait une prestation de travail régulière auprès de deux employeurs distincts. Sa réalité professionnelle quotidienne était celle d'un travail de nature particulière et il ne serait pas conforme à la lettre et à l'esprit de l'article 1 d'imposer au travailleur, à titre de réparation des conséquences qu'entraîne la lésion professionnelle pour lui, une indemnisation basée sur un revenu moindre que celui qu'il gagnait réellement lors de son accident du travail: Chaloux et Rôtisseries St-Hubert, 256058-72-0502, 05-07-27, P. Perron.

S'il fallait appliquer le premier paragraphe de l'article 71 sans tenir compte des autres articles, le travailleur serait pénalisé puisque son revenu global dépassait le 43 683$ tiré du seul emploi de mécanicien alors qu'il en exerçait un second à temps partiel qui lui rapportait 6 638$. Comme la philosophie de la loi veut que l'IRR compense la perte de capacité de gains, il est évident que l'IRR doit tenir compte des deux emplois générateurs de gains pour le travailleur. D'ailleurs, l'article 75 prévoit une autre manière d'indemniser que celle prévue notamment à cet article 71. Il y a donc lieu de reconnaître que l'IRR doit être calculée en fonction du revenu brut prévu au contrat de travail de mécanicien et de pompier, revenus qui une fois annualisés totalisent 50 321,40$: Forget et Fiducie de location entretien R&R, 263043-62C-0505, 05-11-01, M. Sauvé.

La travailleuse occupait un poste de préposée aux élèves handicapés à temps plein dans une école et un autre emploi à temps partiel, sur appel, pour un institut de gériatrie. Le 6 octobre 2005, la CSST l'a acceptée dans le programme «Pour une maternité sans danger». En l'espèce, la situation particulière de la travailleuse permet d'appliquer l'article 75, puisqu'elle occupe un emploi à temps plein et un autre à temps partiel et que cette interprétation tient compte de l'article 1 qui a pour objet la réparation des lésions professionnelles et des conséquences qu'elles entraînent pour les bénéficiaires. Il serait inéquitable pour la travailleuse de ne considérer que son revenu d'emploi à temps plein au moment du retrait préventif étant donné, au surplus, qu'elle cumulait ces deux emplois depuis 2001. Le revenu brut annuel devant être retenu aux fins du calcul de l'IRR doit donc correspondre au cumul du revenu des deux emplois: Hyppolite et Commission scolaire de Montréal, 279496-72-0601, 06-03-27, H. Rivard.

La travailleuse occupe un emploi à temps plein de couturière et un second à temps partiel de cuisinière. Les 20 et 23 septembre 2005, elle a bénéficié d'un retrait préventif et d'une affectation de la travailleuse enceinte ou qui allaite pour chacun de ces emplois. La CSST a retenu le revenu brut annuel retiré de l'emploi à temps plein aux fins du calcul de l'IRR. L'article 71 vise plus spécifiquement les situations où un travailleur occupe plus d'un emploi alors qu'aucun de ces emplois n'est à temps complet. Comme la travailleuse occupe un emploi à temps plein et un emploi à temps partiel, il serait inéquitable de lui appliquer les dispositions de cet article et il y a lieu de la faire bénéficier des dispositions de l'article 75 en raison de la nature particulière du travail qu'elle occupe. Il y a donc lieu de comptabiliser le revenu total, soit les deux revenus bruts annuels gagnés par la travailleuse avant sa réclamation à la CSST aux fins d'établir son revenu brut annuel, lequel n'excède pas le maximum annuel assurable en vigueur au moment où la travailleuse a produit sa réclamation conformément à l'article 65. Décider autrement viendrait à l'encontre de l'article 351 qui prescrit que les décisions de la CSST doivent être rendues suivant l'équité, le mérite réel et la justice du cas: Fortin et Les Vêtements Chambly (1982) inc., 279944-62A-0601, 06-03-31, D. Rivard

La travailleuse, une éducatrice dans un Centre de la petite enfance et une préposée aux bénéficiaires à temps partiel, a été admise au programme Pour une maternité sans danger. C'est l'article 75 qui doit recevoir application en l'espèce. Cet article permet une autre méthode de calcul lorsque celle déterminée aux articles 67 à 74 entraîne une iniquité en raison de la nature particulière du travail. La situation de la travailleuse doit être considérée en tenant compte de l'objectif de la loi décrit à son article 1, à savoir la réparation des lésions professionnelles et des conséquences qu'elles entraînent pour les bénéficiaires. D'abord, si le principe général établi à l'article 67 devait s'appliquer, le revenu brut de la travailleuse s'établirait à 30 480$. En effet, cet article prévoit qu'on peut établir un revenu brut plus élevé si le deuxième emploi exercé est un emploi du même genre. Or, on ne peut conclure que la travailleuse occupait deux emplois du même genre. De son côté, l'article 71 prévoit expressément le cas d'un travailleur qui occupe plus d'un emploi. En revanche, cet article ne peut recevoir application en l'espèce. En effet, l'application de cet article aurait pour effet de nier à la travailleuse la compensation reliée à son deuxième emploi, soit celui de préposée aux bénéficiaires, et ne représente pas, par conséquent, sa perte réelle de revenu dans un contexte où la travailleuse a été déclarée admissible au programme Pour une maternité sans danger autant pour son emploi d'éducatrice que pour son emploi de préposée aux bénéficiaires. Dans l'esprit de l'article 1, seul l'article 75 permet une méthode de calcul équitable en raison de la nature particulière des emplois exercés dont l'un est à temps plein et l'autre à temps partiel. Par conséquent, la CSST doit calculer l'IRR en tenant compte du revenu que la travailleuse tirait de ses deux emplois: Amazan et CSSS Nord de l'île & St-Laurent, 276546-72-0511, 06-06-05, S. Arcand.

Étant donné que la lésion professionnelle du travailleur l’a rendu incapable d'exercer non seulement l'emploi qu’il occupait à titre de journalier, mais également son travail d’artiste, il y a lieu d’appliquer l’article 75 pour l’indemniser pour la perte de ses deux emplois. Il faut donc ajouter au calcul de l’indemnité basée sur le salaire minimum qu’il retirait à titre de journalier, la somme de 15 600$, moyenne qu’il retirait dans les années passées à titre d’artiste et qui correspond sensiblement à la somme qu’il aurait gagnée à ce titre dans le futur n’eût été de sa lésion professionnelle: Tovarnitchii et Cie d'importation Cosmétiques ltée, 273705-71-0510, 06-06-20, M. Cuddihy, (06LP-77).

La travailleuse occupe deux emplois chez deux employeurs différents. Elle travaille comme éducatrice dans un centre de la petite enfance à temps plein et comme serveuse dans un restaurant à temps partiel. Ces emplois ne sont pas de même nature. En raison de sa lésion professionnelle, la travailleuse est incapable de les exercer. En ce cas, appliquer l'article 71, et ainsi retenir le revenu tiré de l'emploi le plus rémunérateur comme en l'espèce, ne refléterait pas la réalité de son revenu ni son statut d'emploi, lesquels correspondent à la notion de «nature particulière du travail» et permettent, dès lors, l'application de l'article 75 qui est conforme à l'intention du législateur: Savard et C.P.E. Le jardin d'amis, 298375-02-0609, 07-06-28, M. Sauvé

Comme le travailleur a été privé du revenu de son emploi régulier à plein temps et de celui de son emploi à temps partiel à compter du 21 avril 2006, et ce, en raison de sa lésion professionnelle, il est équitable d'appliquer les règles de l'article 75 et de calculer l'IRR en tenant compte du revenu de ses deux emplois jusqu’à concurrence du revenu maximum assurable de 57 000$ pour l’année 2006: Etienne et Ville de Montréal, 298453-71-0609, 07-07-27, G. Robichaud, (07LP-111).

Puisque le travailleur exerçait deux emplois à temps plein au moment de sa lésion professionnelle, il s'avère plus équitable d'appliquer l'article 75 que l'article 71 afin de calculer l'IRR à laquelle il a droit. Cependant, comme le cumul des revenus de ces deux emplois dépasse 57 000$, soit le maximum annuel assurable pour l'année 2006, l'IRR doit être calculée sur la base de ce maximum: Bérubé et Ville de Montréal, 304509-71-0611, 07-11-26, L. Crochetière, (07LP-217).

Quand l’application des articles 67 et 71 mène à un résultat inéquitable et à une situation injuste pour le travailleur, l’article 75 doit primer car il s’intègre à l’objet de la loi prévu à l’article 1 et à ce qui est exprimé à l’article 351. En l'espèce, le revenu brut assurable qui doit servir de base au calcul de l'IRR du travailleur qui exerce deux emplois au moment de sa lésion professionnelle est de 36 621,94$, soit un revenu de 27 486,40$ prévu à son contrat de travail chez l'employeur pour son emploi à temps plein et un revenu de 9 135,54$ pour un emploi à temps partiel exercé chez un autre employeur: Corréia et Au Dragon Forgé inc., [2008] C.L.P. 1146.

Compte tenu de l'évolution du marché du travail, il y a lieu de s'écarter de l'application stricte de l'article 71, lorsqu'elle mène à une situation injuste et il y a lieu de retenir, comme le permet l'article 75, une manière plus équitable de calculer la base salariale en fonction de la nature particulière du travail d'un travailleur. En l'espèce, la CSST semble appliquer l'exception du premier alinéa de l'article 67 qui prévoit la possibilité de retenir le revenu acquis durant les 12 mois précédant le début de l'incapacité lorsque le travailleur occupe un même genre d'emplois pour des employeurs différents. Or, cette exception ne s'applique pas au cas du travailleur puisque le marquage et le triage de courrier ne sont pas un emploi du même genre que celui de placer de la marchandise sur des étalages. D'autre part, la règle de base énoncée à l'article 67 est le contrat de travail. Les exceptions prévues dans cette disposition ont pour but de permettre à un travailleur de démontrer un revenu plus élevé que celui prévu à son contrat de travail, mais la CSST ne peut retenir le revenu gagné durant les 12 mois précédant l'incapacité de travail lorsqu'il est moindre que le contrat de travail. La situation d'emploi de ce travailleur est particulière en ce qu'il occupe 2 postes réguliers, pour une prestation hebdomadaire de 57,5 heures et un revenu annuel brut combiné de 57 509 $ selon ses contrats de travail. L'application stricte de l'article 71 entraîne pour ce travailleur une perte financière importante. L'application de l'article 75 s'impose donc et le cumul des revenus s'avère une méthode plus équitable qui tient compte de sa situation professionnelle particulière au moment de la lésion professionnelle qui le prive du revenu de ses deux emplois. Toutefois, le maximum annuel assurable en vigueur au moment de la lésion professionnelle étant de 57 000 $, la base salariale ne peut dépasser ce montant: Lespinasse et Courrier Purolator, [2009] C.L.P. 344.

La travailleuse occupait régulièrement son emploi de cuisinière pour l'employeur au cours des dernières années et elle aurait continué de l'occuper, n'eût été l'accident d'automobile, ce qui lui aurait procuré un revenu brut sensiblement comparable aux années précédentes. En conséquence, la CSST aurait dû prendre en considération le salaire qu'aurait gagné la travailleuse pendant cette période où elle a reçu des indemnités de la SAAQ puisque cette méthode de calcul aurait mieux reflété la réalité de la travailleuse. Le revenu annuel retenu pour établir la base salariale d'un travailleur doit prendre appui sur la réalité de chaque cas et sur une projection défendable de sa situation dans l'avenir et, d'autre part, l'IRR est destinée à compenser des gains futurs et l'incapacité à exercer un emploi. C'est cette interprétation, la plus favorable à la travailleuse, qui doit être retenue puisqu'elle s'harmonise très bien avec ce qui est énoncé aux diverses dispositions de la loi, particulièrement à l'article 75: Létourneau et Société des établissements de plein air du Québec, 388879-02-0909, 10-03-08, J.-M. Hamel.

Il y a lieu, en vertu de l'article 75, de modifier la base de salaire retenue par la CSST et de tenir compte des revenus tirés des deux emplois exercés par le travailleur. Indemniser celui-ci en ne tenant compte que du revenu gagné chez l'employeur, équivaut à sous-compenser le travailleur. L'article 71 prévoit la situation d'un travailleur qui occupe deux emplois. Cependant, il vise la situation où il s'agit d'emplois à temps partiel puisqu'on demande de faire une fiction et de déterminer le revenu comme s'il l'exerçait à temps plein. Or, le travailleur a exercé l'emploi le plus rémunérateur à temps plein et l'autre emploi pratiquement à temps plein puisqu'il effectuait environ 30 heures par semaine. Appliquer les dispositions de l'article 71 le priverait d'un revenu important. Il y a donc lieu de tenir compte de cette situation particulière: El Fara et Kaycan ltée, 391829-62C-0910, 10-04-12, L. Couture.

L'article 75 permet d'adopter une autre méthode de calcul lorsque celles prévues aux articles 67 à 74 sont inéquitables en raison de la nature particulière du travail. En l'espèce, l'article 67 ne peut s'appliquer puisque la travailleuse n'occupait pas les deux emplois au cours des 12 mois précédant la survenance de sa lésion professionnelle. La CSST a appliqué l'article 71 puisque la travailleuse occupait plus d'un emploi au moment de la lésion professionnelle. Elle a retenu que l'emploi le plus rémunérateur était celui qu'elle occupait 28 heures par semaine pour le deuxième employeur. C'est à bon droit que la CSST a fixé la semaine de travail à 40 heures, conformément à la Loi sur les normes du travail. Toutefois, l'application de l'article 71 a produit des effets inéquitables puisque la prestation de travail était de 48 heures et demie par semaine. La CSST devait plutôt appliquer l'article 75 et utiliser les revenus des deux emplois occupés par la travailleuse au moment de la survenance de sa lésion professionnelle aux fins d'établir son revenu annuel brut. Cette approche reflète le mieux la réalité économique de la travailleuse et permet d'atteindre l'objectif de la loi énoncé à l'article 1, qui est la réparation des lésions professionnelles et leurs conséquences. Le revenu brut devant servir au calcul de l'IRR est de 33 404$: Gélinas et Bravo Pizzeria, 2011 QCCLP 925.

La jurisprudence du tribunal, qui évolue depuis les premières décisions rendues sur la question de l'application de l'article 71, tend également à conclure à l'application de l'article 75 si celle-ci permet au travailleur de recevoir une indemnité plus équitable en raison de la nature particulière de l'emploi qu'il occupe, ce qui est le cas en l'espèce. La base salariale devant servir pour le calcul de l'IRR de la travailleuse est de 53 545 $, soit le revenu qu'elle tire de ses deux emplois à temps partiel d'hygiéniste dentaire, à raison de 34 heures pour un employeur et de 10 heures pour le second: Rivard et Clinique dentaire Sévigny, 2011 QCCLP 2928.