LoiLATMP
TitreXII LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES: ART. 359, 359.1, 367 À 429.59, 450 ET 451
Section2. Les pouvoirs de la CLP et la décision à rendre: art. 377, al. 2
2.1 Le principe du «de novo»
2.1.2 La règle de l'ultra petita
Titre du document2.1.2 La règle de l'ultra petita
Mise à jour2011-11-01


La règle de l'ultra petita s'applique

La CALP n'était saisie que du problème de la date de consolidation. Si elle l'avait fixée à une date postérieure au 31 juillet 1987, date de cessation du versement de l'IRR, peut-être aurait-elle pu, en vertu de l'article 400, rendre une décision adaptée à la date de consolidation. Puisqu'elle a maintenu la date de consolidation au 30 mars 1987, sa compétence était épuisée à partir de cette date et elle ne pouvait se saisir d'une autre décision de la CSST portant sur l'IRR. De plus, non seulement a-t-elle empiété sur la compétence de la CSST et sur celle du bureau de révision mais elle a jugé ultra petita, le travailleur ne lui ayant demandé que de statuer sur la date de consolidation de sa lésion: Société canadienne des postes c. CALP, [1990] C.A.L.P. 570 (C.S.).

La règle de l'ultra petita ne s'applique pas

Lorsqu'il y a appel d'une question, le tribunal n'est pas limité à déterminer le droit additionnel de l'appelant au-delà de la décision de la CSST sur la question. Il peut remettre celle-ci en cause ab origine. Il s'agit de la Loi sur les accidents du travail, L.R.Q., c. A-3. Le bureau de révision avait réduit le pourcentage d'incapacité partielle permanente du travailleur de 12,5% à 8% alors que le travailleur s'était pourvu en révision pour obtenir un pourcentage de 35%: Brière c. Laberge, [1985] R.D.J. 599 (C.A.).

Le bureau de révision pouvait aller au-delà de la date de la décision de première instance ou de la décision de seconde instance et même jusqu'à une date future que justifiait l'«équité d'après le mérite réel et la justice du cas». Le rôle de la CSST et celui de la Commission des affaires sociales sont différents de celui des tribunaux de droit commun. Il ne s'agit pas d'un appel au sens usuel, c'est-à-dire d'un procès de la première décision, mais plutôt d'un appel de novo. La CAS avait donc le devoir, en infirmant l'ordonnance du bureau de révision, de rendre la décision qui aurait dû être rendue en premier lieu et pouvait fixer la durée de l'incapacité totale temporaire au-delà de la date retenue dans la décision initiale de la CSST: Ville de Salaberry de Valleyfield c. Commission des affaires sociales, [1984] C.S. 193; Société canadienne des postes c. Morency, [1989] R.J.Q. 2300 (C.A.)

La notion d'ultra petita ne s'impose pas au tribunal administratif chargé de disposer d'une question. Celui-ci rend sa propre décision sur la question en litige et n'est aucunement limité par la demande ou les arguments des parties sur cette question. Le rôle de la CALP ne se limite donc pas à disposer simplement du bien-fondé de la décision du bureau de révision: Société D.G.L. enr. et Dorilas Grenier ltée, [1994] C.A.L.P. 70; Laliberté & Associés inc. et Thibault, [2002] C.L.P. 859 (décision sur requête en révision).

Bien que les parties soient maîtres de déterminer l’objet de la contestation dont le tribunal est saisi, c’est l'article 377 qui dicte, sur le plan juridictionnel, comment la CLP décidera de la question qui lui est soumise. Les désirs et objectifs des parties, une fois qu’elles ont confié la résolution de leur différend au tribunal, ne sont plus désormais que des arguments à considérer et ils ne font plus loi entre elles. Au surplus, la notion d’ultra petita ne s’impose pas au tribunal administratif chargé d’appliquer des dispositions d’ordre public dépassant largement le cadre étroit des intérêts de parties impliquées dans un litige privé. Ainsi, la compétence juridictionnelle de la CLP ne se limite pas à «bonifier» ou non ce que le travailleur a déjà obtenu quant à la date de consolidation et aux soins et traitements. Le tribunal a pleine latitude pour se prononcer sur ces sujets et rendre la décision qu’il juge appropriée à la lumière de la preuve légalement offerte: Bénard et Montacier inc., [2003] C.L.P. 29; M.B.I. Corexcel inc. et Larocque, 287167-02-0604, 07-09-06, J.-F. Clément, (07LP-123).

Selon l’article 377, la CLP a le pouvoir de confirmer, de modifier ou d’infirmer la décision rendue par l'instance de révision de la CSST et de rendre la décision qui aurait dû être rendue en premier lieu. Elle n'est pas limitée à déterminer le droit additionnel de l’appelant au-delà de la décision de la CSST sur la question et doit considérer ce à quoi a droit le travailleur, pas plus et pas moins. De plus, la notion d’ultra petita ne s’impose pas puisqu’elle doit rendre sa propre décision sur la question en litige et n’est aucunement limitée par la demande ou les arguments des parties sur cette question, sans toutefois pouvoir se prononcer sur une question dont elle n’est pas saisie: Béland et Les Coffrages Duc ltée, 205626-32-0304, 04-03-24, G. Tardif, (03LP-326).

Le champ de compétence dévolu à la CLP, en sa qualité de gardienne de l’application d’une loi d'indemnisation à caractère social, fait en sorte que ses membres ne sont pas liés par les prétentions des protagonistes principaux que sont le travailleur et l’employeur, non plus d’ailleurs que par celles de la CSST, en tant que responsable de l’application quotidienne de la LATMP. Ainsi, la notion d’ultra petita n’a pas droit de cité devant la CLP: Gagnon c. CLP, [2006] C.L.P. 491 (C.S.).

Le tribunal est saisi de la question de savoir si l’employeur a droit ou non à un partage d’imputation, sujet dans lequel est inclus celui du pourcentage à attribuer. Lorsque la CLP est saisie d’une contestation en cette matière, elle doit rendre la décision qui aurait dû être rendue. Elle n’est donc nullement liée par ce que la CSST a décidé quant à l’une ou l’autre des composantes de la notion de travailleur déjà handicapé. Lorsqu’il y a appel sur une question, le tribunal n’est pas limité à déterminer le droit additionnel de l'appelant au-delà de la décision rendue par la CSST sur cette question. Il peut remettre celle-ci en cause ab origine: Transport V.A. inc., 332852-03B-0711, 08-06-03, J.-F. Clément.

Le tribunal a compétence pour modifier la décision rendue par la CSST et accorder à la travailleuse un pourcentage au-delà de ce qu'elle demande même si c'est l'employeur qu a contesté la décision déterminant le pourcentage d'atteinte permanente. En effet, son rôle est de rechercher la vérité pour voir à la juste application de la loi qui relève de sa compétence. Le tribunal doit rendre la décision qui aurait dû être rendue. Même si les parties déterminent l'objet de la contestation, l'article 377 dicte comment le tribunal décidera de la question qui lui est soumise. De plus, la notion d'ultra petita ne s'impose pas au tribunal administratif chargé d'appliquer des dispositions d'ordre public et rendre la décision qu'il juge appropriée selon la preuve qui lui est légalement soumise. Commonwealth Plywood ltée et Murphy, 363622-64-0811, 09-07-15, J.-P. Arsenault.