LoiLATMP
TitreII LA NOTION DE LÉSION PROFESSIONNELLE: ART. 2, 25 À 31
Section2. Éléments constitutifs de la notion d'accident du travail: art. 2, al. 1
2.4 Survenu à l'occasion du travail
2.4.1 Le critère de subordination
Titre du document2.4.1.1 Lésions reconnues
Mise à jour2011-11-01


NB : Voir la section 2.4.1.2 de ce titre pour les décisions sur les lésions non reconnues.

Il n'est pas nécessaire que le travailleur doive obligatoirement obéir à une dictée précise ou générale comme une directive ou une habitude de travail. Il n'est pas davantage nécessaire qu'il soit sous la surveillance de son supérieur au moment de l'accident: Québec Téléphone c. CALP, [1990] C.A.L.P. 1099 (C.S.).

Il existe un lien d'autorité lorsque la travailleuse se rend à la salle de toilette et se lave les mains comme l'exige l'employeur qui oeuvre dans le domaine de l'alimentation. Chute: Bellavance et Bexel Marieville, 07377-62-8804, 90-03-07, M. Paquin, (J2-02-44).

Accident dans la douche d'une chambre d'hôtel. Le changement brusque de la température de l'eau alors que le travailleur prenait sa douche est à l'origine de la chute ayant entraîné sa blessure et, par conséquent, constitue l'événement imprévu et soudain ayant entraîné la lésion. Par ailleurs, entre le moment où le travailleur a quitté son domicile pour se rendre aux États-Unis et celui où il est revenu chez lui, il exerçait, durant tout son séjour, la fonction de représenter l'employeur, soit une activité reliée à son travail. Le lien de subordination «employeur-travailleur» existait au moment de l'accident puisque le travailleur n'avait d'autres choix que de se rendre à l'endroit désigné et réservé par son employeur et qu'il ne pouvait en revenir que selon les directives de ce dernier. De plus, le travailleur a été blessé alors qu'il exerçait une activité prévisible, normale et raisonnable en prenant une douche: Zaheeruddin et Défense nationale Q.E.T.E., [1991] C.A.L.P. 935.

Accident dans la chambre de motel où le travailleur se trouve alors qu'il est dans l'obligation de demeurer à l'extérieur de sa ville pour vendre les produits de l'employeur: Guénette et Produits Mark-V (Les), 21114-03-9008, 92-12-29, M. Carignan, (J4-24-05).

Il existe un lien de subordination entre l'employeur et le travailleur lorsque ce dernier se blesse en jouant au badminton le midi, compte tenu que cette période est considérée comme du temps travaillé suivant la convention collective et que le travailleur doit demeurer disponible de 8h à 16h: Polynice et Institut Philippe Pinel de Montréal, 37056-62-9202, 93-11-01, J.-G. Béliveau, (J5-22-12).

La travailleuse, une employée désignée pour fournir les services essentiels durant une grève, est victime d'un grave accident de la circulation alors qu'elle se rend au lieu de rassemblement choisi par l'employeur pour se rendre à son travail. Il ne s'agit pas d'un simple accident de trajet. La travailleuse et les autres employés «désignés» ont été considérés comme étant au travail pendant cette journée, ayant reçu leur plein salaire: Revenu Canada et Gravel, [1995] C.A.L.P. 1750, requête en révision judiciaire rejetée, [1997] C.A.L.P. 464, appel rejeté, C.A. Montréal, 500-09-004785-978, 00-06-01, jj. Beauregard, Biron, Rousseau-Houle.

La subordination peut être d'ordre général et couvrir une multitude de situations. En l'espèce, le travailleur, même à la période du dîner, doit tenir son radio-téléphone ouvert, pouvant être appelé à n'importe quel moment «à cause des nécessités du service». Cette obligation est prévue à la convention collective et le travailleur s'expose à des sanctions disciplinaires s'il ne s'y conforme pas. Policier qui se fracture la cheville sur la chaussée glacée de son entrée de garage en sortant du véhicule de service: Ferland et Ville d'Aylmer, 55069-07-9311, 95-10-03, G. Robichaud, (J7-09-03); policier qui se fait une entorse en descendant de son véhicule de patrouille pour aller faire une transaction bancaire: Boudreau et Ville de Laval, 101866-61-9806, 99-05-04, M. Duranceau, (99LP-20).

Le travailleur affecté en région éloignée, est libéré plus tôt par l'employeur. Il utilise un camion mis à la disposition des travailleurs pour aller à la pêche. Au moment du retour, s'affairant à faire démarrer le véhicule avec un tournevis, il reçoit un éclat dans l'oeil. L'activité exercée par le travailleur peut être qualifiée de mixte puisque exécutée dans l'intérêt des deux parties. Un lien de subordination existait entre le travailleur et l'employeur du fait de la présence du travailleur sur un chantier isolé. De plus, c'est avec le consentement de l'employeur qu'il a utilisé le véhicule. C'est à l'avantage aussi de l'employeur que le travailleur tentait de le remettre en marche: Daigle et Sotramex inc., [1996] C.A.L.P. 1150.

Partie de tennis à l'heure du repas. L'accident est survenu dans les locaux de l'employeur et durant une période rémunérée où le travailleur doit rester disponible en cas d'urgence. Cette activité est profitable à l'employeur. Le travailleur, un agent communautaire, doit se tenir en forme. Lien de subordination non interrompu au moment de l'accident: Darveau et Institut Philippe Pinel de Montréal, 64725-61-9412, 96-08-19, J.-D. Kushner, révision rejetée, [1997] C.A.L.P. 125.

Déchirure du mollet droit en participant à un cours de conditionnement physique pendant la pause repas dans un local attenant aux lieux de travail, propriété de l'employeur. Le coût de l'activité est défrayé par l'employeur mais celle-ci demeure purement facultative. Le lien de subordination est maintenu durant cette activité, le travailleur étant rémunéré et disponible à l'employeur. L'employeur, tout comme le travailleur, a un intérêt dans l'activité, tant sur le plan de l'accomplissement des tâches que sur celui de la qualité du climat de travail: Lapointe et S.E.C.A.L., [1997] C.A.L.P. 385.

Agent de bord. La travailleuse, en mission à Calgary, a quitté son hôtel pour prendre son repas car le restaurant de l'hôtel était fermé. Au retour, elle se blesse au pied. Cette activité est connexe au travail. Il y a un lien de subordination entre l'employeur et la travailleuse puisqu'elle demeurait disponible pour être rappelée au travail à n'importe quel moment: Air Canada et Trépanier-Vigneault, 66024-60-9501, 96-04-16, S. Lemire; l'agent de bord devait donner un numéro de téléphone où il pouvait être joint en tout temps. Fracture à la cheville droite à la suite d'une chute sur un trottoir glacé. Lésion reconnue: Air Canada et Richard, [1998] C.L.P. 461.

Chute dans l'escalier d'une école alors que la travailleuse, responsable du service de garde, en était à son dernier jour de congé de maladie et était venue récupérer les clés de l'école et des documents pour travailler chez elle. Le lien de subordination, même ténu, existe. Le fait de récupérer des documents pour la confection de rapports constitue une activité liée au travail: Commission scolaire catholique Sherbrooke et Binette, [1998] C.L.P. 700.

Blessure au dos alors que la travailleuse se penchait pour déposer dans son sac à main les billets pour le souper de Noël que l'employeur lui avait demandé de vendre, pendant ses heures de travail. La travailleuse était toujours sous l'autorité de l'employeur et, au moment où elle s'est blessée, elle exécutait un geste directement relié à une activité (la vente de billets) qu'elle accomplissait pour l'employeur: Cité de la santé de Laval et Milanese, 90047-61-9707, 98-11-25, M. Zigby.

Anxiété du travailleur, un chauffeur d'autobus, après qu'il a été témoin d'un grave accident de la route alors qu'il était pendant sa période de « temps d'attente » au terminus de son circuit. Il était toujours sous l'autorité de son employeur et il exerçait une activité dans l'intérêt et au bénéfice de ce dernier: Matte et Société de transport de la Communauté urbaine de Montréal, 100051-71-9803, 99-01-11, D. Gruffy.

En prenant le métro pour se rendre à son travail, un technicien-ambulancier voit un individu se jeter devant la rame de métro. Une anxiété situationnelle post-traumatique est diagnostiquée. Au moment de l'événement et jusqu'à l'arrivée de l'équipe d'Urgences-Santé, le travailleur a exercé son devoir de bon citoyen conformément à l'article 2 de la Charte québécoise des droits et libertés de la personne, en tentant de porter secours à la personne. À son arrivée, le superviseur a utilisé les services du travailleur, non plus comme bon citoyen, mais comme un travailleur au service de l'employeur. Il n'y avait plus deux mais trois techniciens-ambulanciers en devoir à ce moment-là. Le fait que le superviseur autorise le travailleur à retourner chez lui sans se présenter au travail ce jour-là et que sa journée allait être payée au complet suggère la reconnaissance d'un lien de subordination et d'autorité existant entre le travailleur et l'employeur à ce moment-là. Le caractère professionnel de la lésion doit être reconnu en raison de la connexité entre l'événement et le travail qu'a accompli le travailleur pour l'employeur après l'arrivée de l'équipe d'Urgences-Santé et de son superviseur sur les lieux de l'événement: Girard et Urgences-Santé, [2000] C.L.P. 1082.

Chute du travailleur sur la voie publique après un examen par le médecin de l'employeur. Le travailleur était sous l'autorité de l'employeur quand il est tombé. En effet, c'était pour se conformer aux instructions de l'employeur qu'il s'est présenté devant le médecin désigné par ce dernier. De plus, il avait ordre de retourner travailler sans délai après l'examen. L'incident est survenu durant les heures habituelles de travail et pendant que le travailleur était rémunéré. L'activité en question a été exercée pour permettre à l'employeur d'assurer une saine et légitime gestion de la réclamation du travailleur pour surdité industrielle. Il existait dès lors un lien de connexité suffisamment étroit entre le travail et cette activité: Bourque et C.S. Brooks Canada inc., 117450-05-9905, 00-01-26, F. Ranger.

Agent de correction blessé à la cheville en jouant au volleyball sur le terrain de l'employeur. Activité organisée par le comité social et le programme d'aide aux employés dans le cadre de la semaine de la fonction publique fédérale. L'employeur avait sollicité la participation des employés en adoptant diverses mesures concrètes à cet effet. Une telle implication de la part de l'employeur dépasse nettement l'encouragement ou même la coopération minimale à une activité récréative. Cela témoigne d'un degré certain d'autorité exercée sur l'ensemble des activités offertes au cours de cette journée particulière: Lahaye et D.R.H.C. Direction travail (Service correctionnel Canada), 173334-03B-0111, 02-04-11, G. Marquis.

La travailleuse a subi une lésion professionnelle, soit un accident survenu à l'occasion du travail, alors qu'elle s'est retrouvée coincée entre le mur et le véhicule de sa collègue après que celle-ci eut enfoncé l'accélérateur plutôt que le frein au moment où elle l'aidait à garer sa voiture dans le stationnement mis à leur disposition par l'employeur. N’eût été du lien d’autorité entre l’employeur et ses employées, ni la travailleuse ni sa collègue n’auraient eu accès au stationnement. Bien que les employés ne soient pas tenus de s’y garer, cette opportunité est fort appréciée des employés qui s’inscrivent sur une liste afin de pouvoir en bénéficier à tour de rôle. Il s’agit donc d’un avantage lié à l’emploi, c’est-à-dire d’une condition reliée au travail. Par ailleurs, le lien de subordination avec l’employeur n’a pas été rompu par le seul fait que la travailleuse ait tenté d’aider sa collègue à se garer. En effet, le geste de la travailleuse est un geste de pure civilité dicté par des circonstances particulières: Chicoine et Ville de Montréal, 170255-71-0110, 03-05-08, L. Turcotte, (03LP-61), requête en révision judiciaire rejetée sur le banc, C.S. Montréal, 500-17-015929-030, 04-03-09, j. Vaillancourt.

Monitrice dans un camp d'été. Blessure alors qu'elle fait une chute en bas d'un cheval en aidant l'entraîneuse d'équitation à retrouver son cheval personnel. La travailleuse s'est jointe au groupe de recherche avec l'autorisation, du moins tacite, du chef de groupe et de l'entraîneuse. Ces personnes étaient habituellement les personnes en autorité directe sur la travailleuse. On doit considérer que l'activité exercée au moment de l'événement présente un lien de connexité étroit avec le travail exercé: Clark et Camp Les écuries El Poco, 229336-63-0403, 04-09-28, J.-M. Charette.

Le travailleur, un bûcheron, se blesse en aidant un collègue à installer un moteur de débusqueuse à la suite d'une réparation. Bien que l'événement soit survenu un jour férié et que l'employeur, à ce moment, n'avait pas spécifiquement un lien de subordination direct avec le travailleur, on doit considérer qu'il s'agit d'un accident du travail survenu à l'occasion du travail. La rémunération ou le lien de subordination ne constituent pas des éléments absolument obligatoires à la reconnaissance d'un tel accident, une activité «incidente» effectuée par un travailleur et «utile à l'activité» de l'employeur pouvant la justifier. Le fait que l'employeur ne soit pas directement responsable de l'activité ne peut avoir pour effet d'empêcher le travailleur d'être protégé contre les risques professionnels auxquels il est exposé par le fait ou à l'occasion de son travail. En l'espèce, l'activité profitait de façon indirecte à l'employeur, considérant la nature même des opérations devant être menées lors de la coupe forestière: Guénette et Entreprises forestières Gus inc., 229302-64-0403, 04-12-17, R. Daniel.

Le travailleur, un policier, est tombé dans un guet-apens mis en place par une connaissance, qui sous prétexte d'une présentation du travailleur sur son métier devant des élèves, avait pour but de lui voler son arme de service et de s'en servir pour se suicider. Le lien de subordination existait encore au moment où il a décidé de monter à l’appartement de l’enseignante. L’activité profitait à l’employeur puisqu’il s’agissait d’une présentation dans le cadre des relations communautaires de l’employeur. Le travailleur représentait encore l’employeur et il croyait monter à l’appartement pour discuter de l’erreur de date de la présentation et du contenu de celle-ci. Il n’a pas quitté la sphère professionnelle pour se retrouver dans la sphère personnelle du fait qu’il a accepté de continuer les discussions chez l'enseignante: Sorel et Sûreté du Québec, [2006] C.L.P. 357, révision rejetée, 265458-07-0506, 07-05-16, C.-A. Ducharme.

Le travailleur, un inspecteur, a subi un accident d'automobile en se rendant à son travail à partir de son domicile. Il existait un lien de subordination entre l'employeur et le travailleur au moment de l'événement. En effet, conformément à la convention collective qui prévoit certaines modalités d'application concernant les droits et les obligations du travailleur, il est établi que celui-ci doit absolument activer son téléphone cellulaire une demi-heure avant d'être rémunéré. Comme le mentionne le travailleur, il lui est arrivé à plusieurs reprises qu'à la suite des appels dès 7 h 30, il a dû se rendre sur un lieu qui, la veille, n'avait pas été identifié comme un endroit de travail, que ce soit pour répondre à une plainte ou aux fins d'enquête et de collecte de documents. C'est donc dire qu'il doit obéir aux ordres reçus, et ce, même si son salaire n'est pas versé. De plus, le travailleur touche une forme de rémunération puisque le kilométrage octroyé pour son déplacement de son domicile à son endroit de travail constitue une compensation pour une prestation de travail. Le même raisonnement s'applique aussi pour la question du paiement de la franchise de l'assurance collision assumée par l'employeur: St-Germain et Commission de la construction du Québec, 292670-62B-0606, 07-06-04, R. Deraiche.

La travailleuse subit une entorse lombaire en déplaçant une boîte de 25 livres contenant ses effets personnels alors que l'employeur lui a demandé de retourner chez elle et d'attendre son coup de téléphone. Même si CLP avait conclu que le fait de se retirer du travail avec ses objets personnels et professionnels, en attendant la période de fin d'emploi, ne constituait pas une activité couverte par la notion de «fait du travail», la notion «à l’occasion du travail» couvre cette réalité. Les faits à la source de sa lésion professionnelle surviennent alors qu'elle se pliait aux ordres directs de son employeur: Pomerleau et Gestion Nicine inc., 307108-31-0612, 07-06-06, P. Simard, (07LP-40).

Le travailleur a été victime d'un accident du travail en chutant dans le stationnement de l'employeur alors qu'il partait avec des collègues de travail qu'il covoiturait pour se rendre sur les lieux du travail. Il existait un lien de subordination suffisant puisque la finalité du covoiturage profitait à l'employeur et que le travailleur s'y adonnait à la demande de l'employeur: Lavoie et Sécurité des Deux-Rives ltée, 267571-64-0507, 07-10-18, R. Daniel, (07LP-143).

Même s’il y a eu insubordination de la part de la travailleuse, car malgré l'interdiction formelle de l'employeur, elle a visité des clients et a fait des présentations en Gaspésie le 6 et 7 mars 2007, le lien de subordination n'était pas complètement brisé. L'employeur a accepté que la travailleuse se rende dans cette région avec le véhicule de la compagnie, la carte d’essence de la compagnie et a remboursé les dépenses effectuées durant ces quelques jours. L'accident d'automobile est donc un accident du travail survenu à l’occasion du travail: Lavoie et Corporation des aliments Santa Maria, 323608-05-0707, 07-11-22, L. Boudreault, (07LP-233).