LoiLATMP
TitreIV LA RÉADAPTATION: ART. 145 À 187
Section3. Éléments du plan de réadaptation: art. 148 à 187
3.2 Réadaptation sociale: art. 151 à 165
3.2.9 Entretien courant du domicile: art. 165
Titre du document3.2.9 Entretien courant du domicile: art. 165
Mise à jour2011-11-01


Généralités

Bien que la loi ne précise pas le sens qui doit être donné à l'expression «entretien courant», il faut comprendre qu'il s'agit des travaux d'entretien habituels, ordinaires du domicile, par opposition à des travaux d'entretien inhabituels ou extraordinaires: Lévesque et Mines Northgate inc., [1990] C.A.L.P. 683; Pelletier et CSST, 145673-08-0008, 01-09-25, S. Lemire.

Le déplacement de meubles et le lavage des planchers se retrouvent davantage dans la catégorie des tâches domestiques que dans celle reliée à des réparations ou dépenses qu'exige le maintien en bon état d'un bien. Il s'agit de travaux requis pour la propreté, le confort et la commodité des lieux qui ne justifient pas le remboursement des frais s'y rapportant en application des termes de l'article 165. C'est plutôt l'article 158 de la loi qui vise ces tâches domestiques: Roy et Brasserie Channy inc., 78743-03-9604, 97-06-20, J.-G. Roy.

En 1992, le bureau de révision reconnaît le droit du travailleur au remboursement des frais engagés pour l'entretien courant de son domicile. En 1995, lors d'une entente intervenue avec la CSST, le travailleur renonce notamment au remboursement de ces frais moyennant une somme d'argent. À ce moment, le droit du travailleur au remboursement des frais d'entretien est né et actuel, il peut donc valablement transiger avec la CSST et renoncer à ce droit. Puisque cette entente n'est pas contraire à l'ordre public et a été signée en toute connaissance de cause, le travailleur ne peut se voir reconnaître, en 1997, le droit au remboursement des frais d'entretien courant de son domicile: Maheux et Enseignes Laval, 100998-02-9804, 99-04-27, N. Tremblay, (99LP-47).

Si l'entretien régulier n'est pas fait, il est manifeste que le domicile ne sera pas maintenu en bon état. Il lui faut donc des soins réguliers, habituels, ordinaires et courants. L'article 158, en parlant de travaux domestiques, implique une aide personnelle à domicile qui vise des situations beaucoup plus graves en terme de conséquences immédiates puisqu'on associe cette aide au fait qu'un travailleur soit incapable de prendre soin de lui-même dans des activités comme se laver. L'article 165 n'est pas conditionnel à l'impossibilité de prendre soin de soi-même et vise plutôt les cas où le travailleur demeure avec une atteinte permanente grave et des limitations fonctionnelles qui l'empêchent de reprendre certaines activités qu'il effectuait auparavant, soit des travaux d'entretien courant: Lebel et Municipalité Paroisse de Saint-Éloi, 124846-01A-9910, 00-06-29, L. Boudreault, (00LP-29); Frigault et Commission scolaire de Montréal, 142721-61-0007, 01-05-25, L. Nadeau.

L'article 165 est clair, il s'agit de rembourser les frais engagés pour faire exécuter ses travaux par quelqu'un d'autre et non pas de frais d'adaptation de l'équipement déjà utilisé pour que le travailleur continue de le faire lui-même. Cet article ne peut donc trouver application en ce qui concerne les demandes particulières du travailleur. Cependant, l'article 152 prévoit, de façon non exhaustive, certains programmes de réadaptation sociale qui ont pour but d'aider le travailleur à surmonter les conséquences personnelles de sa lésion professionnelle et lui permettre d'être le plus autonome possible. En l'espèce, il est quasi impossible pour le travailleur d'obtenir des services de déneigement dans le milieu où il vit. Pour pallier ce manque, il a dû doter son tracteur d'un mécanisme sécuritaire permettant aux chaînes de demeurer sur les roues afin qu'il puisse y avoir une traction adéquate lorsqu'il effectue le déneigement. Ce mécanisme lui évite d'avoir à monter et descendre fréquemment de son tracteur et lui permet donc d'être autonome dans cette activité. Par ailleurs, même si cette adaptation peut sembler dispendieuse sur le coup, elle permettra à moyen terme d'économiser les frais qui auraient pu être engagés pour faire exécuter le déneigement par quelqu'un d'autre. Dans les circonstances, il s'agit d'une demande raisonnable, qui peut faire partie de son programme de réadaptation sociale. Le travailleur a donc droit au remboursement des frais pour adapter son tracteur de déneigement: Côté et Dynamitage M.B. inc. (fermée), 280678-05-0601, 06-08-17, L. Boudreault.

Au moment où le travailleur présente sa demande pour être remboursé pour ses frais de déneigement, la lésion professionnelle n'était pas consolidée et on ignorait si le travailleur en conserverait une atteinte permanente que l'on pourra qualifier de grave. Ainsi, il ne répond pas aux conditions d'application de l'article 165. Cet article ne permet pas au travailleur d'être remboursé des frais qu'il engage pour faire exécuter, par un tiers, des travaux d'entretien courant de son domicile pendant qu'il est malade, ou temporairement incapable d'accomplir certaines tâches qu'il accomplissait normalement auparavant: Longpré et Dacra Construction 1985 inc., 287130-64-0604, 07-01-16, T. Demers.

Le travailleur a fait l'acquisition d'une tondeuse électrique et d'une débroussailleuse. Or, l'article 165 ne permet pas le remboursement des frais engagés pour l'achat d'équipement: Beaulieu et Université Laval, 311288-31-0702, 07-06-12, C. Lessard.

Même si la demande de remboursement des travaux d’entretien courant de son domicile n’a été formulée que le 27 août 2005, rien n’empêche qu’une décision faisant droit au remboursement de certains ou de tous les travaux puisse rétroagir à la date de la lésion professionnelle, soit au 11 décembre 2000. En effet, le travailleur n’était évidemment pas capable d’effectuer les travaux qu’il faisait antérieurement à compter de cette date. La loi n’interdit aucunement la rétroactivité dans un tel cas et l’article 1, dont l’objet est la réparation des lésions professionnelles et des conséquences qu’elles entraînent pour les bénéficiaires, permet, certes, d’appliquer cette réparation à compter de la lésion, car les conséquences ont commencé le 11 décembre 2000 et non au 3 novembre 2004, date de la consolidation: Gagné et 3131751Canada inc. (fermé), 284176-63-0603, 07-08-01, M. Sauvé.

La CSST ne peut pas refuser de rembourser au travailleur les frais qu’il doit engager pour faire exécuter des travaux d’entretien courant de son domicile en fondant son refus sur le fait qu’il n’est pas le propriétaire de la maison pour laquelle il réclame ce remboursement. Même si, pour diverses raisons, c’est la conjointe du travailleur qui est propriétaire de cette maison, il demeure que cet endroit constitue à la fois son propre lieu d’habitation et celui qu’il partage avec sa conjointe à titre de résidence familiale et pour lequel il assume les coûts reliés à son entretien: Patron et Provigo Distribution (Ctre Dist. Épicerie), 316093-61-0705, 08-07-18, G. Morin, (08LP-113).

L'article 165 stipule que le travailleur a droit au remboursement des frais relatifs aux travaux d'entretien courant du domicile, tels le déneigement et l'entretien du terrain. Cependant, les frais annuels que chaque copropriétaire est appelé à débourser ne couvrent pas seulement les dépenses relatives à ces travaux, mais également toutes les dépenses relatives à l'administration et à l'entretien de la copropriété. La CSST était donc fondée à déclarer que les portions de la quote-part du travailleur ayant trait notamment au coût de l'entretien du bâtiment, de l'entretien ménager et de l'électricité ne sont pas remboursables: Savard et Jean Leclerc Excavation, 354301-31-0807, 08-12-17, C. Lessard.

Il importe de distinguer les travaux ordinaires et les travaux habituels du domicile des travaux d'entretien inhabituels ou extraordinaires. En l'espèce, les travaux de réparation de vices de construction et de finalisation de ladite construction font partie de la seconde catégorie et ne sont pas couverts par l'article 165. En ce qui a trait aux travaux relatifs à la transformation et à la réparation de certains équipements (remplacement d'un poêle à bois par un poêle à granules et de la tondeuse actuelle par une plus légère), le tribunal rappelle que l'exercice des pouvoirs prévus au cinquième paragraphe de l'article 184 est discrétionnaire. Par conséquent, la CSST peut choisir de continuer à payer les coûts liés à l'achat et au transport du bois de chauffage et ceux relatifs à la tonte de gazon, selon les paramètres prévus à l'article 165, plutôt que de transformer ou remplacer des équipements qui permettraient éventuellement au travailleur de les réaliser lui-même: Claveau et Industrie GMI inc., 355892-02-0808, 08-12-23, R. Napert.

Le travailleur demande le remboursement du coût d'achat et d'installation de deux portiques visant à protéger le chemin de sortie de sa résidence jusqu'au stationnement. Au moment d'acheter cette résidence, le travailleur n'a pas réalisé que la pente de 15 pieds de sa résidence faisait en sorte que lors de tempêtes de neige, il devait faire face au glissement de la neige de la toiture au sol. Or, il ne s'agit pas de travaux d'entretien courant du domicile, mais d'équipements qui s'ajoutent à sa résidence. De plus, même si ces portiques ajoutent au confort et à la sécurité de sa résidence, ceci ne découle pas de la lésion professionnelle puisque l'acquisition de la résidence est postérieure au fait accidentel. Le travailleur doit donc assumer seul les coûts rattachés à la toiture de sa résidence: Olivier et Investissements Trizec ltd, 374537-03B-0904, 09-08-21, A. Tremblay.

Comme un programme de réadaptation sociale peut comprendre, notamment le paiement de frais d’aide personnelle à domicile ou le remboursement du coût des travaux d’entretien courant du domicile, il faut donc en déduire que ces deux expressions ne sont pas synonymes et visent deux réalités distinctes. Ainsi, l’époussetage, le passage de l’aspirateur et le nettoyage de la salle de bain participent, selon le Règlement sur les normes et barèmes de l’aide personnelle à domicile et la grille à laquelle réfère ce dernier, à des activités d’aide personnelle à domicile et, selon la règle d’interprétation voulant que le particulier l’emporte sur le général, elles sont exclues de la portée de l’article 165: Gagnon et Bombardier inc., 2011 QCCLP 5565, révision pendante.


Frais d'entretien courant et aide personnelle à domicile

Puisque la travailleuse n'a pas droit à l'aide personnelle à domicile, selon l'article 158, notamment pour le lavage des planchers et le nettoyage du four, elle ne peut réclamer les mêmes frais pour des travaux d'entretien courant du domicile en vertu de l'article 165: Fortier et Dr Martine Pomerleau, 94282-62C-9802, 99-03-02, R. Hudon.

Le fait qu'un travailleur reçoit une aide personnelle à domicile en vertu des articles 158 à 160 ne constitue pas un obstacle au remboursement des travaux d'entretien courant de son domicile: Quévillon et Industrie James McLaren inc., 105351-72-9809, 99-05-13, R. Langlois, (99LP-25).

Même si la travailleuse n'a pas droit à l'aide personnelle à domicile en vertu de l'article 158 puisqu'elle est capable de prendre soin d'elle-même, elle a droit au remboursement des frais engagés pour exécuter les travaux d'entretien ménager de son domicile selon l'article 165: Lebel et Municipalité Paroisse de Saint-Éloi, 124846-01A-9910, 00-06-29, L. Boudreault, (00LP-29); Frigault et Commission scolaire de Montréal, 142721-61-0007, 01-05-25, L. Nadeau; Castonguay et St-Bruno Nissan inc., 137426-62B-0005, 01-11-21, Alain Vaillancourt.

Bien qu'en principe le versement d'une allocation d'aide personnelle à domicile ne constitue pas en soi un obstacle au remboursement pour des travaux d'entretien courant, il faut éviter la double indemnisation. En l'espèce, la travailleuse n'a pas droit au remboursement des frais pour le ménage léger et le ménage lourd, puisque son allocation d'aide personnelle à domicile comporte déjà des sommes pour ces tâches: Charlebois et G-Net Universel ltée, [2005] C.L.P. 266.

Les frais doivent avoir été engagés

Les frais doivent avoir été engagés pour «faire exécuter» des travaux, ce qui exclut les dépenses afférentes à l'achat des matériaux puisque le travailleur aurait de toute façon dû les acheter s'il avait effectué ces travaux lui-même: Savard et Entreprises P.E.B. ltée, [1992] C.A.L.P. 89; Gagnon et Bombardier inc., 30854-01-9108, 93-06-25, D. Beaulieu; Air Canada et Chapdelaine, 35803-64-9112, 95-11-17, B. Roy, (J7-11-35) (décision accueillant en partie la requête en révision).

Les frais doivent avoir été «engagés» pour être remboursés au travailleur. En l'espèce, il serait prématuré de faire droit à la réclamation du travailleur concernant l'installation d'une clôture à son domicile puisque ce dernier ne soumet qu'une simple évaluation du coût des travaux, au surplus non détaillée. Le projet du travailleur n'est pas matérialisé, de sorte que l'article 165 ne peut trouver application: Air Canada et Chapdelaine, 35803-64-9112, 95-11-17, B. Roy, (J7-11-35) (décision accueillant en partie la requête en révision).

Une demande de remboursement est prématurée lorsque les frais n'ont pas été engagés. Par ailleurs, en l'espèce, le travailleur ne demande qu'une simple déclaration de principe indiquant que les frais prévisibles seront, de par leur nature, remboursables en vertu de l'article 165. Les travaux prévus constituant bel et bien des travaux d'entretien courant du domicile, il y a lieu d'acquiescer à cette demande. Le travailleur pourra donc faire exécuter ceux-ci au cours d'une année où le maximum prévu par la loi n'aura pas été atteint et en réclamer le remboursement à la CSST: Lebrun et Ville de Sept-Iles, 79061-04-9605, 97-03-27, P. Brazeau, (J9-02-05); Benoît et Produits électriques Bezo ltée, 144924-62-0008, 01-02-13, R.-L. Beaudoin.

La CLP ne peut disposer à l'avance et de façon exécutoire du droit du travailleur au remboursement de frais éventuels susceptibles d'être engagés pour les années à venir. Ces frais n'ont évidemment pas encore fait l'objet d'une réclamation à la CSST et n'ont pas non plus été engagés pour faire effectuer les travaux de déneigement: Ouellet et Excavation Leqel 1993 ltée, 144557-03B-0008, 01-02-13, P. Brazeau.

La travailleuse demande de déclarer, puisqu'elle répond aux critères de la loi, qu'elle a droit au remboursement des frais d'entretien courant de son domicile, s'ils sont engagés. Cela revient à dire qu'elle demande au tribunal une déclaration de principe indiquant que les frais prévisibles seront, de par leur nature, remboursables en vertu de l'article 165. Or, le tribunal ne peut disposer à l'avance et de façon exécutoire du droit de la travailleuse au remboursement de frais éventuels, susceptibles d'être engagés pour les années à venir. S'il le faisait, ce serait assimilable à rendre un jugement déclaratoire, alors que la CLP ne possède pas la compétence pour rendre de tels jugements: Lamontagne et C.L.S.C. Samuel de Champlain, 175805-62-0112, 04-01-07, É. Ouellet.

Le tribunal ne peut rendre un jugement déclaratoire sur les remboursements auxquels le travailleur pourrait avoir droit au cours des années à venir. Comme ces frais pour la tonte du gazon n'ont pas fait l'objet d'une réclamation à la CSST, il ne peut en disposer à l'avance: Duciaume et Entrepreneur Minier CMAC inc. (Mine), 2011 QCCLP 3777.

Bien que, selon la jurisprudence, la CLP ne peut disposer à l'avance et de façon exécutoire du droit du travailleur au remboursement de frais éventuels ou encore qu'elle n'a pas à rendre de jugement déclaratoire, il convient, en l'espèce, de retourner le dossier à la CSST afin que celle-ci évalue si les soumissions reçues peuvent servir de base au remboursement éventuel auquel le travailleur aura droit lorsqu'il fera exécuter les travaux que le tribunal autorise et en supportera les coûts ou si de nouvelles soumissions pourront être exigées. Par ailleurs, dans tous les cas, le travailleur devra faire exécuter les travaux et en payer les coûts pour ensuite demander le remboursement à la CSST: Marcotte et Olymel St-Hyacinthe, 2011 QCCLP 5521.


« qu'il effectuerait normalement lui-même »

Le travailleur effectuait le déneigement avant son accident du travail. Le fait qu'il ait eu recours à un entrepreneur en déneigement durant un certain temps n'enlève en rien sa capacité de faire lui-même son déneigement comme il était en mesure de le faire avant sa lésion professionnelle. Ce fait ne peut constituer un élément qui empêche l'application de l'article 165. Même une interprétation littérale de cet article permet d'établir le droit du travailleur d'être indemnisé pour ses frais engagés, puisque le temps du verbe utilisé (effectuerait) par le législateur signifie que l'on doit s'enquérir si oui ou non il aurait pu effectuer cette tâche avant qu'il soit atteint des séquelles résultant de son accident l'empêchant de le faire. Par conséquent, le travailleur a donc droit au remboursement des frais de déneigement: Landry et Thiro ltée, 158556-02-0104, 01-09-14, R. Deraiche.

Le déneigement d’un toit en hiver au Québec constitue un travail d’entretien courant puisqu’il s’agit d’une tâche habituelle et ordinaire même si sa fréquence est d’une importance relative. Quant au fait que ces travaux doivent être des travaux que le travailleur «effectuerait normalement lui-même si ce n’était de sa lésion», le législateur a utilisé le verbe «effectuer» au conditionnel et non à l’imparfait. Ainsi, la preuve doit plutôt démontrer ce qui se serait passé dans l’éventualité où le travailleur ne s’était pas blessé, et non pas systématiquement et uniquement ce qu’il faisait auparavant: Bacon et General Motors du Canada ltée, [2004] C.L.P. 941.

Après la survenance de sa lésion professionnelle, le travailleur, qui demeure avec des limitations fonctionnelles incompatibles avec l'exécution de la tonte du gazon, se procure une nouvelle résidence. La CSST lui refuse le remboursement de la tonte du gazon puisqu'il n'effectuait pas cette tâche auparavant, n'ayant pas de gazon à couper. Or, lorsqu'elle interprète le terme «effectuerait normalement lui-même», l'instance de révision ajoute à ce conditionnel une seconde condition, c'est-à-dire que le travailleur devait accomplir les travaux antérieurement à la lésion professionnelle. Donner un tel sens à l'article 165 c'est en réduire la portée d'une façon inacceptable. Aux fins de déterminer si cet article s'applique, il faut essentiellement se demander si le travailleur, dans l'hypothèse où il n'aurait pas subi de lésion professionnelle, effectuerait lui-même les travaux: Huard et Huard, 222161-31-0311, 04-02-12, P. Simard.

À la suite d'une lésion professionnelle survenue en novembre 1967, la travailleuse conserve une atteinte permanente grave. Elle a droit au remboursement du déneigement du toit de sa résidence puisqu'il n'y a aucune preuve permettant d'écarter les propos de la travailleuse voulant qu'elle aurait elle-même effectué, ou du moins accompli en partie, les travaux de déneigement du toit de son domicile: Ladora et Hôpital Rivière-des-Prairies, 236685-64-0406, 04-11-17, T. Demers.

Différentes circonstances peuvent faire en sorte qu'au moment de la survenance de la lésion professionnelle le travailleur n'effectuait pas certains travaux d'entretien. Cette situation n'est cependant pas figée dans le temps: cela n'implique pas nécessairement que plus tard il ne les aurait pas effectués. Il faut simplement tenir compte des circonstances propres à chaque affaire. Il est question dans l'article 165 des «travaux d'entretien courant de son domicile qu'il effectuerait normalement lui-même si ce n'était de sa lésion», et non pas de ceux «qu'il effectuait normalement lui-même au moment de sa lésion». D'autre part, la loi prévoit la réparation des conséquences qu'entraîne une lésion professionnelle, lesquelles conséquences peuvent évidemment varier dans le temps. Il s'avère essentiel, dans l'appréciation du droit d'un travailleur en regard de l'article 165, de ne pas se limiter à la seule situation qui prévalait lors de la survenance de la lésion professionnelle. La question qui doit toujours être posée est la suivante: le travailleur effectuerait-il normalement ces travaux lui-même si ce n'était de sa lésion professionnelle? En l'occurrence, il s'avère que le travailleur s'occupait déjà de l'entretien de la pelouse lorsqu'il était à la maison, qu'il serait maintenant à la retraite et à la maison en permanence et qu'il s'occuperait donc de l'entretien de la pelouse en exclusivité pendant toute la saison, si ce n'était des séquelles importantes de sa lésion professionnelle. Il a donc droit au remboursement des frais engagés pour faire exécuter les travaux d'entretien de la pelouse de son domicile: Aubut et Construction L.F.G. inc., 248654-01C-0411, 05-02-18, L. Desbois.

Le déneigement du domicile constitue une tâche nécessaire à l'entretien courant du domicile et le travailleur présente une atteinte permanente grave. Bien qu'il soit admis que le travailleur n'effectuait pas lui-même le déneigement de ses lieux de résidence antérieurs puisque ce service était offert par les propriétaires, il est crédible lorsqu'il déclare qu'il effectuerait lui-même cette tâche à sa nouvelle résidence étant donné que le même service n'est pas inclus dans le bail. Par ailleurs, le fait de déneiger le stationnement ainsi que les voies d'accès d'un domicile contrevient à ses limitations fonctionnelles. Il a donc droit au remboursement des frais pour le déneigement de son domicile: Gauthier et Services Yott ltée (fermé), 2011 QCCLP 2859.

Remboursement

Le travailleur a droit au remboursement total de tous les frais engagés pour les travaux d'entretien courant de son domicile, notamment la pose de moustiquaires, la réparation des gouttières, sortir et installer le patio ainsi que le ménage de la remise. La CSST ne pouvait refuser le remboursement de certains frais car l'article 165 ne prévoit pas de date ou d'époque à laquelle un travailleur peut faire exécuter de tels travaux, et encore moins le nombre de fois ou l'intervalle à laquelle il peut les faire exécuter. La seule exigence prévue par cet article est que le travailleur démontre que ces frais ont été engagés par la production de pièces justificatives: Babeu et Boulangeries Weston Québec ltée, 166478-62B-0108, 03-01-16, N. Blanchard, (02LP-177).

Lorsque le droit à la réadaptation sociale est acquis et qu’il est jugé qu’un travailleur a droit au remboursement des frais d’entretien courant de son domicile, ceux-ci doivent être remboursés au complet, le texte de l’article 165 étant sans équivoque sur cette question. La CSST doit rembourser les frais engagés et non pas une fraction de ceux-ci selon l’évaluation arbitraire qu’elle peut en faire. La seule limite édictée à cet article est le montant maximum de frais par année et c'est ce qui doit être respecté: Tremblay et Centre de santé des Nord-Côtiers, 252181-09-0501, 05-07-12, L. Boudreault.

En vertu de l’article 165, le travailleur qui conserve un atteinte permanente grave a droit au remboursement des frais qu’il engage pour faire exécuter les travaux d'entretien courant de son domicile parce qu'il est incapable d’effectuer ces travaux lui-même. Les conditions imposées par la CSST, plus particulièrement celle relative à l’exécution des travaux par des «entrepreneurs établis», ne sont pas prévues à cet article et la CSST a donc ajouté ces conditions au texte de la loi. Le travailleur peut donc retenir les services de quiconque et doit ensuite produire des factures ou des reçus originaux sur lesquels apparaissent la description de ces travaux ainsi que les cordonnées des personnes qui les ont effectués. La CSST peut exercer les pouvoirs d’enquête que la loi lui donne si elle a de bonnes raisons de douter de la validité ou de la véracité des factures ou des reçus qui lui sont présentés. Elle n’est cependant pas habilitée à imposer au travailleur des conditions ou des exigences qui n’ont pas été prévues par le législateur et qui ont pour effet de limiter l’exercice de ses droits: Millaire et Sport motorisé Millaire inc., 252156-64-0412, 05-11-14, F. Poupart, (05LP-202).

Le travailleur a droit au remboursement des frais engagés pour la peinture intérieure de son domicile. Cependant, s’il décide de faire effectuer les travaux par un particulier, il aura droit à un remboursement maximal de 1000 $ pour le rez-de-chaussée et de 1000 $ pour le sous-sol, et ce, sur présentation d'une facture payée comportant une description des travaux et les coordonnées de la personne qui les a effectués. Si les travaux sont plutôt exécutés par un entrepreneur inscrit, les montants remboursés sur présentation d'une facture acquittée seront respectivement de 2640 $ et de 2200 $, ce qui correspond au coût de la soumission la moins élevée. La CSST devra tenir compte du montant maximal annuel prévu par la loi pour les travaux d'entretien courant: Saulnier et Norcast inc., 410967-01A-1005, 10-09-28, N. Michaud.

La CSST a autorisé le remboursement de la somme de 1 900 $ au travailleur pour des travaux de peinture. Elle a cependant commis une erreur puisque, pour cette année-là, elle lui avait déjà remboursé la somme de 1 875 $ pour d'autres travaux. Elle n'aurait donc dû accepter que le remboursement de la somme de 961 $. Constatant son erreur, la CSST a rendu une décision de reconsidération. D'autre part, la demande du travailleur de reporter les 939 $ restants à l'année suivante ne peut être accordée. En effet, les travaux de peinture pour lesquels le travailleur fait sa réclamation ont été effectués au cours d'une année et cette dépense doit être comptabilisée dans la même année. Le législateur n'a prévu aucune réserve afin de transférer les sommes non utilisées une année à une année suivante. Ce dernier n'a pas prévu de verser automatiquement chaque année un montant forfaitaire pour les frais reliés aux travaux d'entretien du domicile. En effet, en écrivant, à l'article 165, «jusqu'à concurrence de», on doit comprendre que la CSST peut verser moins, mais pas plus, que le montant maximal: Desroches et Astenjohnson inc., 395919-62C-0912, 10-10-12, M. Gagnon Grégoire.

Soumission

La CSST peut exiger des soumissions

Le tribunal ne souscrit pas à une certaine jurisprudence suivant laquelle la CSST ne peut exiger de soumissions préalables du travailleur au motif que la loi ne le prévoit pas. En effet, il est approprié, sur le plan administratif, de demander de telles soumissions afin d'éviter des abus et des coûts astronomiques que la CSST serait autrement tenue de payer moyennant la simple production d'une facture ou d'un reçu, et ce, bien que la loi ne l'exige pas. La CSST est chargée de l'administration du régime et, à ce titre, elle doit gérer adéquatement les deniers publics: Saulnier et Norcast inc., 410967-01A-1005, 10-09-28, N. Michaud.

La CSST ne peut exiger des soumissions

Le travailleur est allé au-delà des conditions prévues à l’article 165 en fournissant des estimations à la CSST, puisque cet article ne l’exige pas. Si le législateur avait prévu de telles estimations, il l’aurait mentionné spécifiquement, comme il l’a fait dans d’autres articles. Par ailleurs, un travailleur n’a pas à obtenir l'autorisation préalable de la CSST pour engager des frais concernant les travaux d’entretien courant de son domicile. Tout ce qu’il a à faire, c’est de lui fournir des factures démontrant que les travaux ont été faits, à moins qu’il veuille, avant d’engager des frais, vérifier si tel ou tel travail est un travail d’entretien courant du domicile: Babeu et Boulangeries Weston Québec ltée, 166478-62B-0108, 03-01-16, N. Blanchard, (02LP-177).

La CSST ne pouvait exiger des soumissions du travailleur, car l’article 165, contrairement aux articles 154 et 155, n’oblige nullement le travailleur à fournir deux soumissions pour des travaux d’entretien courant du domicile. Sa seule obligation est de fournir la preuve que les travaux représentent effectivement des travaux d’entretien courant du domicile et que des sommes ont effectivement été payées pour de tels travaux: Bastien et CHSLD Plateau Mont-Royal, 226220-71-0401, 04-07-15, L. Couture, (04LP-320).

Le tribunal, qui doit tendre vers la cohérence décisionnelle, n'a aucune raison de s'écarter de la jurisprudence quasi unanime concluant que la CSST ne peut exiger la production de soumissions, laquelle s'appuie sur des motifs sérieux. Ainsi, le travailleur n'avait pas à faire parvenir à la CSST, avant l'exécution des travaux d'entretien courant du domicile, deux soumissions détaillées d'entrepreneurs différents indiquant les services à rendre ainsi que les numéros d'enregistrement à des fins fiscales: Gilles Marticotte et Fermes St-Vincent inc., 401664-01B-1002, 10-11-10, J.-F. Clément.

Le travailleur n'est pas obligé de présenter des soumissions à la CSST et cette dernière ne peut exiger que les travaux de tonte de la pelouse soient effectués par un entrepreneur en règle. Il doit remettre à la CSST des pièces justificatives qui font état des travaux accomplis et des personnes qui les ont effectués: Loparis et Maisons Bellevue inc., 2011 QCCLP 4156.

Divers

Le travailleur a droit au remboursement des frais de déneigement pour les années postérieures à sa lésion professionnelle survenue en 1996. Les limitations fonctionnelles qu'il conserve sont incompatibles avec les exigences requises pour déneiger sa cour. Ce n'est pas parce que la conjointe du travailleur a payé les coûts d'un contrat de déneigement, pour l'année 1995-1996, que l'on doit considérer qu'elle ou le travailleur aurait continué à donner des contrats de déneigement pour les années subséquentes. Une telle interprétation est trop restrictive et ne respecte pas l'intention du législateur, soit de réparer les conséquences d'une lésion professionnelle: Joly et Hydro-Québec, 121158-62B-9908, 00-05-31, D. Lampron.

L'expression «entretien courant» ne réfère pas à un entretien journalier ou habituel; il faut plutôt analyser le mot «courant» en contradiction avec quelque chose d'exceptionnel. L'entretien courant peut s'étaler sur plusieurs mois, voire plusieurs années. Les travaux pour lesquels le travailleur demande le remboursement, soit ceux relatifs au bois de chauffage, ont été exécutés afin de maintenir en bon état son domicile et la nature même de ces travaux est habituelle, ordinaire et banale. Il a droit au remboursement des frais relatifs au bois de chauffage: Pelletier et CSST, 145673-08-0008, 01-09-25, S. Lemire.

Le fait que les travaux de peinture et de vernissage des planchers de bois franc soient requis au moment de l’acquisition d’une nouvelle résidence ne modifie pas la nature de ces travaux. Même s’ils sont exécutés à l’occasion de l’aménagement du nouveau domicile, ils visent toujours le maintien en bon état de ce domicile. L’article 165 n’a pas créé d’exclusion pour le cas d’un nouveau domicile et la CLP privilégie une interprétation favorable au travailleur. Le travailleur a donc droit au remboursement de ces frais jusqu’à concurrence du montant autorisé en vertu de l’article 165 pour l’année 2000: Ouimet et Revêtements Polyval inc., 157104-61-0103, 01-09-26, L. Nadeau, (01LP-108).

Les travaux de réparation et de teinture des galeries du domicile constituent des travaux d'entretien courant et non pas des frais de rénovation. Le travailleur a donc droit au remboursement des frais relatifs à la main-d'oeuvre pour les exécuter: Lavoie et Entreprises Labranche et fils inc., 227074-08-0402, 04-05-26, Monique Lamarre.

Le terme «domicile» apparaissant à l'article 165 inclut le bâtiment principal et le terrain sur lequel il est érigé, dans la mesure où le travailleur est responsable de l'entretien courant de ce terrain. Ainsi, la peinture d'une clôture et le remplacement de quelques planches abîmées font partie de l'entretien courant du domicile: Poitras et Canadian Tire cie inc, 342136-62C-0803, 09-05-06, M. Auclair.

Le travailleur demande le remboursement des frais engagés pour le maintien et l'entretien des animaux de sa ferme expérimentale ainsi que des bâtiments utilisés à cette fin et adjacents à son domicile. Bien que l'article 152 contienne une énumération non limitative des mesures de réadaptation autorisée par la loi, au paragraphe 5 de cet article, le législateur a expressément traité du coût des travaux d'entretien du domicile. S'il avait voulu élargir le droit au remboursement à d'autres frais, il l'aurait précisé. Son silence suggère qu'il a délibérément voulu limiter le droit au remboursement des frais de cette nature aux travaux d'entretien courant du domicile, choisissant ainsi d'exclure les autres frais. Au surplus, si le remboursement des frais de la main-d'oeuvre requise pour l'exploitation de la ferme du travailleur était autorisé, ce dernier bénéficierait d'une forme d'enrichissement, ce qui est contraire à l'objet de la loi. Par ailleurs, les frais dont le travailleur demande le remboursement ne sont pas reliés directement à l'entretien courant du domicile. Par conséquent, il n'a pas droit au remboursement demandé: Picard et Abitibi Consol Scierie des Outardes, 2011 QCCLP 5070.