Contestation de l'atteinte permanente et des limitations fonctionnelles par la CSST lorsqu'elle a rendu une décision initiale sur ces sujets à la suite de l'avis du médecin du travailleur
Sur réception du rapport du médecin traitant, la CSST reconnaît l'existence d'une atteinte permanente et de limitations fonctionnelles. Cette décision est devenue finale. La CSST ne peut ensuite, par le biais de l'article 204, contourner cette décision en utilisant la procédure d'évaluation médicale: Brûlé et La Crémière, 72698-60-9508, 97-10-09, N. Lacroix (décision accueillant la requête en révision); Thériault et Concordia Protective Covering inc., 93741-63-9801, 99-06-15, H. Thériault, (99LP-77).
La CSST ne peut reconsidérer une décision rendue à la suite de l'avis du médecin du travailleur lui reconnaissant une atteinte permanente et soumettre le dossier au BEM d'autant plus que, lors de la décision initiale, elle avait déjà en sa possession l'avis de son médecin infirmant celui du médecin du travailleur: Lamoureux et Les industries Poly inc., 91058-60B-9709, 98-06-26, J.-M. Dubois.
La CSST entérine l'avis du médecin du travailleur et lui reconnaît une atteinte permanente de 15,60%. Elle demande en même temps que le travailleur soit examiné par le médecin qu'elle désigne. Le dossier est ensuite transmis au BEM qui modifie le diagnostic et déclare qu'il n'y a pas d'atteinte permanente ni de limitations fonctionnelles, avis que la CSST entérine. La CSST a fait erreur en rendant sa décision initiale concernant l'atteinte permanente. Cependant, elle ne pouvait la corriger, les délais et les conditions prévus pour l'application de l'article 365 n'étant pas rencontrés. La décision donnant suite à l'avis de l'arbitre est une reconsidération illégale de la décision initiale: Dancause et Les filatures Ormspun inc., 102968-62C-9807, 99-02-12, R. Hudon.
À la suite du rapport final du médecin du travailleur, la CSST rend une décision reconnaissant une atteinte permanente de 8% au travailleur et une autre décision lui donnant droit à la réadaptation. Ces décisions ne sont pas contestées. À la demande de l'employeur, le dossier est transmis au BEM qui modifie le diagnostic et le pourcentage de l'atteinte permanente, avis que la CSST entérine. Le BEM est limité dans sa compétence lorsqu'il ne peut y avoir litige en raison de décisions rendues liant tous les intervenants y compris la CLP. La décision de la CSST entérinant l'avis du BEM traite de questions ayant acquis le caractère de la chose jugée et est illégale: Fortier et Q-Zip inc., 107339-73-9811, 99-09-30, P. Perron.
Il est nécessaire que l'un des éléments prévus à l'article 212 soit infirmé par l'avis du médecin de la CSST pour transmettre le dossier au BEM
La CSST ne peut, par le biais de la procédure d'évaluation médicale devant le BEM, remettre en cause l'un des éléments prévus à l'article 212 qui n'est pas infirmé par le médecin de la CSST. Même si l'article 221 permet au BEM de donner son avis sur l'un de ces éléments lorsque le médecin du travailleur, celui de l'employeur ou celui de la CSST ne se sont pas prononcés sur le sujet, en l'espèce, les médecins concernés s'étaient prononcés sur les éléments pertinents de l'article 212 et le BEM ne pouvait s'en saisir à défaut d'une contestation de l'un ou l'autre de ces éléments: Huaracha et Riviera Fur Styles inc., 118441-73-9906, 00-01-07, D. Taillon; Courcelles et Gazette (The), 126795-72-9911, 00-03-31, R. Langlois; Blanchette et Pétroles J. C. Trudel inc., 132329-08-0002, 01-09-13, Monique Lamarre, (01LP-94); Morin et José & Georges inc., [2001] C.L.P. 443; Goderre et R. H. Nugent Équipement Rental ltée, 154843-07-0102, 01-12-06, P. Sincennes, (01LP-130); Gauthier et Ville de Shawinigan, [2005] C.L.P. 299.
Si le rapport du médecin de la CSST infirme l'une des conclusions du rapport du médecin du travailleur, cela suffit pour rendre valide la procédure devant le BEM dans sa totalité: Lapierre et Produits Aluminium CBC inc., 127080-64-9911, 00-08-22, D. Martin; Lévesque et Toitures P.L.C. inc., [2002] C.L.P. 823.
La CSST dirige le travailleur à un médecin désigné qui conclut au même diagnostic que le médecin du travailleur. La CSST demande ensuite une deuxième expertise. L'avis de ce deuxième médecin porte également sur le diagnostic, ce qui n'était pas remis en question par la CSST. L'article 204 ne permet pas à la CSST de soumettre le travailleur à des examens médicaux à répétition sur le même sujet. Cet article lui permet de diriger le travailleur vers un médecin de son choix pour obtenir l'opinion de ce médecin concernant des points litigieux pour, éventuellement, soumettre le dossier à l'appréciation du membre du BEM lorsqu'il y a discordance entre les conclusions du médecin du travailleur et celles formulées par le médecin désigné. Lorsque le médecin désigné en vertu de l'article 204 se prononce sur un sujet qui n'est pas contesté par la CSST, l'avis du BEM, basé sur une conclusion sur laquelle le médecin n'était pas consulté, devient erroné par le fait même. La CSST dispose, en vertu de l'article 204, d'un pouvoir suffisamment large mais il y a des circonstances où des limites doivent être déterminées. Ainsi, considérant que le BEM a fondé son opinion concernant la date de consolidation, l'existence et l'évaluation des atteintes permanentes et limitations fonctionnelles sur un diagnostic d'entorse lombaire plutôt que sur celui de hernie discale qui aurait dû être retenu, ses conclusions doivent être considérées comme erronées et la décision y faisant suite doit être déclarée nulle et sans effet. Le dossier est retourné à la CSST afin qu'elle le soumette au processus d'évaluation médicale conformément aux dispositions de la loi: Théberge et Servi-Logistix inc., 162223-62B-0106, 02-01-17, Y. Ostiguy.
L'article 221 ne permet pas à un membre du BEM de se prononcer sur l'un ou l'autre des sujets énoncés à l'article 212 alors qu'aucune conclusion médicale n'est infirmée à l'égard de l'un ou l'autre de ces sujets. Le but du processus d'évaluation médicale est de régler des litiges d'ordre médical. Lorsque aucune conclusion d'ordre médical n'est infirmée, la CSST est liée par les conclusions du médecin qui a charge du travailleur, elle n'a pas à s'adresser à lui pour qu'il complète un rapport complémentaire en vertu de l'article 205.1 et elle ne peut par la suite soumettre le tout au BEM: D'aoust et Toiture Qualitruss inc., 212070-07-0307, 04-02-24, M. Langlois.
Le BEM n’aurait pas dû se saisir de la question de l'atteinte permanente puisqu’il n’y avait pas contradiction entre les avis du médecin du travailleur et celui de la CSST. En effet, le médecin de la CSST concluait à l’absence d’atteinte permanente et le médecin du travailleur s’est rallié à cet avis dans son rapport complémentaire. Comme le BEM est là pour régler des litiges et non pour en créer, il y a lieu de retenir l’avis du médecin traitant confirmant celui du médecin désigné indiquant qu'il y a absence d’atteinte permanente: Les Carrelages Centre du Québec et Thibodeau, 230800-04-0403, 05-01-28, J.-F. Clément.
Ce n’est qu’en cas de contradiction que le BEM doit trancher un litige et rendre un avis qui devient liant au sens de l’article 224.1. Lorsqu’une telle contradiction est absente, il n’est pas nécessaire de recourir à l'évaluation par un membre du BEM. En pareil cas, l’avis du médecin qui a charge, confirmé par celui du médecin désigné, devient liant au sens de l’article 224: Mercier et Entreprises Diane Roy enr., 259298-08-0504, 06-02-24, J.-F. Clément.
Il ressort des articles 204 et 205.1 que la CSST ne peut soumettre le dossier d'un travailleur au BEM que si le rapport du médecin qu'elle a désigné infirme l'opinion du médecin qui a charge du travailleur sur l'un ou l'autre des sujets prévus à l'article 212, notamment les limitations fonctionnelles résultant de la lésion professionnelle. En l'espèce, les médecins concernés sont du même avis quant à l'existence d'une limitation fontionnelle chez la travailleuse, à savoir qu'elle ne peut retourner travailler chez l'employeur où elle avait subi du harcèlement: Lamarre et C.S. Brooks Canada inc., 276822-05-0511, 06-06-27, M. Allard.
Une condition est requise pour que la CSST puisse demander un avis à un membre du BEM: le rapport du médecin de la CSST doit infirmer le rapport du médecin de la travailleuse en ce qui concerne les limitations fonctionnelles. En l'espèce, les limitations fonctionnelles émises par ces deux médecins sont identiques, de sorte que la CSST ne pouvait soumettre le dossier au BEM: Gosselin et Maison Île Centre Convalescence inc., 287307-64-0604, 07-11-02, D. Armand.
La CSST ne pouvait utiliser la procédure d'évaluation médicale pour demander un avis au BEM relativement au diagnostic puisque le médecin désigné par la CSST n'infirmait pas les conclusions du médecin qui a charge à cet égard. En effet, il ressort des articles 204 et 205 que la CSST ne peut soumettre un dossier au BEM que si le rapport du médecin qu'elle désigne infirme l'opinion du médecin qui a charge sur l'un ou plusieurs des sujets prévus à l'article 212. Or, en l'espèce, une «discopathie lombaire avec herniation provoquée lors d'une discographie provocatrice au niveau L4-L5 et L5-S1» est sans contredit assimilable à une «hernie discale lombaire L4-L5 et L5-S1». La procédure étant irrégulière en ce qui a trait au diagnostic, le diagnostic ayant un caractère liant est celui de hernie discale lombaire L4-L5 et L5-S1 posé par le médecin qui a charge: Tokessy et Polymed Chirurgical inc., 301487-62C-0610, 07-12-07, M. Auclair, révision rejetée, 09-10-08, S. Di Pasquale.
La procédure d'évaluation médicale vise à trancher un litige d'ordre médical. Elle ne doit pas servir à créer des débats là où il n'y en a pas. En l'espèce, la CSST s'est prévalue de son droit de faire évaluer la travailleuse par un médecin qu'elle a désigné en vertu de l'article 204. Puisque les conclusions de ce médecin infirmaient celles du médecin traitant, la CSST a acheminé le dossier au BEM. Ce faisant, elle a fait fi du contenu du rapport complémentaire rempli par le médecin traitant dont elle avait pourtant reçu copie. Ce rapport changeait considérablement le débat puisqu'il établissait un consensus entre les deux médecins quant au diagnostic à retenir, soit celui de contusion lombosacrée sans radiculopathie associée. C'est donc irrégulièrement que le BEM s'est prononcé à ce sujet. Il en va de même quant aux soins et traitements puisque le médecin traitant partageait l'avis du médecin désigné quant au fait que la travailleuse n'avait pas à bénéficier de traitements supplémentaires. Les deux médecins s'entendaient également quant aux limitations fonctionnelles. Les seuls éléments demeurant en litige, et dont le BEM a été régulièrement saisi, sont la date de consolidation et l'atteinte permanente: Blais et Papineau international SEC, 326451-04-0708, 08-01-11, A. Quigley
La condition que le médecin désigné avait posée pour la levée des limitations fonctionnelles ne s’est jamais réalisée. Son opinion ne peut donc être considérée comme infirmant celle du médecin qui a charge concluant à l’existence de limitations fonctionnelles. En conséquence, l’avis du BEM et les décisions de la CSST sont irréguliers et le rapport d’évaluation médicale du médecin qui a charge lie toutes les parties:
Dubé et CSSS Richelieu Yamaska, 374431-62B-0904, 10-12-17, F. Daigneault.
Comme il n'existait plus de différend entre le médecin désigné et le médecin qui a charge sur la question de l'atteinte permanente et des limitations fonctionnelles, il n'y avait plus lieu de renvoyer le dossier au BEM. Le fait que le rapport complémentaire ait été reçu par la CSST plus de 30 jours après l'envoi du rapport du médecin désigné n'enlève rien à sa validité. La procédure d'évaluation médicale est irrégulière, car la CSST ne pouvait demander au BEM de se prononcer sur ces sujets. La CSST était liée par les conclusions du médecin qui a charge qui entérinait l'opinion du médecin désigné: Tremblay et Greenmar Intermodal inc.,2011 QCCLP 5886.
Il n'est pas nécessaire que l'un des éléments prévus à l'article 212 soit infirmé par l'avis du médecin de la CSST pour transmettre le dossier au BEM
Les articles 204 et 206 sont très clairs et ne nécessitent aucune interprétation. D'une part, la CSST peut soumettre au BEM les conclusions du rapport obtenu en vertu de l'article 204, sans que les conclusions du médecin traitant soient infirmées et, d'autre part, le BEM a toute latitude pour se prononcer sur les cinq composantes de l'article 212, même si le médecin traitant n'a pas statué sur l'ensemble de ces composantes: Herrera et Construction Albert Jean ltée, 110294-61-9902, 99-07-05, M. Denis.
La lecture des articles 204, 205.1, 206 et 221 démontre que la CSST peut obtenir un rapport sur toute question concernant la lésion. Le médecin traitant dispose de 30 jours pour envoyer ses commentaires si le rapport du médecin désigné par la CSST infirme l’une ou l’autre de ses conclusions selon l’article 205.1. De plus, l’article 206 accorde le droit à la CSST de soumettre au BEM le rapport qu’elle a obtenu en vertu de l’article 204 et même sur des sujets de l’article 212 sur lesquels le médecin qui a charge ne se serait pas prononcé. Ces articles confèrent un pouvoir plus large à la CSST que celui octroyé à l’employeur, par opposition. Au surplus, l’article 221 permet au BEM de se prononcer sur des questions qui ne lui auraient pas été soumises. En l’espèce, le médecin traitant avait coché sur son rapport final qu’il n’y avait pas d’atteinte permanente mais, du même souffle, il indique sur l’attestation que la travailleuse conserve une ankylose et lui donne des limitations fonctionnelles. Le médecin de la CSST était d’avis la travailleuse n’avait pas d’atteinte permanente ni de limitations fonctionnelles. La question de l’atteinte permanente est très liée à la question des limitations fonctionnelles et non seulement la CSST pouvait demander au BEM de se prononcer sur cette question mais il était pertinent de le faire dans le présent cas. La procédure suivie par la CSST est régulière: Rondeau et Société en commandite PH Entreprises, 125130-71-9910, 00-05-05, Anne Vaillancourt.
Après de multiples tentatives infructueuses pour obtenir du médecin du travailleur l'évaluation de ses séquelles, la CSST était en droit de désigner un médecin et par la suite de transmettre le dossier au BEM: Lavoie et Pétro Canada, 130338-73-0001, 01-01-11, J.-D. Kushner.
Lorsque le médecin du travailleur se rallie à l'opinion du médecin désigné par la CSST dans le rapport complémentaire en vertu de l'article 205.1, la CSST peut soumettre ces rapports au BEM ou bien rendre une décision conformément à l'article 224: Jakian et Howmet Cercast Canada inc., 171781-61-0111, 02-02-27, S. Di Pasquale.
Au moment où la CSST dirige le dossier au BEM après avoir fait examiner le travailleur par un médecin désigné, le médecin qui a charge ne s’est pas encore prononcé sur l’évaluation de l’atteinte permanente puisque aucun rapport d’évaluation médicale n’est encore produit au dossier. La CSST effectue donc ce renvoi au BEM conformément aux articles 206 et 217 et cette procédure est régulière puisque le législateur prévoit qu’elle peut être faite sans que le médecin qui a charge se soit prononcé: Renda et Pavage CSF inc., [2008] C.L.P. 122.
Lorsque la CSST décide de soumettre le dossier au BEM, elle doit soumettre tous les sujets contestés
NB : Voir la section 3.2.4.1.09 de ce titre sur l'obligation ou non pour la CSST de transmettre le dossier au BEM.
Lorsque la CSST choisit de soumettre le dossier au BEM, elle a l'obligation de lui soumettre l'ensemble des sujets contestés. En l'espèce, la CSST devait soumettre au BEM la question du diagnostic puisque celui du médecin qu'elle avait désigné infirmait celui posé par le médecin en charge du travailleur. Le processus d'évaluation médicale étant entaché d'une erreur, le dossier doit être retourné à la CSST afin que toutes les questions médicales soient soumises au BEM y compris celle du diagnostic: Huard et Fruits de mer Gascons ltée, 192228-01C-0210, 04-02-23, R. Deraiche.
Conformément aux dispositions de l'article 217, lorsque la CSST soumet au BEM les éléments de contestation entre les rapports médicaux du médecin qui a charge du travailleur et du médecin qu'elle a désigné, elle ne peut choisir quelle contestation elle veut soumettre, éliminant ainsi indirectement un diagnostic ou une autre conclusion contestée du médecin qui a charge du travailleur. La CSST ne peut escamoter ainsi le diagnostic posé par le médecin qui a charge en refusant de le soumettre au BEM: Place Aylwin My ltée et Paquette, 227923-62-0402, 05-02-14, R. L. Beaudoin.
Lorsque la CSST décide de soumettre le dossier au BEM, elle n'a pas l'obligation de soumettre tous les sujets contestés
La CSST a soumis au BEM les questions autres que le diagnostic, en précisant que le seul diagnostic d'entorse lombaire était reconnu. Le BEM a rendu son avis et la CSST a rendu une décision conforme à cet avis. La CSST était liée par les conclusions du médecin en charge du travailleur quant au diagnostic. Cependant, elle demeurait maître de reconnaître ou non la relation entre le diagnostic de hernie discale émis par le médecin qui a charge et la lésion professionnelle, ce qu'elle a fait en refusant de reconnaître cette relation, et cela, avant d'avoir obtenu un avis d'un médecin désigné sur la question. Ce médecin n'a pas retenu le diagnostic de hernie discale et la CSST aurait pu soumettre cette question au BEM. Elle ne l'a pas fait, ce qui emportait comme conséquence qu'elle ne pouvait nier l'existence de ce diagnostic chez le travailleur et était liée par celui-ci. Cependant, cela ne l'obligeait pas à reconnaître la relation entre ce diagnostic et la lésion professionnelle. De plus, la CSST pouvait soumettre au BEM une partie seulement du différend opposant le médecin en charge du travailleur et le médecin désigné. L'article 206 n'oblige pas la CSST à soumettre toutes les questions contestées au BEM. La procédure d'évaluation médicale est régulière: Jean et Serv. entretien distinction inc., 155009-71-0102, 04-04-26, T. Giroux, révision rejetée, 04-11-26, B. Roy.
La procédure prévue à l'article 204 ne peut servir à la CSST pour contourner les effets d'une décision finale de la CLP
La CSST ne peut se servir de la procédure prévue à l'article 204 pour contourner les effets d'une décision finale de la CLP qui reconnaissait un diagnostic de hernie discale à titre de lésion professionnelle: Panor et Garderie Expression inc., 127645-72-9911, 00-06-08, P. Perron.
La procédure prévue à l'article 204 ne permet pas à la CLP d'ordonner au travailleur de se soumettre à un examen médical
La CLP n’a pas la compétence pour ordonner au travailleur de se soumettre à un examen médical, que la demande provienne de l’employeur ou de la CSST. L'article 204 ne l’autorise pas à ordonner un examen médical dans le cadre d’une audience et n’accorde aucun pouvoir d’ordonnance à la CSST, mais lui attribue plutôt un pouvoir d’enquête: Tenuta et Centre de l'auto Boul. Industriel, [2006] C.L.P. 222, révision rejetée, 271039-61-0509, 07-08-30, A. Suicco.
La procédure prévue à l'article 204 ne permet pas à la CSST de soumettre le travailleur à des examens à répétition sur le même sujet
L'article 204 ne permet pas à la CSST de soumettre le travailleur à des examens médicaux à répétition sur le même sujet. Cet article lui permet de référer le travailleur à un médecin de son choix pour obtenir l'opinion de ce médecin concernant des points litigieux pour, éventuellement, soumettre le dossier à l'appréciation du membre du BEM lorsqu'il y a discordance entre les conclusions du médecin qui a charge et celles formulées par le médecin désigné. Lorsque le médecin désigné en vertu de l'article 204 se prononce sur un sujet qui n'est pas contesté par la CSST, l'avis du BEM, basé sur une conclusion sur laquelle le médecin n'était pas consulté, devient erroné par le fait même. La CSST dispose, en vertu de l'article 204, d'un pouvoir suffisamment large mais il y a des circonstances où des limites doivent être déterminées. Ainsi, considérant que le BEM a fondé son opinion concernant la date de consolidation, l'existence et l'évaluation des atteintes permanentes et limitations fonctionnelles sur un diagnostic d'entorse lombaire plutôt que sur celui de hernie discale, ses conclusions doivent être considérées comme erronées et la décision y faisant suite doit être déclarée nulle et sans effet. Le dossier doit être retourné à la CSST afin qu'elle le soumette au processus d'évaluation médicale conformément aux dispositions de la loi: Théberge et Servi-Logistic inc., 162223-62B-0106, 02-01-17, Y. Ostiguy.
La procédure prévue à l'article 204 ne permet pas à la CSST de soumettre la même question médicale à divers médecins désignés ainsi qu'à divers médecins du BEM
La CSST ne pouvait demander au BEM de se prononcer une deuxième fois sur la question de l'existence de limitations fonctionnelles car elle avait épuisé sa compétence sur ce sujet en entérinant un premier avis du BEM sur tous les sujets de l'article 212 et elle était donc functus officio. L'article 204 ne permet pas à la CSST de soumettre la même question médicale à divers médecins désignés, et ultimement à divers médecins du BEM, jusqu'à ce qu'elle obtienne la réponse qu'elle recherche: Groupe Alcan Métal Primaire et Dupéré, 289278-02-0605, 07-06-06, J. Grégoire, (07LP-48).
La CSST ne peut se servir d'un rapport d'évaluation médicale pour exclure des lésions pouvant être en relation avec une lésion professionnelle
La CSST ne peut se servir d'un rapport d'évaluation médicale pour exclure des lésions pouvant être en relation avec une lésion professionnelle, sans d'abord se prononcer explicitement par une décision écrite, ainsi que le prévoit l'article 354. Par ailleurs, si la CSST voulait contester le pourcentage attribué par les médecins qui ont eu charge du travailleur, elle n'avait qu'à désigner un médecin, selon l'article 204. La CSST ne peut donc faire indirectement ce qu'elle ne peut faire directement, et c'est à bon droit que le travailleur a exercé son droit de contestation: Rioux et Gosselin Express ltée, 244084-03B-0409, 05-02-25, R. Savard.
La CSST peut demander à son médecin désigné de préciser ou de corriger son rapport médical
La procédure d'évaluation médicale n'est pas irrégulière. La CSST était fondée de demander à son médecin désigné de préciser et même de corriger son rapport médical puisqu'il n'avait pas donné son avis sur les questions posées dans le cadre du mandat confié: Cyr et G. A. Boulet inc., 232968-04-0404, 05-05-20, S. Sénéchal, (05LP-45).
La CSST ne peut transmettre le dossier au BEM lorsque l'employeur s'est désisté de sa demande d'arbitrage
La procédure d'évaluation médicale est différente selon que c'est l'employeur ou la CSST qui entame la procédure. Lorsque c'est l'employeur, la CSST ne peut décider à sa place et elle doit, dans la mesure où les règles sont respectées, transmettre le dossier au BEM afin d'obtenir son avis. Lorsque c'est elle qui veut contester, elle doit obtenir une évaluation médicale de son médecin désigné, mais elle peut ensuite choisir de ne pas soumettre au BEM les rapports médicaux obtenus. En l'espèce, au moment où l'employeur s'est désisté de sa demande de soumettre le dossier au BEM, le médecin du travailleur maintenait, dans son rapport médical final, le diagnostic de hernie discale et ce rapport a été acheminé au médecin désigné de l'employeur. Par la suite, l'employeur s'est aussi désisté de sa contestation devant la CLP de la décision qui reconnaissait l'admissibilité de la hernie discale. Ainsi, compte tenu du désistement de l'employeur, la CSST ne devait pas poursuivre la procédure d'évaluation médicale. Il ne lui appartient pas de décider à la place de l'employeur s'il y a lieu ou non de poursuivre la contestation des aspects médicaux de la lésion. Si la CSST désirait contester un des aspects médicaux, elle devait le faire en obtenant un rapport médical d'un médecin qu'elle désigne, ce qu'elle n'a pas fait. Après avoir reconnu dans une décision d'admissibilité le nouveau diagnostic de hernie discale, elle ne pouvait pas remettre en question ce diagnostic par le biais de la procédure d'évaluation médicale dont s'était désisté l'employeur. En l'absence de procédure d'évaluation médicale valablement faite, ce sont les conclusions médicales du médecin qui a charge qui sont liantes: Carrier et Garage M. Beauchesne, 289907-04B-0605, 06-08-09, D. Lajoie.