LoiLATMP
TitreVI PROCÉDURE D'ÉVALUATION MÉDICALE: ART. 199 À 233 ET 448 ET SUIVANTS
Section4. Le cheminement au BEM et l'avis du BEM: art. 216 à 223 et 225
4.2 L'avis du BEM: art. 220 à 223 et 225
4.2.4 Procédure d'évaluation médicale irrégulière
Titre du document4.2.4 Procédure d'évaluation médicale irrégulière
Mise à jour2011-11-01


NB : Voir les sections 3.2.2 et 3.2.3 de ce titre concernant la contestation par l'employeur et par la CSST du rapport du médecin du travailleur.

Absence de contestation sur un des sujets prévus à l'article 212

Le membre du BEM s'est prononcé sur le diagnostic alors qu'il ne devait pas le faire, le médecin traitant étant d'accord avec l'avis du médecin désigné sur ce sujet. Considérant que le diagnostic est déterminant pour évaluer la date de consolidation, la nécessité des soins ainsi que l'atteinte permanente et les limitations fonctionnelles, et que le membre du BEM ne se prononce pas sur les conséquences des diagnostics qui lient les intervenants, son avis est irrégulier et la décision de la CSST qui en découle est illégale: Lecompte et Action Chevrole Oldsmobile inc., [2003] C.L.P. 312.

Le membre du BEM s'est prononcé sur le diagnostic alors qu'il ne devait pas le faire, le diagnostic de hernie discale introduit au dossier par les médecins du travailleur n'ayant pas été contesté et liant la CSST. L'employeur ne désirait contester que la date de consolidation et l'existence de limitations fonctionnelles mais son rapport faisait état d'un diagnostic erroné d'entorse lombaire et, au surplus, le formulaire que la CSST a utilisé pour soumettre le dossier au BEM indiquait faussement que la contestation de l'employeur portait sur tous les sujets prévus à l'article 212. En conséquence, l'avis du membre du BEM était irrégulier et les décisions donnant suite à cet avis doivent être annulées, constituant de plus une reconsidération illégale de décisions rendues antérieurement: Proulx et Action Ford ltée, 187083-07-0206, 03-09-03, F. Poupart.

Lorsque le médecin désigné et le médecin qui a charge sont d’accord sur certains éléments prévus à l’article 212, il n’y a aucune raison de «judiciariser médicalement» ces sujets qui font l’unanimité et de demander un avis au BEM. En l'espèce, seule la question des soins pouvait faire l'objet d'une référence au BEM car les deux médecins se sont prononcés de façon identique sur l'ensemble des autres éléments médicaux: Gauthier et Ville de Shawinigan, [2005] C.L.P. 299.

Avis antérieur du BEM sur le même sujet

Le BEM peut se prononcer à nouveau

La CSST peut, malgré une décision rendue à la suite d'un avis d'un membre du BEM sur un diagnostic, statuer à nouveau sur la relation entre un diagnostic évolutif et l'événement et elle doit le faire puisque la condition du travailleur devient alors tout autre. En l'espèce, la seconde procédure d'évaluation médicale engagée par l'employeur demeure régulière, et ce, même si elle a été entreprise après le désistement, produit par l'employeur, à l'encontre de la décision rendue par l'instance de révision portant sur l'avis du premier membre du BEM reconnaissant un diagnostic de tendinite traumatique de l'épaule gauche à titre de lésion professionnelle. L'ajout par le médecin qui a charge d'un diagnostic de bursite sous-acromiale sous-deltoïdienne à l'épaule gauche après cette décision de l'instance de révision justifie que l'employeur puisse en contester la validité par la procédure d'évaluation médicale. L'article 212 ne requiert de l'employeur que l'obtention, par un professionnel de la santé, d'un rapport qui infirme les conclusions du médecin qui a charge quant à un sujet prévu à cet article, et ce, après avoir examiné un travailleur, ce qui a été fait en l'instance. La CSST devait donc soumettre ces rapports au BEM, comme le prévoient les articles 212.1 et 217. Ainsi, le second membre du BEM devait se saisir et disposer du diagnostic de bursite sous-acromiale sous-deltoïdienne émis par le médecin qui a charge, diagnostic contesté par le médecin de l'employeur: Hôpital du Sacré-Coeur de Mtl et Baldi, 283760-64-0603, 07-03-14, R. Daniel.

Le BEM ne peut se prononcer à nouveau

Le BEM ne peut se prononcer sur le diagnostic d'une lésion professionnelle lorsque ce sujet a déjà fait l'objet d'un premier avis du BEM entériné par une décision non contestée de la CSST: Therrien et Société des alcools du Québec, [1995] C.A.L.P. 986; Centre de soins prolongés de Montréal et Deokie, 125470-71-9910, 00-09-22, M. Zigby; Controlnet et Service d'entretien d'immeubles inc. et Martin, 162889-07-0105, 03-07-10, M. Langlois

La CSST ne pouvait demander au BEM de se prononcer une deuxième fois sur la question de l'existence de limitations fonctionnelles car elle avait épuisé sa compétence sur ce sujet en entérinant un premier avis du BEM sur tous les sujets de l'article 212 et elle était donc functus officio. L'article 204 ne permet pas à la CSST de soumettre la même question médicale à divers médecins désignés, et ultimement à divers médecins du BEM, jusqu'à ce qu'elle obtienne la réponse qu'elle recherche: Groupe Alcan Métal Primaire et Dupéré, 289278-02-0605, 07-06-06, J. Grégoire, (07LP-48).

Une fois que le BEM s’est prononcé sur l’un des points prévus à l’article 212, la seule façon de remettre en cause un de ces éléments est de contester, conformément à l’article 358, la décision qui fait suite à cet avis. Permettre au BEM de se prononcer à nouveau sur un sujet visé par l’article 212 aurait pour effet de reprendre autant de fois qu’une partie le désire le débat sur l’une des conclusions médicales. En l'espèce, l’avis du second membre du BEM est donc irrégulier quant au diagnostic: Métoplus inc. et Racine, 350714-31-0806, 09-06-22, A. Quigley, (09LP-51).

Délai pour demander l'avis du BEM

Le délai de neuf mois qui s'est écoulé avant que la CSST ne demande de nouveau un avis au BEM, en février 2010, basé sur la même expertise médicale que lors de la demande ayant conduit à l'avis d'août 2009, combiné à l'omission d'actualiser le dossier à la suite de la réception des documents attendus, constitue une injustice et un motif supplémentaire pour conclure à l'irrégularité du processus d'évaluation médicale. La procédure d'évaluation médicale ayant mené à l'avis du BEM produit en mars 2010 est irrégulière. En conséquence, les décisions qui ont suivi sont déclarées nulles et sans effet: Gagné et Automobiles St-Charles, 2011 QCCLP 2667, [2011] C.L.P. 32.

Désistement de la procédure de contestation par l'employeur

En raison du désistement de l'employeur de sa contestation devant le BEM, la CSST ne pouvait poursuivre la procédure d'évaluation médicale. Elle ne pouvait décider à la place de l'employeur. Si la CSST voulait contester un des aspects médicaux du dossier du travailleur, elle devait le faire selon les prescriptions énoncées aux articjles 204 et 205.1. Le désistement de l'employeur fait en sorte qu'il n'y a plus de contestation d'ordre médical. La procédure d'évaluation médicale est donc irrégulière tout comme les décisions de la CSST rendues à la suite de l'avis du BEM: Vêtements S. & F. Canada ltée et Uch, 282812-64-0602, 07-09-19, S. Moreau.

Erreur du médecin de la CSST sur le diagnostic

La CSST accepte un diagnostic de hernie discale à titre de lésion professionnelle à la suite de l'avis de son médecin. Le lendemain, ce médecin modifie son avis et recommande que le travailleur soit examiné par un médecin désigné conformément à l'article 204. Le dossier est ensuite transmis au BEM qui ne retient pas le diagnostic de hernie. La CSST modifie alors sa décision initiale et refuse la réclamation du travailleur. La procédure qui a mené à l'avis du BEM ne respecte pas l'esprit de la loi. En effet, il est clair et manifeste que la CSST avait en main tous les éléments nécessaires pour rendre une décision éclairée lorsqu'elle a décidé d'accepter le diagnostic de hernie discale. C'est elle qui devait rendre la décision et elle devenait functus officio après l'avoir rendue. Le bureau médical de la CSST n'est pas une autre instance et le fait que le médecin de ce bureau n'ait pas consulté le dossier avant d'émettre son premier avis ne constitue pas un motif permettant d'enclencher le processus d'évaluation médicale, lequel doit être rigoureusement respecté: Roudenko et Korum Design inc., 103460-72-9807, 99-05-26, L. Boudreault, (99LP-58).

Évaluation des séquelles à partir d'un diagnostic non reconnu par la CSST

Le BEM se prononce sur les séquelles permanentes à partir d'un diagnostic qui n'est pas celui reconnu par la CSST et alors que ce diagnostic ne fait l'objet d'aucune contestation devant lui. Ainsi, en rendant une nouvelle décision sur le diagnostic à la suite de cet avis, la CSST reconsidérait illégalement sa décision initiale puisque l'opinion du BEM ne constituait pas un fait nouveau donnant ouverture à la reconsidération: Michaud et Établissements de détention Québec, 108385-73-9812, 99-06-23, C.-A. Ducharme.

Évaluation des séquelles à partir d'un seul diagnostic reconnu par la CSST alors que le médecin en charge en a émis d'autres qui n'ont pas été écartés par la CSST

La CSST a demandé au BEM de se prononcer sur les séquelles reliées au seul diagnostic reconnu de fracture de la cheville. Il existe cependant plusieurs diagnostics au dossier émis par le médecin traitant. Il n'y a aucune décision écrite rendue conformément aux dispositions de l'article 354 ni même d'indication au dossier que la CSST aurait procédé à l'analyse de la relation causale entre ces diagnostics et la lésion professionnelle et aux conséquences de ceux-ci pour le travailleur. Le choix de la CSST de requérir l'avis du BEM plutôt que de rendre une décision sur la relation causale ne lui permet pas d'écarter des diagnostics et de priver ainsi les parties de l'exercice de leur droit de contestation en cas d'élimination d'un diagnostic émis par le médecin qui a charge: Sanchez et Service de main-d'oeuvre Président, 253136-71-0501, 06-06-16, F. Juteau.

Examen du travailleur par le médecin désigné par la CSST à la demande de son propre médecin

Le médecin du travailleur, ayant refusé de procéder lui-même à l'évaluation des séquelles, demande à la CSST de désigner un médecin pour le faire. La CSST acquiesce à cette demande au lieu de suggérer au travailleur le nom de médecins qui auraient pu procéder à cette évaluation et parmi lesquels il aurait pu choisir. La procédure d'évaluation médicale est irrégulière et les décisions rendues à la suite de l'avis du BEM doivent être annulées: Olson et Les Cheminées Gamelin, 150162-31-0011, 01-06-19, H. Thériault.

Examen du travailleur par un médecin spécialiste à la demande de son propre médecin

Le travailleur est examiné une fois par un médecin spécialiste à la demande de son médecin. Ce dernier se déclare par la suite d'accord avec les conclusions de ce médecin spécialiste. La CSST demande l'avis du BEM en opposant les conclusions du médecin spécialiste à celles du médecin qu'elle avait désigné. Puisque le médecin en charge du travailleur s'est déclaré d'accord avec l'opinion du médecin spécialiste consulté, les conclusions de ce médecin spécialiste sont devenues celles du médecin en charge du travailleur. La demande d'avis au BEM qui opposait l'opinion du médecin spécialiste et celle du médecin désigné par la CSST est donc régulière: Beauchamp et Morin Isolation & Toitures ltée, 268946-07-0508, 07-01-12, M. Langlois.

Membre du BEM devenu par la suite le médecin de la travailleuse

Le seul fait que le membre du BEM soit devenu le médecin de la travailleuse en octobre 2000, et ce, après avoir rendu son avis en mai 2000, n'invalide pas la procédure d'évaluation médicale même si le comportement de ce médecin peut être discutable sur le plan de l'éthique: Wal-Mart Canada inc. et Bélec, 148554-64-0010, 01-04-26, R. Daniel.

Membre du BEM ayant déjà agi comme médecin du travailleur

L'avis du membre du BEM est invalide et la décision de la CSST y faisant suite est annulée, et ce, dans l'intérêt de la justice et plus particulièrement de l'apparence d'impartialité. Le fait que le membre du BEM ait déjà rencontré le travailleur un an auparavant et produit une attestation médicale à la CSST quant au diagnostic, à titre de médecin qui a charge, laisse planer un doute quant à l'image de neutralité que doit afficher le BEM. Le dossier est retourné à la CSST afin qu'elle le soumette à un nouveau BEM: Joseph et Fabricants de Pasti.Fédéral ltée, 2011 QCCLP 606.

Nouvelle contestation par l'employeur à l'aide d'un rapport médical ayant déjà servi à une contestation antérieure.

Le fait pour l'employeur d'utiliser une deuxième fois un rapport qui avait déjà servi à une autre contestation n'invalide pas la procédure. L'article 212 requiert uniquement que l'employeur transmette, dans les 30 jours de la réception du rapport du médecin de la travailleuse, un rapport d'un médecin ayant examiné la travailleuse et qui arrive à des conclusions différentes: Marcoux et Hôpital Notre-Dame, 77462-60-9603, 97-07-07, S. Moreau.

Lorsqu’un employeur désire contester une nouvelle conclusion médicale du médecin traitant avec un rapport médical de son médecin qui est antérieur à celui contesté et qui se trouve déjà au dossier parce qu’il a servi à engager une première procédure d’évaluation médicale, il serait déraisonnable d’exiger qu’il doive nécessairement transmettre de nouveau ce rapport à la CSST. Le dernier paragraphe de l’article 212 doit se lire en faisant les adaptations qui s’imposent pour retenir que l’employeur peut simplement signifier à la CSST qu’il conteste le rapport médical du médecin traitant produit à une date donnée, et ce, en lui opposant un rapport médical déjà obtenu de son médecin et préalablement transmis: Lapointe et Pélican International inc., 237155-61-0406, 05-03-21, G. Morin, (04LP-275); Fortin et Administration portuaire de Montréal,[2005] C.L.P. 1296, révision rejetée, 227007-63-0402, 06-06-28, B. Lemay.

Obligation pour la CSST de transmettre le dossier au BEM pour trancher le diagnostic même si elle refuse la réclamation

Lorsque la CSST refuse une demande d'indemnisation pour une lésion professionnelle et que, de façon concomitante, l'employeur demande que le dossier soit envoyé au BEM, la CSST peut être justifiée de ne pas transmettre le dossier lorsque la demande porte sur la date de consolidation, la nécessité des traitements, l'atteinte permanente et les limitations fonctionnelles. Il s'agit de questions subsidiaires qui découlent de la reconnaissance d'une lésion professionnelle. Le diagnostic se trouve toutefois dans une situation à part. Il peut, par son identification, donner lieu à l'application des présomptions prévues aux articles 28 et 29 de la loi. Même si la CSST refuse de reconnaître l'existence d'une lésion professionnelle, elle doit tout de même donner suite à la demande de l'employeur et acheminer au BEM sa contestation portant sur le diagnostic posé par le médecin du travailleur: Labrie et Chemin de fer nationaux du Canada, 56389-60-9401, 95-09-28, Y. Tardif; Blais et Lacasse inc., 136818-62B-0004, 01-02-13, N. Blanchard.

Omission de la CSST de demander au BEM de se prononcer sur le diagnostic

L'employeur demande à la CSST de soumettre à l'arbitrage sa contestation sur le diagnostic, la consolidation et la durée des soins. L'arbitre se prononce uniquement sur la date de consolidation, la CSST ayant omis de lui demander de se prononcer sur le diagnostic. Par la suite, le travailleur déclare une rechute qui est acceptée par la CSST, mais contestée par l'employeur. Par le biais d'un nouveau procureur au dossier, l'employeur demande à la CSST de se prononcer sur le diagnostic de la lésion initiale du travailleur. Le dossier est transmis au BEM et à la suite de son avis, la CSST déclare que le diagnostic de la lésion initiale du travailleur est une entorse lombaire sur un rachis précédemment affecté d'une hernie discale attribuable à un traumatisme survenu en 1988. Le bureau de révision conclut que le dossier ne pouvait pas être référé au BEM, que l'avis est irrégulier, de même que la décision de la CSST qui l'entérine. Une omission grave est commise par la CSST lorsqu'elle décide unilatéralement, à l'insu de l'employeur, de restreindre la portée de l'arbitrage médical. La demande de l'employeur que le dossier soit référé au BEM afin qu'il décide du diagnostic de la lésion initiale est recevable et la référence au BEM est régulière: Le Procureur général du Canada c. Martin, [1997] C.A.L.P. 481 (C.S.).

La procédure d'évaluation médicale est irrégulière puisque la CSST, disposant d'opinions contradictoires du médecin ayant charge et du médecin désigné sur le diagnostic, devait soumettre cette question au membre du BEM au lieu de l'exclure. Le fait de ne pas avoir rendu de décision écrite sur les diagnostics reliés à la lésion professionnelle a brimé le travailleur dans ses droits, car il n'a pas été en mesure de se prévaloir de ses droits de contestation concernant cette question: Khan et Restaurant Le Taj, [2004] C.L.P. 1516.

Lorsque plusieurs diagnostics apparaissent au dossier et qu’il semble exister un différend sur cette question, il est préférable que la CSST soumette cette question au BEM. En l'espèce, il n'y a pas lieu de retourner le dossier à la CSST afin qu’elle soumette la question du diagnostic au BEM car la CLP conclut que la CSST a reconnu implicitement le diagnostic de lombosciatalgie et de hernie discale L4-L5 puisqu’elle n’a pas rendu de décision refusant ces diagnostics en relation avec la lésion professionnelle initiale comme elle l'a fait pour le diagnostic de discopathie: Lehoux et C.P.E. La Boîte à surprise, 241416-71-0408, 05-06-21, L. Couture, (05LP-82).

La CSST ne pouvait demander au membre du BEM de modifier son avis pour ne tenir compte que du diagnostic d'entorse lombaire, soit le seul diagnostic qu'elle avait reconnu. Cette intervention n'est pas appropriée et constitue une ingérence de la CSST dans le processus médical et prive le membre du BEM du pouvoir discrétionnaire prévu au deuxième alinéa de l'article 221 LATMP qui lui permet de donner son avis sur le diagnostic, s'il l'estime approprié. Dans ces circonstances, l'avis complémentaire émis par le BEM est irrégulier et les décisions rendues en conséquence de celui-ci doivent être revues à la lumière de l'avis initial: Gagné et Automobiles St-Charles, 2011 QCCLP 2667, [2011] C.L.P. 32.

Omission de la CSST de demander au BEM de se prononcer sur les limitations fonctionnelles

La CSST, en écartant l'opinion de son médecin désigné qui retenait selon elle des limitations fonctionnelles identiques à celles établies par le médecin traitant, demeurait liée par l'avis de ce dernier. En soumettant le dossier du travailleur au BEM, sur la base d'une deuxième évaluation des limitations fonctionnelles par un autre médecin désigné, la CSST a agi de façon irrégulière et non conforme à la loi. L'avis du BEM obtenu à la suite de cette deuxième évaluation est irrégulier de même que la décision de la CSST qui y donne suite: Élément et Construction Jeanielle inc., 184643-62-0205, 02-09-18, L. Boucher, (02LP-90).

Référence au BEM à la suite d'un avis complémentaire du médecin de l'employeur

La CSST achemine au BEM le rapport du médecin du travailleur et celui du médecin de l'employeur, ce dernier rapport ayant été rédigé à titre d'avis complémentaire et sans que le médecin de l'employeur n'examine à nouveau le travailleur. La procédure a été légalement engagée devant le BEM. Le médecin de l'employeur avait déjà examiné deux fois le travailleur avant d'émettre son avis complémentaire, à la suite d'une tomodensitométrie dont les résultats n'étaient pas connus lors du dernier examen du travailleur par le médecin: Grenier et La Brasserie Molson O'Keefe, 67373-62-9503, 96-05-28, R. Brassard.

Référence au BEM à la suite d'un rapport final

La CSST ne s'est pas sentie liée par le rapport final du médecin du travailleur qui avait consulté un autre médecin, quelques jours avant la date de consolidation fixée par le premier médecin. Elle n'a pas rendu de décision à la suite de ce rapport final et a plutôt choisi de faire examiner le travailleur selon l'article 204 pour ensuite référer le dossier au BEM. Dans les circonstances, la référence au BEM est régulière et conforme aux articles 204, 206, 212 et 224: Carpenito et Coffrage Alpine inc., 67133-60-9503, 96-07-30, A. Suicco.

Référence au BEM avant l'avis complémentaire prévu à l'article 205.1

Comme la CSST n'a pas attendu de recevoir l'avis complémentaire prévu à l'article 205.1 pour demander un avis au BEM, cette demande était prématurée: Lecompte et Action Chevrolet Olsmobile inc., [2003] C.L.P. 312.

L'article 205.1 accorde au médecin qui a charge un délai de 30 jours de la réception du rapport du médecin de la CSST pour produire un avis complémentaire. Comme ce délai n'était pas expiré au moment où la CSST a transmis le dossier au BEM et que le membre a rendu son avis, la procédure d'évaluation médicale était prématurée et la décision de la CSST entérinant l'avis du membre était irrégulière. La CSST aurait dû se déclarer liée par l'opinion du médecin qui a charge dans son avis complémentaire qui confirmait celle du médecin désigné: Rona l'Entrepôt et Ducharme, [2004] C.L.P. 718.

L’omission de la CSST d’acheminer le rapport d’évaluation médicale du médecin désigné au médecin qui a charge, afin que ce dernier puisse émettre un rapport complémentaire en étayant ses conclusions, constitue une irrégularité qui entache le processus d’évaluation médicale. La CSST ne pouvait pas soumettre le dossier au BEM, ce dernier fut irrégulièrement saisi des questions soumises et la décision de la CSST qui l’entérine est illégale et doit être annulée: Umanzor-Flores et DHL International Express ltd, [2005] C.L.P. 581.

L'article 212.1 énonce la possibilité pour le médecin qui a charge de remplir le formulaire intitulé «Rapport complémentaire» après avoir pris connaissance du rapport du médecin de l'employeur. La CSST a obtenu du médecin qui a charge un complément d'opinion au moyen du formulaire d'information médicale complémentaire prévu à l'article 202. Le médecin qui a charge a rempli ce formulaire ainsi que le rapport complémentaire le 15 novembre 2010 et la CSST les a reçus le 17 novembre. L'examen par le BEM a eu lieu le 18 novembre. Son rapport a été dactylographié le 19 novembre, il a été signé le 24 novembre puis expédié à la CSST le 29 novembre. Les notes évolutives révèlent que, dans l'intervalle, l'agente d'indemnisation a pris connaissance des deux formulaires remplis par le médecin qui a charge. Elle a considéré qu'ils avaient été produits hors délai. C'est le cas pour le rapport complémentaire prévu à l'article 212.1, un délai de 30 jours étant accordé au médecin qui a charge pour ce faire. Par contre, comme cet article n'impose aucune sanction en cas de non-respect du délai qui y est prévu, il ne s'agit pas d'un délai de rigueur ni de déchéance. Au surplus, le 22 novembre, le BEM n'avait toujours pas signé son avis, de sorte que, si la CSST avait agi en temps utile, soit dès le 17 novembre — ou, à la rigueur, le 22 novembre —, le BEM aurait pu tenir compte des commentaires exprimés par le médecin qui a charge et ainsi rendre un avis conforme à la loi. Par conséquent, l'avis du BEM quant aux séquelles permanentes est irrégulier, illégal et irrecevable: Centre Jardin de l'Aéroport inc. et Granger, [2011] QCCLP 5147.

Refus de la CSST de transmettre le dossier au BEM à la demande de l'employeur

La CSST ne pouvait transmettre au BEM l'avis du médecin du travailleur et le rapport de son médecin désigné, après avoir antérieurement réfusé à plusieurs reprises de le faire à la demande de l'employeur dont le médecin avait produit, dans les délais, un rapport infirmant les conclusions du médecin du travailleur. La procédure d'évaluation médicale ayant mené à l'avis du BEM est irrégulière: Coffrages C.C.C. ltée et Côté, 153113-03B-0101, 01-01-29, R. Savard.

Retard de l'employeur à contester le rapport du médecin du travailleur

La référence au BEM a été faite de façon régulière malgré le retard de l'employeur à contester le rapport du médecin du travailleur en raison du fait qu'il croyait erronément qu'il lui suffisait, pour enclencher la procédure d'évaluation médicale devant le BEM, de transmettre au médecin du travailleur le rapport de son propre médecin accompagné du formulaire de rapport complémentaire prévu à l'article 212.1 et d'informer ensuite verbalement la CSST de ses démarches: Desjardins et Sears Canada inc., 112384-72-9903, 99-11-16, M. Bélanger, révision rejetée, 00-05-15, S. Di Pasquale.

Retard de la CSST à contester le rapport du médecin du travailleur

Le délai de neuf mois qui s'est écoulé avant que la CSST ne demande de nouveau un avis au BEM, en février 2010, basé sur la même expertise médicale que lors de la demande ayant conduit à l'avis d'août 2009, combiné à l'omission d'actualiser le dossier à la suite de la réception des documents attendus, constitue une injustice et un motif supplémentaire pour conclure à l'irrégularité du processus d'évaluation médicale. La procédure d'évaluation médicale ayant mené à l'avis du BEM produit en mars 2010 est irrégulière. En conséquence, les décisions qui ont suivi sont déclarées nulles et sans effet: Gagné et Automobiles St-Charles, 2011 QCCLP 2667.